2009 – Crise en quarantaine
Dimanche 4 janvier
Retour au bercail
lyonnais : plaisir de retrouver le nid partagé avec ma BB, même si la
reprise professionnelle a été avancée à demain 13h30, au lieu de mardi matin,
pour cause d’absence d’intervenant en technique pompier.
Chez le pôpa, les frères
poussent et les nouveaux animaux de compagnie, chatte et chienne, fournissent
de nouveaux sujets de râleries paternelles.
Les fâcheries
israéliennes prennent-elles un tour militaire ? Anéantir les pontes du
Hamas quitte à éloigner encore un peu plus le règlement du conflit.
Lundi 5 janvier, 23h20
Sarkozy s’active, vainement, au
Proche-Orient et l’opération de Tsahal ne mollit pas. Plus une infrastructure
du Hamas debout, et le million et demi de Palestiniens dans la bande de Gaza
qui oscille entre haine et terreur. Une façon de relativiser nos problèmes
économiques lorsqu’on songe aux conditions de vie des malheureux civils.
Une semaine pédagogique qu’avec
les pompiers et Concours sécurité : cela me rend plus serein. Si seulement
je pouvais ne plus me taper ces enflures
de brancardiers. Les tronches revanchardes et trouduculesques de
certains me rendent allergique à la plus furtive de leur présence. Et dire
qu’ils constituent une source financière non négligeable par les places
financées par la région… A vous dégoûter de la formation.
Reçu de maman une planche de
photos des festifs 30 et 31 janvier partagés : très réussie et traduisant bien
la complicité familiale.
Avant de plomber les paupières,
rapide détour vers quelque siècle de l’Ancien Régime revisité par l’incisif
Alain Minc dans Une histoire de France, ouvrage dense qui
mériterait plusieurs lectures pour en tirer toute la moelle.
Mardi 6 janvier, 23h15
Glaciation renouvelée sous les
cieux hivernaux.
J’ai un peu dialogué ce soir, sur
Msn, avec cette pétillante Adèle
C., qui est aujourd’hui en première économique, à bientôt dix-sept ans.
Mon dieu, quel vieux croûton je fais. Elle semble vivre pleinement sa jeunesse,
alors que j’avais limité la mienne au retranchement mi introspectif mi
fantasmatique. Regretter ce choix ? Non, cela m’a forgé autrement et le
contact renouvelé du collectif aurait fini par m’incommoder. Adieu vat, pour
reprendre la formule du PPDA… chacun à vivre son âge…
Samedi 17 janvier, 23h48
Vu l’enregistrement de La case
de l’oncle doc consacrée à la seule réunion des trois monstres de la
chanson française, Brassens, Brel et Ferré. Quelle puissance rassurante de leur
présence, de leurs propos… pour éviter de tourner le dos à l’humanité. Seule
faiblesse affichée, comme pour d’immatures ados, le thème de la femme.
Mercredi 20 janvier
Le longiligne président a pris ses fonctions. Le
froid polaire n’a pas empêché quelque deux millions de personnes d’être sur
place pour assister à l’investiture.
Je regarde la façon dont je tiens mon plume :
exactement celle d’Obama, gaucher lui aussi. Curieux effet de le voir signer
les documents officiels consacrant sa prise de fonction avec une main au-dessus
de ce qui s’écrit, et non en dessous, ce qui oblige parfois à l’application
d’un buvard pour éviter d’étaler l’encre fraîche. Avec l’expérience, plus
besoin de protection.
De gigantesques défis se profilent pour lui… On
ressentait toute la gravité de l’instant, celui crucial d’une lutte contre ce
qui sera peut-être la crise majeure du XXIe siècle. Plus de guerre
mondiale façon Vingtième, mais des dépressions mondialisées favorisant les
chaos localisés et une redistribution de la puissance économique. Apparemment
plus pacifique… leurre commode.
En attendant, bonne chance M. le Président des
Etats-Unis, le labeur commence dans quelques heures.
En France, Sarkozy tire l’oreille aux banquiers
trop gourmands qui préservent leur droit à une prime sans se soucier de l’effet
désastreux que cela aurait dans l’opinion publique.
Un député de l’UMP, Frédéric Lefebvre, va même
jusqu’à les menacer, en cas de refus persistant d’annuler la prime, de les
dénoncer à la vox populi. Finalement, pas très loin du lynchage
organisé. Bien dangereuse dérive…
Mercredi 21 janvier, 23h46
Appartement d’immeuble voisin bien bruyant ce
soir : des mâles gueuleurs, du féminin rigolard, une convivialité
incommodante… nulle inspiration.
Mardi 27 janvier, 22h56
Chacun prend ses marques avant l’explosion sociale
fantasmée ou redoutée. L’Assemblée nationale s’agite autour d’une réforme de
son fonctionnement, rejette une motion de censure, pour faire croire à son
utilité. La rue, peuplée jeudi prochain de fonctionnaires, s’essayera à un
simulacre de pré révolution sans parvenir à autre chose qu’un classique
mouvement de grève.
Mercredi 28 janvier
Chacun sur ses gardes : tant que les systèmes
de protection assurent aux victimes de la crise et aux plus démunis le minimum
vital, l’explosion sociale se cantonnera à la version pétard bruyant mais
inoffensif. L’angoisse de perdre le peu d’avantages qui leur reste les
paralyse.
Amusant de constater combien la figure du Banquier,
que j’ai si souvent brocardée dans ce Journal, est devenue le punching-ball
idéal pour exacerber ses ressentiments.
Mardi 3 février, 22h04
Après l’irrationalité délirante des marchés
financiers, s’amorce la phase du protectionnisme à tout crin défendu par les
pouvoirs en place pour caresser dans le bon sens des populations excédées.
Opportunité de relocaliser l’économie pour
éviter l’absurdité de déplacements de marchandises pouvant être produites sur
place ou réflexe dangereux qui réduira d’autant la perspective de développement
des pays tournés vers eux-mêmes ?
La certitude : la paupérisation de citoyens ne
pourra qu’exacerber la haine de l’autre, celui qui viendrait piquer l’emploi
aux gens du cru. Le nationalisme social surgira ainsi avec une vigueur
décuplée, même si ses perspectives ne sont qu’à courte vue.
A suivre, donc…
Samedi 14 février, 23h30
De retour au pub Le Red
Lions, accueilli par celle qui m’avait fait abandonner
ce domaine de quelques virées nocturnes. Comme si de rien n’était, des deux
côtés – je choppe sans effort les codes relationnels du lieu désormais sans
tabac.
L’échange furtif m’incline à m’enquérir du passage
éventuel de Bonny, perdue de vue : en tournée, mais repasse parfois dans
l’antre… Coup de massue en apprenant qu’Eddy, grand gaillard solide, s’est
sorti d’un putain de cancer ! Me submergent les regrets de ne pas
avoir relancé le contact.
Les liens se délitent pour si peu de choses :
un courriel négligé, un message omis, une parole de moins, un geste non
accompli… un gâchis de plus parmi la foultitude d’autres.
Trajet vélo’v avec frimas saisissant :
phalange en sursis, oreilles engourdies pour retrouver l’atmosphère perdue,
avec rythmique enveloppante. Renouer avec les réflexes de l’inspiration par le
bruit et la musique entremêlés. La disparition des volutes briderait-elle les
à-coups pamphlétaires ? L’époque sur le fil rendrait-elle cette antre du
ludique surjoué ? A songer aux épreuves annoncées on peut
s’enterrer la face et croire à la ouate entretenue. Des coups de la crise à la
guimauve d’apparat, l’écart se fait croissant.
L’actualité courante prend une saveur de sursis à
l’écoute du grondement d’outre-tombe. Comme une veillée d’armes à affûter.
Dimanche 15 février, 23h44
Une semaine pour se purger des médiocrités
répétitives du labeur. Un peu de respiration en ces temps partout diagnostiqués
comme terrifiants. Une raison de plus pour B.-H. Lévy de ne pas croire une
seconde à la fin de l’histoire théorisée après la chute du mur de Berlin.
La série Empreintes a diffusé le document sur son singulier parcours. Là que je prends
davantage conscience de mon attachement à ces figures que j’incendiais avec malsaine jouissance lorsque
j’embrassais les monomanies de Heïm. Quelle incroyable distance :
cette hargne cultivée n’a plus de sens pour moi. Se sentir simplement, mais
profondément, en phase avec ses convictions et non pour plaire au meneur, au groupuscule
idéologique qui fait reluire son système par l’excès en tout.
Samedi 21 février, 0h18
Alors que la priorité absolue doit être de
préserver les emplois – à tout le moins de limiter les destructions, les
mouvements syndiqués réclament une hausse des salaires. Que cela fragilise,
jusqu’à la liquidation, les plus petites entités économiques, augmentant de
facto le taux de chômage, peu importe, les revendications doivent persister.
Les impératifs du réel ne comptent plus…
Un peu comme l’hystérie des anti-OGM qui vouent à
la damnation éternelle des recherches scientifiques au nom du déifié principe
de précaution qui, s’il avait régné les siècles précédents, aurait retardé
voire empêché certaines découvertes capitales. Que la planète doive augmenter
la production agricole de presque 70 % d’ici 2025, pour nourrir neuf
milliards d’êtres humains, cela ne compte pas pour les faucheurs volontaires. Le bio
comblera les besoins comme le dieu empêche les catastrophes. Une efficacité
consubstantielle…
Mercredi 25 février
90 000 personnes de plus, en un mois, pointant
au Pôle emploi : les conséquences du dérèglement économique mondial
n’épargne en rien la France. La mine déconfite de Christine Lagarde, ce soir,
sur le plateau de France 2 contrastait avec un discours aux accents de méthode
Coué.
Les politiques improvisent les contre-feux pour
limiter la casse, mais peu de choses à en espérer. La puissance du panurgisme
économique est telle qu’aucun volontarisme politique ne semble en mesure de
l’annihiler.
Restent les symboles, pour éviter la révolution
sanguinaire à la sauce Besancenot (pour la France) : Obama fustige la pratique abusive du secret
bancaire suisse et réclame la levée pour 560 000 comptes ; Sarkozy
veut une nouvelle répartition des dividendes… Le monde s’emballe, encore sur le
mode pacifique pour les pays les plus avancés… mais pour combien de temps
encore ?
Samedi 28 février
Retour au bord du Rhône pour goûter au soleil
pré-printanier.
Marc Edouard Nabe m’amuse avec son petit cirque
médiatique. Il se défend d’appartenir au système des lettres alors que le groin
suinte de la moindre opportunité offerte : un Café
littéraire par-ci, un Chez
F.O.G. par là et il cultive ainsi sa pseudo différence
laissant faire, le sourire complice, la promotion de ses œuvres publiées par
ceux-là mêmes qu’il fustige, sans que l’on comprenne la teneur précise de sa
défiance.
Malignité de sa posture prétendument réfractaire et
qui n’attend que l’occasion de fleurir le parterre des médias pour que le
commerce de ses livres se poursuive. N’attendons donc pas, comme il le
revendique, que l’époque soit au diapason de notre approche du monde pour
affiner nos sons littéraires.
Sa démarche d’utiliser des tracts rejoint,
cependant, mon choix de l’Internet pour proposer gracieusement un témoignage.
La haine semble dans l’air du temps littéraire. On
en reconnaît la présence chez les plus incontournables plumes, l’utilité et la
dimension artistique. Comme un écho à mon ancrage comme diariste pamphlétaire.
Lundi 2 mars
Galtier-Boissière avait sa drôle de paix
pour affûter son style et aiguiser ses crocs. J’ai de plus en plus la sensation
d’assister à la crise majeure d’une humanité mondialisée par le sens
historique, sans qu’aucun garde-fou n’en prévienne la chute.
Comme lors de la Guerre du Golfe, je ne suis qu’un
observateur horrifié des dérives humaines. Rendre compte dans l’instant, avec
l’imperfection de l’immédiateté mais l’authenticité inhérente, demeure le
privilège du diariste. Assister à la tourmente naissante de pays développés dont
les bases économiques s’effondrent sans être, pour l’instant, touché dans sa
vie propre, développe en soi une fascination déprimée.
L’Union européenne n’a pas su relever le défi d’une
réaction coordonnée et massive pour contrer la crise en cours. Le rejet, par la
France puis les Pays-Bas, des nouvelles règles de fonctionnement à 25 puis 27
membres, tout comme l’intégration prématurée de pays à l’économie fragile, ne
vont pas favoriser l’europhilie. L’urgence de la situation démontre qu’il
aurait fallu un leader et un visage à cette UE, plutôt que cette absurde
présidence tournante tous les six mois. Un plan unique à l’échelle européenne,
adopté à la majorité qualifiée et visant l’ensemble des pays membres, aurait eu
plus de gueule que les plans nationaux tirant à hue et à dia. Voilà donc les
nouvelles désastreuses qui s’enchaînent sans réaction européenne à la hauteur.
La France, elle, s’inquiète des dérives de ses
DROM, Guadeloupe en tête avec un LKP dont le service de sécurité rappelle
certaines milices intimidantes de partis extrémistes. Le combat de ces
militants ne peut souffrir aucune contestation : il faut rejoindre et
épouser leurs causes sous peine d’être recadré sans douceur. Belle conception
du dialogue social. Obtenir de force la signature d’un accord prétendu sur
l’augmentation de salaires. Résultats des semaines de blocage imposé : une
île au bord de la ruine, un taux de chômage qui va s’amplifier et des
perspectives sombres d’explosions plus radicales. Si le leader du LKP avait
pour ambition de paupériser l’île, comme un Castro l’a fait pour la sienne,
alors l’initiative est réussie.
Jeudi 5 mars, 22h15
Avec certains des apprentis brancardiers que Cqfd
accueille, et que j’ai quelquefois en charge, je suis aux premières loges de ce
qui pourrait s’affirmer comme des ennemis de l’intérieur, en cas d’explosion
sociale, voire de guerre civile.
Ce sujet n’est que très rarement évoqué dans les
médias traditionnels, et toujours minoré ou excusé : certains jeunes
témoignent d’une haine envers l’Occident (incarné par les USA), d’un
antisémitisme viscéral et d’une complaisance sans borne pour les autocrates
musulmans, ou prétendus tels, ainsi que pour la nébuleuse et criminelle Al
Qaida.
Ainsi, en abordant ce matin, dix minutes avant la
fin de la tranche de deux heures, la poursuite pour crime de guerre et contre
l’humanité du président soudanais par la CPI, sur leur demande, je cerne
rapidement la dérive. Non seulement certains n’admettent pas cette poursuite
judiciaire, mais ils en profitent, en vrac, pour exprimer leur admiration pour feu
Saddam Hussein, leur exécration des Etats-Unis, leur haine d’Israël (ne surtout
pas leur parler d’un équilibre des torts dans cet interminable conflit), et les
sous-entendus en filigrane associés à un comportement bruyant et irrespectueux,
les quelques figures à sortir de ce groupe incarnent l’échec absolu des
affichages pour la galerie de l’intégration à la française. Leur seul
objectif : profiter des systèmes d’aides en place en s’investissant le
moins possible.
Mardi 10 mars, 22h26
Une belle
tête de bouc émissaire à faire tirer la langue au bout d’une pique en ces temps
pré révolutionnaires : Fr. de Margerie devrait se méfier en sortant de
chez lui. Le PDG de Total est l’objet d’un consensus politique qui descend en
flamme son projet de dégraisser la bête multinationale de 555 postes alors
qu’elle annonçait des profits record pour 2008. De Besancenot à Laurent
Wauquier du gouvernement, la condamnation s’élève et le simplisme de l’approche
sert les intérêts de chaque camp politique.
Vendredi 13 mars
L’amorce
d’une douceur printanière devrait contre balancer les effondrements alentour.
Ambiance pré révolutionnaire où la bête à saigner s’obstine aux mesquineries
économiques. L’anticipation des désastres à venir ne peut plus se tolérer pour
les âmes en sursis et dont les engagements existentiels dépendent du peu de
principes supra économiques qui restent dans le sauve-qui-peut industriel.
À lire ou
entendre l’abondance haineuse des victimes de Madoff, on saisit
l’incommensurable déterminisme de la possession. Aucune distinction à avoir
entre les catégories sociales : ce qui importe c’est l’acharnement contre
le fautif, le désigné responsable de nos malheurs.
Avec le
son Coldplay, la renaissance se choppe comme une bouffée de fraîcheur : le
nouveau-né qui gambade, hésitant entre les quatre pattes et les deux
jambes ; le chenu qui aspire les quelques rayons comme une jouvence
calorifique ; les demoiselles en confidences réciproques dont n’arrive
jusqu’à moi que la douce crête du son. Parties, je prends leur place pour me
régénérer face aux rayons qui dardent. La saison froide résiste encore en cette
fin d’après-midi par une fraîcheur qui vous envahit. L’auditif ennoblit par les
airs de Prospect Mark, le monde s’anime en douceur, les gestes simples,
les jeux conviviaux, les complicités
improvisées.
Lundi 16 mars, 23h18
Pour les gouvernants en place, l’obsession se
résume à ne surtout pas apparaître d’une quelconque connivence avec des
financiers indélicats ou des entrepreneurs qui licencient en masse, voire
ferment des sites. L’ambiance sociale des pays encore développés, avant
peut-être le chaos généralisé, est à soupeser avec ce qu’il y a à perdre et ce
que l’on peut gagner en cas de lutte violente contre l’autorité établie. Lancer
quelques œufs et une banderole sur la tronche du directeur du site Clairoy (?)
de Continental, tabasser à coups de pied la représentation humanoïde d’un
responsable, ça passe encore, mais lorsque la désespérance individuelle sera
galvanisée par la vague collective, plus aucune retenue ne vaudra au nom de sa
propre sécurité matérielle.
L’effet d’entraînement vaut tant pour assouvir
l’indécente cupidité comme l’a magistralement révélé l’escroc Madoff que pour
ceux dont le seul impératif est la survie quotidienne.
Jeudi 19 mars, 21h48
Reçu un message sur Facebook d’un journaliste-réalisateur, un certain Benjamin Rousset, qui
souhaiterait s’entretenir avec moi sur Paul Léautaud. Il doit lui consacrer un
documentaire. Que pourrais-je bien lui apporter, à part le témoignage d’un
ancien lecteur du bougre, toujours séduit par le personnage, mais dont les
détails de son existence se sont effacés par l’absence de fréquentation via de
régulières (re)plongées dans son œuvre. Il me serait ainsi profitable de
m’imprégner de son ressenti suite à la crise de 1929 et de tenter une
comparaison avec ce que je vis aujourd’hui par médias interposés.
Ainsi, la deuxième journée nationale de grève de
l’année, après celle du 29 janvier, m’a flanqué un dégoût de l’actualité. Plus
aucun enclin aux détails des défilés, aux postures des ténors politiques et
syndicaux, aux pseudos arguments simplistes de quelques grévistes remontés. A
quoi sert l’agrégat d’un jour ? La radicalité affichée d’un Besancenot
peut-elle un instant se concilier avec les aspirations à la négociation sociale
d’un Chérèque ? Alors tout cela, simagrées en attendant la vraie rupture…
Mardi 24 mars, 22h21
Demain, ma BB aura 42 ans. Drôle d’effet ce temps
qui défile. L’ambiance médiatico-sociale est à l’alarmisme et à la
stigmatisation.
S’affoler de la mécanique infernale d’effondrement
et dénoncer, par l’approche simpliste, quelques actes de potentats qui
révoltent la base populaire si exempte de travers…
Alors, pour mieux se faire voir des
électeurs-censeurs, les politiques en rajoutent dans la mise au pilori des
abuseurs économiques qui se goinfrent même lorsque l’argent public est venu
suppléer les défaillances de gestion. Presque une incitation à se payer de la
tête patronale au bout d’une pique… Les Besancenot et Domota peuvent savourer
cette tournure. Faut-il remettre en cause le modèle mondialisé de
l’économie ? Pour quel système à lui substituer ?
Certaines utopies n’ont pas vocation à se réaliser.
Jeudi 26 mars, 22h10
En fin d’après-midi, sitôt sorti des locaux de
Cqfd, j’appelle Benjamin Roussel, réalisateur de documentaires qui m’avait
contacté via Facebook pour son projet sur Léautaud.
Echange au cours duquel il me résume son
objectif : réaliser une série consacrée à des personnalités ayant résidé
en Hauts-de-Seine, parmi lesquelles Céline, la Pompadour et… le père Léautaud.
Il souhaiterait enregistrer et filmer un entretien d’une demi-heure avec moi,
notamment pour le volet Journal littéraire.
J’apprends qu’il doit faire de même pour
toutes les plumes qui ont écrit sur lui, comme Edith Silve ou Martine Sagaert.
Toutes ? Non… un certain Pierre Perret ne pourra être associé à ce premier
documentaire sur le bougre gouailleur au risque, pour le réalisateur, de subir
la défection des trois ou quatre obscures personnalités ayant pondu sur
Léautaud, voire même d’être attaqué en justice.
Raison de cet anti-perretisme primaire ? Les
prétendus spécialistes affirment que l’auteur du Zizi trompe son monde
et n’a, en fait, jamais rencontré l’aristocrate libertaire… Quel intérêt aurait
donc le chanteur ultra populaire d’inventer cela ? Consternant de bêtise.
Celui qui aurait pu donner une fabuleuse dimension
à ce documentaire est interdit d’antenne au profit de doctes ennuyeux entre
lesquels je vais immiscer ma libre parole, sans toutefois gêner la démarche de
Roussel. Ce petit milieu littéraire se gonfle d’être la référence incontournable :
mesquinerie jalouse de la dimension d’un Perret qui gambade sur leurs
plates-bandes. Dérisoire.
J’irai donc vendredi 10 avril à Paris pour
enregistrer ces réflexions improvisées.
Samedi 4 avril
Réception des parents B pour le week-end, après une
longue période de densité pédagogique, entre groupes de pompiers clairsemés
pour préparer les épreuves écrites et orales et les apprentis brancardiers,
parmi lesquels d’horripilants profiteurs au je m’en foutisme exacerbé.
Pour la semaine à venir que de l’administratif, ce
qui va me permettre de replonger dans l’existence de Léautaud via son Journal et diverses analyses. Une façon
de faire ressurgir, avec plus de précision, les liens qui m’unissent au
diariste avant l’entretien de vendredi prochain avec Benjamin Roussel.
Vu jeudi soir, à la salle 3000, le vieillissant Al
Jarreau. Touchant humainement, mais une prestation décevante. L’artiste
apparaît tout malingre, le visage gonflé (par un traitement ?) et la voix
mal assurée. Une jeune femme partage avec lui la scène pour venir, le cas
échéant, suppléer les carences vocales du chanteur. Des musiciens performants
l’entourent, mais le son trop bas, peut-être pour qu’Al Jarreau le supporte,
empêche toute réelle symbiose avec le spectacle.
A l’occasion du soixantième anniversaire de l’OTAN
et de la réintégration de la France dans l’un des commandements, les chefs
d’Etat et de gouvernement se sont réunis, peu de temps après le G20, pour
accueillir symboliquement la France. Vingt-huit nations, mais l’une d’elle, via
son dirigeant, se distingue par la pire des incorrections : Berlusconi,
qui a récemment intégré des fascistes dans son gouvernement hétéroclite, loupe
les trois quarts des cérémonies pour se consacrer à un coup de téléphone
semble-t-il primordial. Alors que les autres suivent scrupuleusement le
programme établi, l’affairiste politique, gominé et teinté de près, se
distingue de la plus minable façon. Nous saurons, dans les prochains jours, si
le sujet le justifiait.
Dimanche 5 avril
Je profite du calme à venir volet pédagogique pour
vagabonder entre les décennies Léautaud et les événements symboles de la crise économique post 1929.
Première découverte : l’auteur du Journal littéraire, lorsqu’il
collaborait à l’étude de Me Lemarquis, administrateur-liquidateur,
en 1902, a posé les scellés rue Aubert dans l’affaire Humbert-Crawford. Une
institution financière, destinée à alimenter le train de vie somptuaire de Mme
Humbert née d’Aurignac, avait abusé son monde lors du mariage de la dame,
laissant entendre qu’une dot considérable, cent millions d’alors, était
consignée dans un coffre sis dans l’hôtel particulier, 65 avenue de la Grande
Armée à Paris, le temps de régler le contentieux de la succession Crawford avec
les neveux du testateur. En fait, rien de la succession n’existait et le coffre
n’accueillait que de la peccadille… mais la dame Humbert s’affichait toujours
avec l’apparente richesse maximale, celle financée par l’apport des
« niais » (selon Léautaud) qui croyaient à des rendements
pharamineux. Une Madoff avant l’heure qui a abusé des si coupables penchants à
la goinfrerie financière. Les victimes n’ont donc pas plus de valeur que leur spoliateur.
Le krach du 24 octobre 1929 n’aura de conséquences
perceptibles en France qu’en 1931, tout comme aujourd’hui on nous assure que le
matelas social du système de redistribution français atténue les effets de la crise
économique. Cela n’empêche pas un scandale financier bien français. Fin 1930,
la banque Oustric est liquidée suite à la gestion sans scrupules de son
fondateur Albert Oustric. Les appuis politiques dont il a bénéficié, notamment
celui de Raoul Péret, finit de discréditer la classe politico-financière aux
yeux de l’opinion publique.
Changement d’ambiance en 2009 : les détenteurs
de l’exécutif prennent bien garde de se désolidariser des perversions
financières, quitte à sombrer dans la bouc
émissairisation populiste…
S’imprégner des temps anciens pour mieux saisir la
mécanique humaine des drames présents, cela édifie et conforte davantage ma
thèse, mise en exergue sur mon site Crise financière ?
Débâcle humaine ! : ce n’est pas le système
en place qui incline au pire les comportements, mais la nature humaine de
certains qui dénature et vicie le système.
Vendredi 10 avril
Vers 17h. Sorti de l’interview de Benjamin Roussel
sur Paul Léautaud. Me voilà à la terrasse d’un café où, dans le pire de mes
années 90, j’avais laissé s’écouler quelques délires mal maîtrisés auxquels
s’ajoutait un œil douloureux que j’extrapolais purulent : Le Bonaparte
à la devanture imposante.
Très agréable, mais un peu stressant moment que cet
entretien filmé dans un cossu quatre étoiles, à taille intime, L’Hôtel rue des
Beaux-Arts, lieu privilégié d’Oscar Wilde pour ses repos parisiens. La
relecture de mes sélections du Journal littéraire, en 1987, alors que je
découvrais l’œuvre, me fait tomber sur un hommage à Wilde, singulière
personnalité appréciée par le bourru du Fontenay. Réalisateur manifestement
heureux de cette trouvaille…
Prestation abondante de ma part, peut-être un peu
trop à mon goût, au risque d’une indigestion pour les téléspectateurs à venir.
Pour Roussel tout a semblé convenir. A la fin de l’échange, il me confie
n’avoir pas retenu Edith Silve pour nourrir ce documentaire, car elle lui est
apparue « folle » dans sa façon d’être, ce que n’a pas empêché sa
volonté captatrice, souhaitant tout contrôler jusqu’à exaspérer et tentant de
se faire rémunérer pour l’intervention envisagée. Le jeune réalisateur en a été
écœuré, préférant renoncer à l’intégrer. Question judicieuse de sa part :
d’où tient-elle, alors qu’elle n’a connu ni Léautaud ni même Marie Dormoy, le
titre d’exécutrice testamentaire du feu
réfractaire ? Un tel enclin pour les petits coups médiocres en voulant
impliquer de prétendues relations littéraires détonne tant avec les pratiques
du père Léautaud qu’il la ratatine de facto à une usurpatrice de fonction sans
doute via la SPA, légataire universelle des écrits du bougon misanthrope.
Dérisoire antichambre d’une saprophyte qui a cultivé sa fantomatique importance
serinée sur la bête littéraire. Elle détiendrait ainsi plusieurs inédits de
Léautaud…
Mardi 14 avril, au soleil de Fontès
La maisonnée estivale de maman et Jean présente une
belle forme extérieure achevée, alors que son insolite voisine, caprice
irrationnel d’un couple baba cool, s’éternise dans l’inachèvement. Des finances
à sec et un mal de dos récurrent du mari paralysent le projet écologique, avec
sa façade vitrée encore ouverte aux vents, qui fait ressembler la haute demeure
à une construction de bureaux plus qu’à un logis de particuliers. Ils viennent
de nous saluer… charmants au demeurant.
Pour nous, l’objectif est moins titanesque :
poncer et peindre la pièce principale à vivre.
La relecture, dans ce Journal, du premier
jet de Foutez-lui la paix ! me fait prendre conscience de l’écriture aux lignes folles qui courent
le long de lignes non respectées. L’inspiration, lente à venir pour ce texte,
m’a ensuite pris au dépourvu, la main ne parvenant à suivre les phrases
émergées qu’au prix de délires graphiques.
Mercredi 15 avril, grisaille et vent
A notre entrevue improvisée, vendredi dernier à
Paris, mon père se confie un peu sur son escapade au Mexique à la fin des
années 80, qui devait se conclure par un non-retour. Période de tourments et de
sentiments antagonistes, à l’image du bonheur pris à la découverte de sites
époustouflants tout en étant tenaillé de remords en songeant à ses enfants dans
l’ignorance totale de son initiative éperdue.
J’écoute sa narration en tentant de me remémorer
mon état d’esprit d’alors – maman lui vouait un profond ressentiment de cet abandon de fait – : rien ne me
revient. Toujours cette diffuse indifférence aux êtres et aux événements qui
devraient m’affecter. Trop égocentré pour me laisser toucher par l’alentour.
Les circonstances font et défont les liens sans que j’en souffre, sans qu’un
manque essentiel mine mon existence. Sans doute que l’équilibre de vie qui se
déroule avec ma BB renforce ma relativisation du reste.
Deux personnalités féminines subsistent comme des
rencontres cardinales que j’aurais souhaité pérenniser : Aurore la
première, le coup de foudre initial, au charisme puissant, enveloppant, qui
vous étourdit et fait passer le reste de l’univers au second plan, tel un
improbable épiphénomène ; Shue la déesse persane, alliance de beauté rare
du visage et d’une intelligence de la situation sans pareille, rencontrée au
détour d’une allée de la majestueuse bibliothèque nationale sis alors rue de Richelieu,
comme une apparition… Voilà les deux figures essentielles par la densité
humaine exhalée.
Jeudi 16 avril
Peintures à l’esthétisme pastel pour la grande
pièce principale : alternance de deux coloris (jaune d’un pâle éclatant et
abricot léger) qui se complètent pour un esthétique résultat. Le plafond n’a
pas eu le blanc de qualité unie qui aurait parachevé l’espace à vivre. Semaine
de dépaysants labeurs qui file à toute vitesse.
La coupure purgative d’avec l’actualité est totale
depuis lundi, et jusqu’à samedi. Les hystéries et monomanies de crise
claironnée et entretenue n’ont plus aucune résonance… La vie recentrée sur
l’affectif de proximité calme son rythme artificiel et ne se charge que de
l’essentiel pour un bien-être perpétué.
Vendredi 17 avril
Quelques bribes rapportées d’une radio allumée pour
le petit déjeuner : les séquestrations d’employeurs se multiplieraient en
France. D’un cas isolé, et qui aurait pu être sanctionné tel que le prévoie le
code pénal, la fanfare des médias en fait un exemple (condamné ou pas) pour
tous les salariés menacés de licenciement. Certes, les plans sociaux justifiés
par la crise économique mondiale deviennent le sport entrepreneurial en vogue, mais cela
autorise-t-il l’impunité de ceux qui
s’en estiment victimes ? La voie judiciaire devrait être la seule qui
permette le rétablissement dans ses droits. Laisser s’opérer puis tolérer la
négociation par la force, par l’entrave à la liberté du prétendu fautif, c’est
la première étape d’un délitement de l’Etat de droit, avant l’implosion du
système social et le règne de la loi du plus fort.
Sans doute notre pays n’ira pas jusque-là tant que
le système bancaire et la redistribution sociale fonctionneront, mais ces
entorses à la légalité commune préfigurent une dégradation durable des
conditions de vie collective.
Certaines voix politiques, jusque dans les rangs de
partis de gouvernement, se complaisent
dans la dangereuse compréhension des séquestrations. Les mêmes nous expliquent
la légitimité de rémunérations exorbitantes de footballeurs, qui distraient la
masse grognonne, tout en vouant aux gémonies les dirigeants de multinationales
françaises qui perçoivent des sommes comparables à celles des coureurs du
ballon rond. Le populisme de gauche est là tout entier ! Accorder du
crédit aux simplismes d’une population à bout qui ne souhaite qu’une seule
chose : que surtout le système de fond ne change pas, qu’il redevienne la
vivable vitrine d’avant la crise des subprimes, celle où chacun
s’excitait pour augmenter son sacralisé pouvoir d’achat (des fonctionnaires le
réclament d’ailleurs toujours, lors de manifestations hétéroclites, ne se
rendant pas compte du grotesque et de l’indécence de leur revendication dans le
contexte social du moment).
Alors, sans doute, faudrait-il purger, à l’échelle
mondiale, les établissements financiers et les plus grosses sociétés coupables
de pratiques délictueuses, accueillant
des êtres obnubilés par l’amassement pécuniaire jusqu’à l’obscénité provocatrice.
Mais les remplacer par quoi et par qui ? Qui peut affirmer que la vertu se
concentre de telle manière chez les partisans d’un autre monde que leur confier
les rênes d’une utopique direction mondiale résoudrait l’essentiel des maux de
notre civilisation économique ? Leurre d’autant plus dangereux qu’il se
pare de l’humaniste générosité. L’histoire récente a connu ce genre de
subterfuge idéologique qui cumule sur des décennies des dizaines de millions de
cadavres. On est là dans une dérive autrement plus dramatique que les quelques
plans sociaux qui n’empêchent personne de se lancer dans la création d’une
activité. La liberté des uns, en l’occurrence les patrons, n’a jamais entravé celle de ceux dont ils louent (pour un temps
limité, par définition) la force de travail et qui peuvent à leur tour passer
la frontière imaginaire et devenir eux-mêmes entrepreneurs individuels, voire
employeurs.
L’étatisation de l’économie, sous couvert de
protection des plus faibles, n’a elle produit que paupérisation généralisée au
profit d’un petit groupe et la déresponsabilisation de tous ceux qui vivent par
cet Etat interventionniste.
Mardi 21 avril
Ambiance de monde sans repères où la tension
sociale relayée par les médias prend des formes plus radicales.
Ce soir, au Grand
Journal de Canal +, le témoignage de deux anciens
traders présentés comme repentis, chacun ayant clos ce pan d’existence par un
ouvrage. L’air épanoui, ils racontent cette époque d’immoralité poussée jusqu’à
l’illégalité pour répondre à l’objectif premier : combler son insatiable
cupidité. De magnifiques salopards cocoonés sur ce plateau de TV, alors qu’ils auraient été étripés sur place par
quelques partisans éméchés du NPA…
L’ONU vient encore de déféquer sur les valeurs
fondamentales qu’elle prétend défendre, et Kouchner de se ridiculiser un peu
plus par sa déclaration d’optimisme imbécile.
La Conférence sur l’antiracisme devient la tribune
du puant Ahmadinejad qui a, sur le plan intérieur, son siège à sauver lors des
très proches élections. La France aurait pu se dispenser d’assister à cette
sinistre mascarade, comme l’a fait une majorité d’Etats de l’UE. A vouloir se
distinguer à tout prix des pays qui nous sont le plus proche, on finit par se
rapprocher malgré nous des Etats fripouilles. Curieuse gloriole.
Samedi 25 avril
Vu un téléfilm sur l’affaire Salengro, ce ministre
de l’Intérieur du gouvernement Blum qui s’est suicidé par trop d’attaques
diffamantes. Un parti pris du réalisateur Yves Boisset de présenter les hommes
politiques du Front populaire sous leur meilleur jour, alors que Maurras, Léon
Daudet, Béraud et autres extrémistes apparaissent dans leur grotesque, leur
vilenie leur médiocrité crasse.
Ce qui m’aurait irrité dans cette subjectivité
idéologique me laisse aujourd’hui de marbre, voire me réjouit. Plus rien à
foutre de camper artificiellement dans un camp qui ne répond plus à mes
aspirations de fond.
Dimanche 26 avril
Fini de visionner, ce soir, Milice, film noir qui retrace
l’abjecte dérive des hommes de Darnant. Ce temps de tourments n’aurait sans
doute pas réveillé en moi la fibre d’une résistance active, je n’ai pas le
caractère suffisamment combattant pour cela, mais, à l’inverse, je me crois
allergique à ces collabos malsains qui font leur carrière sur la chute d’une
nation dépecée par les nazis. Une passivité morose, voilà probablement ce qui
m’aurait animé, avec peut-être une liberté d’écrire dans le secret. Notre
époque est, pour l’instant, infiniment plus sécurisante…
Une pensée, avant de retourner dans les pages de
Minc, au Gran Torino d’Eastwood. Cette fin de vie du personnage abrupte qui choisit de
sacrifier sa vie pour permettre aux deux victimes du gang assassin de vivre en
paix, bouleverse, hante par la dimension humaine. Le réalisateur-comédien,
lui-même en fin d’existence, a rendu, avec une extrême intelligence des
caractères, l’évolution – ou la révélation – de la nature humaniste d’une
vieille brute au discours raciste. Un chef d’œuvre, simplement.
Mercredi 29 avril, 22h47
Hypocrisie minorant la réalité chez certains
invités de Calvi dans un C dans l’air consacré au Gang des barbares et à son abjecte figure de proue, le
sordide Fofana, à l’occasion de leur procès. Aux questions, plus ou moins
rhétoriques, de téléspectateurs qui se demandent si Fofana n’est pas devenu une
icône dans certaines cités et/ou pour certains profils sociologiques de
population, les experts sociologues, notamment, ne l’affirment pas nettement,
renvoyant cela à une ultra minorité. Pas si sûr… et si cela n’est pas un
phénomène de masse à l’échelle locale, cela implique les plus actifs, les plus
agissants dans les quartiers concernés.
Les groupes de formation au métier de brancardier
financés par le Conseil régional ont accueilli une majorité de stagiaires
complaisants, pour les moins engagés, à admiratifs pour les pires, de
l’assassin tortionnaire.
On feint de ne pas voir cette fracture
civilisationnelle au sein même de notre société artificiellement tenue et
médiatiquement dissimulée. Un vrai potentiel de guerre civile en cas de
dégradation accentuée de la conjoncture.
1er mai
La petite entreprise qui loue mon travail ne semble
pas, jusqu’à présent, subir la crise, mais c’est au prix d’un opportunisme
capitalistique pas toujours très défendable, sauf qu’il permet à la petite
troupe de salariés de vivre modestement et aux deux dirigeants de plus ou moins
pérenniser leur affaire.
Principal écart avec ce qui doit conditionner la
formation professionnelle : l’absence de sélection pour deux groupes de
préparation au métier de brancardier. La cinquantaine de places financées par
le Conseil régional devait coûte que coûte trouver occupant, quitte à laisser
de côté les critères de la motivation
réelle des aspirants à une formation rémunérée ! La procédure de
conventionnement individuel, au fur et à mesure de la manifestation de
candidats à cette préparation, a favorisé la retenue du pire, des profiteurs,
des planqués et des délinquants en germe ou accomplis venant passer un peu de
bon temps et surtout toucher le pécule distribué par l’ASP.
Exécrables conditions pour constituer un groupe de
travail : une bonne part de profils que nous n’aurions jamais dû accepter,
mais que la perspective financière a fait retenir. Une partie des financements
de la formation professionnelle sert donc à entretenir et à occuper temporairement des petites
frappes incommodantes, des caïds de seconde zone et des échoués inconscients de
leur propre responsabilité. Finalement, chacun joue son rôle en désirant la fin
la plus proche : la structure et ses actants d’une part, une partie des
stagiaires d’autre part. La société camoufle ainsi, avec ces formations
financées successives, la réalité de l’écart entre ce public et le monde du
travail.
Contenir les révoltes qui grondent, c’est un peu
l’obsession des gouvernants dans nombre de pays. Que peut proposer de viable
avec certitude un pouvoir en place qui doit gérer cette débâcle
systémique ? Chacun, à la lueur de son malheur conjoncturel, peut
s’improviser révolutionnaire d’un jour, d’une semaine, d’un mois même, mais
pour quel autre mode de fonctionnement ? Quelle gouvernance mondiale,
constituée d’une majorité de pays non démocratiques, pourrait imposer des
règles communes allant à l’encontre des aspirations cupides de ceux qui
réussissent à dominer les autres ?
Rester un obscur témoin sans illusion.
Jeudi 7 mai, 0h30
De retour d’une toile, Incognito avec le doué Bénabar.
Une petite claque bien sentie pour l’anonyme
diariste que je suis : avoir repoussé toute ambition combative pour se
complaire dans la distraction littéraire… Advienne le minimum. Le peu d’enclin
pour l’humanité, dans son approche groupale, n’incite à aucun dépassement de
soi, juste bricoler quelques traces.
Samedi 9 mai, 22h54
Désintérêt croissant pour ce qui occupe et captive
la plupart. Pas une stratégie de la condescendance, mais un retrait instinctif.
L’ambiance délétère qui règnerait dans ce pays
préservé pourtant du chaos sanguinaire, revient comme l’antienne vendeuse des
médias. Le chômage de masse reprend sa place de premier fléau national que les
coups de sang de quelques victimes sans perspectives dramatisent auprès de
ceux qui s’y identifient.
Journée de l’Europe et une campagne fadasse qui
n’offre aucun débat audible sur le fond de la politique à mener dans l’UE.
Dimanche 10 mai, 7h06
Dix ans que Lyon m’accueille intra-muros. Ni ma
ville natale, Tours qui se limite pour moi à son qualificatif puisque je n’y ai
jamais résidé ; ni ma ville d’études qui échoit à la capitale Big Lutèce
laquelle devint même, aux moments sombres, mon Purgatoire, mais ma ville de cœur, affinitaire, qui m’a définitivement convaincu
que le confort d’une vie citadine pouvait concilier l’espace à vivre avec la proximité
des zones aérées.
Une décennie de transformations qui conforte mon
ancrage et mon choix de ne décidément pas conduire : la belle idée des
Vélo’v (premier réseau de libre-service) auquel j’ai rendu hommage ;
l’ouverture de piste cyclables protégées ; la restitution des berges du
Rhône aux piétons et aux deux roues sans moteur. Quelques marques pour que
l’empreinte s’affirme. Lyon la discrète, comme une ressemblance…
23h30. La polémique autour de l’affirmée rencontre du vieux Léautaud par le
jeune ambitieux Perret nourrit quelques blogs.
Je découvre ce soir un long écrit anti-Perret qui
ne décèle, dans ce trucage initial, que la confirmation d’une nature obsédée
par sa propre réussite et le fric que l’on peut en tirer. Attaque vacharde,
même si la bibliographie de Perret peut laisser songeur pour son volet littéraire, ou plus exactement
livresque. J’ai laissé un commentaire dans la droite ligne de mon Foutez-lui la paix !
Je profite de ce mini buzz internet sur Léautaud
pour livrer dans un blog (le vingt quatrième ouvert sur blogspot.com, je crois)
les extraits de son Journal littéraire qui auraient pu servir à nourrir mon projet de thèse sur l’œuvre de ce
percutant diariste.
Une fois les quelque 170 pages de citations (sur 19
volumes !) mises en ligne, j’entamerai l’illustration progressive de cette
sélection avec, si possible, des photos de l’époque, des gens et des événements
évoqués, prises dans de vieux bouquins conservés (L’Illustration, Le Larousse, Le Crapouillot…). Une tâche plaisante, mais titanesque.
Facebook fait ressurgir des
personnalités croisées et que jamais je n’aurais cru retrouver. Une certaine
Laetitia M, eu comme élève à Forpro puis à Cqfd, vient de se manifester à moi sollicitant une amitié, selon l’outil requis, et
laissant une appréciation positive sous mon article Capuches
à découvert. A suivre…
Appris que le conseiller spécial du président
Sarkozy, le posé Guaino, avait voté Non au projet de Constitution européenne. À
force de vouloir réconcilier les deux camps, on cultive l’indifférencié.
Dimanche 17 mai
A rebours de la tendance anti-Hadopi sur Internet,
mon dernier texte repris par AgoraVox recueille plus de 80 % d’opinions
négatives. La garantie de pouvoir affûter mes arguments dans de vifs débats.
Pour nombre d’intervenants anonymes, premier signe
de médiocrité de ne pas se révéler lorsqu’on attaque ad hominem, la présidence
Sarkozy prépare la fin de la liberté d’expression. Délire qui s’effondre de
lui-même : jamais la vivacité des charges n’a été telle contre un
président en place depuis deux ans, et c’est seulement maintenant qu’il
verrouillerait tout ? Et même s’il le souhaitait, comment le pourrait-il
techniquement et institutionnellement ? Farce paranoïaque des autoproclamés
victimes du sarkozysme.
Tirs de kalachnikov à la Courneuve, dans la Cité
des Quatre Mille, contre les forces de l’ordre : fait divers révélateur de
l’ultra violence qui déborde et risque d’agréger des mouvements parallèles
remontés contre tous les pouvoirs.
Lundi 18 mai
Temps de crise ? Visiblement pas pour la
petite entreprise qui m’emploie. Décision de me payer le trop d’heures
effectuées depuis la rentrée 2008, plutôt que de les récupérer par des semaines
allégées. Un treizième mois de fait juste pour mes vacances de juillet. Santé
aux apprentis brancardiers et ASH accueillis !
Plus qu’un embrasement général, le pays semble voué
à subir une hémorragie de points de fixation d’un radicalisme éperdu. Les
secteurs fragilisés déversent de nouveaux inactifs si prompts à descendre leur
ex exploiteur qui les a libérés de leur labeur.
Le décompte médiatique de ces abcès incite à la
surenchère concurrente. L’inertie du système sauvegardera-t-il l’essentiel de
notre mode de vie, au grand dam des aspirants révolutionnaires ? La voie
mondialiste peut-elle se concilier avec l’irrésistible conservatisme de ceux
des pays riches qui sentent leurs modestes acquis leur échapper pour rémunérer
de plus pauvres qu’eux ?
Les mutations, intolérables pour les sacrifiés
désignés, s’accélèrent d’autant plus que le marché des échanges se libéralise,
c’est-à-dire favorise les libertés, quitte à bouleverser l’ordre Nord-Sud
établi…
L’impossible conciliation des intérêts aspirés par
la gloutonne globalisation entretiendra ces soubresauts sans cohérence.
Bords du Rhône : à l’apparence insouciante,
deux jeunes femmes visiblement en complicité amoureuse, goûtent des rayons et
s’essayent à quelques tendres caresses, tutoyant la coquinerie sans jamais y
céder. Instantané pour oublier cette
crise qui décidément ne m’atteint pas, pour l’instant.
Mardi 19 mai, 23h14
L’ogresse Crise n’a pas encore dévoré ses ouailles
que l’hystérie dépressive guette. Sur Internet, là où la liberté d’expression
et de diffusion jouit d’une garantie totale, nombre d’internautes s’agitent
pour dénoncer sa mise en péril par la présidence et le gouvernement Sarkozy. Le
terrain critique s’obsède par cette menace d’un Etat policier alors que plus de
deux ans après sa victoire le déchaînement anti-Sarkozy ne s’est jamais autant
fait entendre…
Nourrissons nos critiques non avec des lubies
chimériques, mais avec de vraies attaques contre des réformes inefficaces,
inadaptées à la situation hors norme du moment ou mal menées. Le reste relève
du complot mal placé.
Samedi 23 mai
Touffeur au parc et vide d’inspiration.
Face à l’étendue verte et à deux bancs sur ma
gauche, impression qu’Elena prend le soleil. Curieuse apparition d’une histoire
qui s’est terminée dans la défiance via quelques courriers incisifs. Mais
est-ce vraiment elle ? Aucune cigarette fumée depuis un bon quart d’heure,
elle qui consommait plus que de raison. Aurait-elle arrêté ? Cela
transfigurerait le personnage… De loin, sans sa voix criarde, elle présente une
distinction certaine, ce qui avait, à l’époque, obnubilé mon attention.
Le visage tourné, une fraction de seconde, vers
moi, il me semble bien que ce soit elle, le visage transformé pourtant, comme
empreint de la fatigue du temps écoulé. Notre dernière entrevue doit datée de
2001…
Vue debout, au moment de son départ, bien elle mais
des kilos en trop, probable conséquence d’une abstinence tabagique. Un peu
triste de la voir ainsi, mais à rien ne rimerait une cordiale reprise de
contact.
Passage sur la terrasse du Q Boat pour un Monaco de
bon aloi. Défilé de la population en sursis, chacun tout à sa parcelle de
détente. Prégnante posture de ceux qui se résolvent à ne pas jouir de la plus
bénéfique époque. Le temps s’obstine à la transition.
Songer à tous ces êtres croisés sans que l’accroche
perdure. Comme un passant, détaché et aux implications purement testimoniales,
scruter de loin sans se perdre en dangereuses affectations. S’imaginer sans
attaches, déterminé à la pure consommation humaine.
Le défilé se poursuit, le second Monaco se vide et
je n’occulte aucune faille. Se croire pour mieux s’oublier. Fondre en soi sans
espérer en extraire le filet créateur.
D’un coup, une pensée à Heïm vieillissant, coupé de
ses plus proches attaches du temps perdu. À quand la nouvelle de son décès et
l’emballement émotionnel que son cadavre ouvrira. Tant de figures laissées en
suspens par l’impossible conciliation des consciences.
Vendredi 29 mai
Révélateur. B. Roussel ne m’a toujours pas fait
rembourser le déplacement effectué en TGV pour honorer l’entretien pour son
documentaire. Si prévenant par la parole, au point de me proposer une boisson à
mon arrivée à l’Hôtel que jamais il ne fera apporter – insignifiance qui aurait
dû m’alerter – voilà qu’il ne daigne pas se bouger pour cette somme que j’ai
avancée au budget de la Société européenne de production.
Révélateur de ce parisianisme à fuir : une
générosité affichée pour obtenir une prestation réelle de l’autre que l’on
néglige par la suite jusqu’à renier ses promesses.
Quitte à passer pour un mesquin, je ne lâcherai pas
le morceau.
Elections européennes dans une grosse semaine et les
débats ne permettent aucune passion. Depuis le rejet du projet de constitution,
ma mobilisation s’étiole au point d’envisager l’abstention. Une Europe sans
projet global, engluée dans des handicaps institutionnels, qu’en espérer ?
Vendredi 5 juin
Dans l’attente d’avoir accès à la salle de Cinécité
qui diffuse l’unique séance de Home d’Arthus-Bertrand, produit par
l’hyper consommateur d’énergie Luc Besson.
Le chaos planétaire qui va nous être exposé, avec
une perspective constructive, a trouvé son écho politique sur le plateau
d’Arlette Chabot. La directrice de l’information de France 2 s’attendait sans
doute à du musclé, mais point à la débâcle bruyante des échanges. Maître révélé
dans l’indigente petite crasse, Bayrou en quête d’une troisième place qui lui
échappe au profit de son nouvel ennemi : Cohn-Bendit. Première insinuation
de copinage avec Sarkozy, le député européen s’emporte pour lui prédire un
« minable » destin à l’aune de sa pantagruélique ambition.
Lundi 8 juin, 22h58
Edifiants résultats des élections européennes. Les
60% d’abstentionnistes d’abord : du je m’en foutisme, du désintérêt ou de
la défiance. Pourtant l’Union européenne a offert, jusqu’à aujourd’hui, une
paix et une stabilité sans pareille à des générations entières. Le gros des sans-vote
n’a certainement aucune affinité avec les thèses anarchistes d’un Coupat.
Pour le reste, la déculottée prise par un Bayrou en
berne, ayant perdu toute affection (cf. son programme des Présidentielles 2007)
et qui n’a plus comme voie obligée, mais peut-être suicidaire, que
l’acharnement à se projeter dans la bataille pour la première des places
politiques, en 2012. Quitte ou double, comme le proposait un jeu
radiophonique : celui de Bayrou ne tolérera aucun échec.
La haine déchaînée sur la toile contre un
président, certes critiquable, n’a rien rapporté à ce vivace opposant.
Mercredi 10 juin, 23h30
On pourrait croire que les médias traditionnels,
l’hydre à trois têtes, est à la solde de Sarkozy tant les critiques et les
analyses au vitriol se multiplient après la réunion des têtes dirigeantes et
influentes du PS, pour répondre à la déroute électorale. Pourtant, c’est bien
le fond sidérant de ce comité national qui nourrit seul les charges sévères.
Pour résumer : une nouvelle promesse d'intention de "refondation"
dans... six mois ! Quelle réactivité ! Quel sens politique ! C'en est presque
touchant de les constater si désemparés ces engagés politiques à l'ancienne
mode.
Pas pour demain un leader qui transcendera les
différends de tous les éléphants et de la nouvelle génération, pas plus axée
sur les propositions.
Ce qui monopolise leur discours, ce sont les
possibilités de résoudre leurs dysfonctionnements. Rien sur une autre gestion
de la crise...
Vendredi 12 juin
Ne pas se laisser distraire pour accrocher les
signes du temps, comme les révélateurs d’une débâcle aux accents
contradictoires.
Les énervés de la crise, qui se crispent dès qu’un
revenu d’employeur explose le sens commun, ne remuent pas le poil d’une oreille
à la révélation de la prochaine rémunération d’un footballeur au sommet. Le
tapeur de baballe se positionne sans mal au plus haut de la très longue échelle
des salaires : face au taux horaire du Smic, durement gagné par une part
de ses adorateurs, il inaugure le Smic/horaire… le gain d’un Smic par heure.
Rien de choquant en soi selon le principe économique qu’une rareté se paye bien
plus qu’un produit courant.
Ce qui navre, c’est l’apathie des errants du Pôle
face à la goinfrerie du joueur et leur hargne vindicative dès qu’il s’agit d’un
dirigeant moins sexy dans ses entournures, juste chargé de faire réussir
une entité économique qui assure l’existence d’une foule d’âmes.
Les tragiques et les comiques se retrouvent pour
catapulter nos plates trajectoires vers d’hérissés horizons. Comme une guerre
sourde, fantasmée, qui n’attend que le prétexte pour révéler ses actants
déchaînés.
Rappelle-toi tes parents dans la casbah, tes
grands-parents, comme les arrières, à l’arme lourde ou à la baïonnette
incisive… tu veux quoi de plus ? Une fragile époque de paix qui ne survit
que par un minimum social de prospérité.
Samedi 13 juin
Miribel au peuple bon enfant : ça fourmille et
s’illusionne sur la joie de vivre comme au temps des années folles. A prendre
comme une parenthèse d’insouciance.
Quelque deux mille personnes perdent leur emploi en
France chaque jour : paupérisation progressive du pays qui ne pourra
compenser indéfiniment les manques financiers d’un peuple dont les acquis
sociaux ne tiennent que par les perfusions étatiques d’emprunts sur la scène
financière du monde. Avec un déficit d’environ cent milliards d’euros, l’Etat
dépense un euro sur trois qu’elle n’a pas.
Jeudi 18 juin, 22h39
L’année prochaine, les soixante-dix ans de l’Appel
du plus illustre des Français du XXe siècle, l’un des dix personnages clefs de
l’histoire hexagonale. Etre le premier à y penser, un an avant, voilà qui
permet de sortir un peu plus du temps présent.
Vendredi 26 juin, 0h51
Michael
Jackson décédé : arrêt cardiaque à cinquante ans ! Tragique destin si
fantastiquement commencé : les répétitions pour son retour sur scène, le
13 juillet prochain à Londres, auront eu raison du fragile roi de la pop. C’est
par France Info, à minuit passé, que la nouvelle m’est parvenue. Google
actualité recensait, à 0h30, près de cent quarante articles en français sur le
sujet. La valse des titres, les minutes s’écoulant, pointait l’alarmiste hospitalisation,
puis l’annonce du décès avec conditionnel d’usage pour, enfin, se risquer au
mode de la certitude.
Internet
accélère d’une fantastique façon le trajet et l’affinement de l’information,
tant que la manipulation ne s’invite pas sur la toile, ce qu’on ne peut éviter
totalement.
Florence & Michael,
outre mode !
Ampleur prévisible de
l'écho planétaire pour feu Jackson.
Revenir à l'essentiel :
trois bon vieux CD du "popiste" sacré, à défaut de vinyles, pour
réécouter, en choix aléatoires, son chanté millimétré. Vitalité
régénérante des mélodies atomiques, comme une invitation à l'accélération en
tempos indémodables. Voix faite musique, airs ciselés rythmique :
symbiose...
Si Jackson rejoint le
firmament, Rey retrouve elle la liberté. Me revient ce que j'écrivais en 1994,
lors de son arrestation :
"Brève épopée
meurtrière d'un couple révulsé des fibres, l'âme injectée de haine. Les french Bonnie
and Clyde transcendent leur minable casse en fulgurante perdition. Course
poursuite dans Paris, feu sur les poulets, trois blessés à la balle pour
sangliers, un chauffeur de taxi tué, et les politiques qui s'émeuvent. Le rodéo
a ses victimes dans les rangs de la force publique comme dans le duo des
anarcho-tueurs. L'homme a flanché à l'hôpital.
Reste le petit bout de
jeune fille, émouvante par ses traits, confusément attachante, orpheline, sa
vie foutue... Je n'aurais pas eu, moi aussi, ma vie majoritaire devant moi,
j'aurais volontiers proposé ma vieille carcasse pour la remplacer dans la
geôle. Elle aurait dû crever avec son compagnon, en apothéose destructrice. La
grosse machine judiciaire, puis pénitentiaire aura raison de sa pureté.
Florence, elle se prénomme.
Chère Florence, tu es
une criminelle, certes, tu as éliminé d'innocentes personnes et désespéré des
familles, mais je décèle une humanité éperdue dans tes yeux. Pauvre de toi,
décalée dans cet univers."
Rapprochement incongru
de l'ex tueuse née d'un jour et de la star refroidie pour toujours ?
Sans aucun doute une pulsion littéraire irrationnelle. M'en contrefiche. Au
diable les codes limitatifs ! Rey-Jackson sonne comme un tragique appel
harmonique, celui d'un XXe à l'agonie qui n'en finit pas de hoqueter
ses icônes et ses actants.
Dimanche 28 juin
Vers 12h30. Eu Jim au téléphone : il vient de
m’apprendre l’heureuse nouvelle. Aurélia enceinte depuis plus de deux mois et
demain première échographie. En décembre ou janvier 2010, je serai
tonton !
Ma BB déjà en vacances, pour moi une semaine
d’administratif dominant et puis le grand tournis des rendez-vous sur les
terres de France : séjour expresse à Paris pour revoir notamment Shue et
Karl ; avec ma BB suivront Le Cellier, vers Carcassonne, Fontès puis Arles
avant un retour au bercail.
Dans mon cocon vert préféré, à la lisière de la
roseraie du parc Tête d’Or, un peu envahi ce radieux dimanche, je laisse
s’irriguer le cortex surchauffé.
A droite, à l’ombre d’un touffu, un jeu duo
d’amoureux explore les émois de baisers infinis ; en face une jeune femme
allongée sur le tapis vert, toujours à l’ombre, studieuse dans un bouquin,
stylo en main, avant de tenter l’endormissement.
Mon petit frère va donc devenir père, et Aurélia
mettre au monde le premier D. qui associera, peut-être, ce patronyme à celui de
sa maman. Un bouleversement existentiel pour le frérot, visiblement aux anges,
qui lui fait relativiser ses soucis de conservatoire, et notamment
Vendredi 3 juillet
Avant de
rallier les concentrations estivales, un court séjour à Big Lutèce, mais sans
pouvoir y revoir Karl qui s’est curieusement décommandé hier soir sur ma
messagerie. La raison sonne comme un improbable prétexte : ce serait
l’anniversaire de sa copine finalement présente à Laon tout le week-end et
qu’il ne peut laisser en plan.
J’en
subodorerais presque une proche influence dissuasive… Décidément, de Lyon à
Laon, si une seule lettre les sépare, chacune se trouve aux antipodes de
l’alphabet partagé. Notre quarantième année ne fêtera pas nos retrouvailles. Il
faudra sans doute attendre que quelques âmes malfaisantes passent l’arme à
gauche pour que les relations se rétablissent puis se normalisent dans le
regret du temps perdu.
Suite au River Boat au frais d’un Monaco de
bon aloi. Sordide famille Jackson : chacun va tenter de grappiller un
maximum du milliard de dollars de patrimoine que laisse Michael, dettes non
déduites. Le père tyran est exclu de l’héritage : il pourra ruminer son
mépris pour sa dernière progéniture, première décédée, selon l’adage chrétien
détourné.
Samedi 4 juillet
Départ 7h30 de la gare Part Dieu, un TGV
partiellement rempli : les vacanciers ne fréquentent pas les aurores. De
l’espace pour rejoindre Big Lutèce, sans marmots brailleurs, sans surcharge de
bagages, juste dans l’élancement à grande vitesse.
Parmi les voyageurs, un trio (deux filles, un
gars) : la décontraction vestimentaire de l’une – seule personne du groupe
que je vois en totalité – alliée à une joliesse du visage et une sensualité
maîtrisée, renvoie à d’autres personnalités croisées ou côtoyées. Celles dont
la fréquentation ennoblit l’instant, rendant l’alentour presqu’irréel par son
insignifiante emprise sur notre champ de conscience tout entier imprégné par
cette féérique présence.
Dimanche 5 juillet
Lumineuse Shue et généreux John, point d’orgue du
séjour. Existence professionnelle chargée en voyages qui leur laisse peu de
place pour leur paisible retranchement en Andorre.
Avec ses trente-huit ans, Shue est plus belle que
jamais : la chevelure raccourcie, mais toujours aussi épaisse, d’une
blondeur éclairante, elle passe le temps comme une élégance qui rend un peu
captif de son incroyable charisme.
Un retour en première classe surchauffée, ma nature
grognonne en sus. Insatisfait.
Mercredi 8 juillet
Au Cellier, sans lunettes, lentilles enlevées, la
pointe du petit stylo à bille semble plus adéquat pour écrire l’œil au ras du
quadrillé.
Ambiance jazz pour se prendre au piège de la dérive
métaphysique. Coldplay prend le relai pour sublimer l’instant : Chris
Martin sans équivalent pour le timbre porteur d’une tension chancelante dédiée
à l’émotion musicale.
L’univers n’a ni commencement, ni fin, ni limite
spatiale. Il est le Tout inconcevable et sans fioriture divine. L’esprit commun
se cantonne aux diverses versions théologiques qui rassurent : d’un tel
simplisme cousu de corde mal dégrossie au regard de l’angoissante réalité
intolérable pour notre entendement… Et pourtant : se résoudre à l’impossible
limite dans quelque dimension que ce soit… Impossible début : qu’y
aurait-il eu avant puisque le néant est déjà en soi quelque chose ;
absurde fin puisqu’une suite s’impose quelle que soit sa forme.
Vendredi 10 juillet
Hier, découverte de l’efficace organisation du Puy
du Fou et de ses animations variées.
Le point d’orgue fut justement Les orgues d’été,
nouveauté délivrée à nuitée. Sur un grand plan d’eau, une violoniste lumineuse
glisse sur le liquide, aussi délicatement que son archet sur l’instrument, le
tout mis en lumière. Cet appel fait sortir un pianiste du fond des eaux,
éclairé et inspiré pour les mélodies entraînantes…
Un gigantesque orgue apparaît au fond de la scène
naturelle, signal du déferlement des fontaines en furie, des lumières qui
soulignent l’esthétisme de l’eau projetée vers les cieux et des flammes, gerbes
impressionnantes lancées par de mécaniques cracheurs de feu… Splendeur :
tous les sens sollicités en sortent rassasiés.
Suite du vagabondage vendéen cet après-midi, avant
la Cinéscénie nocturne.
Samedi 11 juillet
Deuxième
nuit à Saint-Denis la Chevasse.
Fresque
grandiose écrite et mise en scène par Philippe de Villiers. Parmi les voix
narratives, j’ai cru reconnaître celle d’un autre Philippe, comédien consacré
et dans son dernier virage, le grand Noiret. On sent le goût des mots chez le
politique, mais l’écriture frise parfois l’ampoulé et la personnification cabrélienne dans le style « l’âme
accrochée au rocher inspire les souvenirs déçus »… La concentration de ces
figures littéraires peut agacer, mais hier soir l’efficacité du spectacle a
emporté l’adhésion sans retenue.
On saisit
mieux les aspirations à conduire la nation du président du Conseil général de
Vendée : sur son territoire la réussite est totale et la très grande
majorité des autochtones doivent lui savoir gré d’avoir fait rayonner ainsi
leur département.
Jamais vu
autant célébrés qu’ici le cœur surmonté d’une croix, les chefs chouans et toute
la rébellion anti-Terreur… Cela a fait ressurgir en moi l’époque châtelaine où
certains de nos jeux s’incarnaient dans la lutte des Chouans contre les
barbares bleus, ces salauds de Républicains. Si lointains que sont ces
instants, je garde mon affection culturelle pour ces personnages en lutte
contre les dérives génocidaires des premières années de notre régime politique.
Moi,
Cadoudal, aux côtés de Cottereau et La Rochejaquelein, je vomissais ce système
démocratique qui s’affirmait en tentant d’éradiquer ses opposants… pratique
bien ordinaire à l’échelle sanguinaire de l’humanité.
Jeux
d’une enfance rêvée, malgré les petites facettes sordides qui se révèleront au
fil du temps. Le rapport entre frères et cœurs de cœur était lui sincère,
absolu, sans tache…
Le groupe
des adultes qui avait permis qu’existe ce cadre idyllique, reconnaissons-le,
occultait de bien médiocres coulisses : le chevalier lui aussi a ses
perversions, la princesse ne peut s’affranchir des défécations… Eh bien
l’univers du hobereau, en rupture avec le modèle républicain, s’est enlaidi
d’indignes pressions prétendument affectives, de reniements au nom d’impératifs
financiers, du confort sexuel d’un seul par l’abus de chairs fraîches à
disposition. Heïm maudit, non point par ses idées, mais par son infect bon vouloir de patriarche libidineux.
Lundi 13 juillet
Comme le
plus souvent lors de nos passages estivaux dans cette région, le temps se fait
capricieux, en demi-teinte. D’autres caprices, plus sonores, truffent le
séjour : ceux de Ilya qui grandit et affirme son caractère.
Fin
d’après-midi. J’arrête la saisie de l’année 2008 (plus qu’un an, au mois près,
me sépare du temps présent), car après plusieurs heures de fonctionnement, l’antique
portable semble cramer de l’intérieur.
De longs,
très longs passages consacrés à la brouille avec Alice, au passé partagé avec
Heïm… Comme une obsession littéraire à entretenir.
La plus
belle des sanctions contre le vieillard pédophile serait qu’aucune de ses
descendances de sang ne reprenne son patronyme (à l’origine simple pseudonyme)
se limitant au nom de famille originel qu’il repoussait : trop commun à
son goût et ne traduisant pas la singulière épopée d’une légende à construire.
L’histoire le retiendrait comme le seul Heïm, une incongruité à isoler dans
l’arbre généalogique et n’ouvrant sur aucune descendance patronymique.
Mardi 14 juillet
Hier soir, à la recherche d’un titre pour l’année
2008, saisie de moitié, qui mêle le perso, notamment les retrouvailles-rupture
avec Alice, et la forte actualité du second semestre avec cette crise
naissante. Ruminer les sens, faire tournoyer les mots, les expressions, jauger
les polysémies, et voilà qu’un titre court, accrocheur et remplissant les
conditions me vient : De surprises en subprimes. Adopté !
Un petit rayon du matin pour notre dernier jour au
Cellier. En fait, escapade pour la journée à l’île de Behuard en
Maine-et-Loire. Occasion de déguster quelques crêpes ce midi et de découvrir un
autre arpent de cette merveilleuse terre de France dont je n’ai décidément pas
envie de m’éloigner, même en période propice aux voyages lointains.
Enfin achevé les ouvrages de Cusset et Minc, je
peux reprendre la lecture critique et de plus en plus distante du Journal
de Léon Bloy.
Mercredi 15 juillet
18h15. Une soirée en pays cathare, vers les
villages de Fa et d’Esperaza, avec la famille paternelle. Pays d’angles aigus
et de lacets étroits : atteindre sa destination requiert la plus constante
attention. Un regard sur les restes d’une grandiose forteresse érigée sur un
sommet rocheux, toute la rupture d’avec l’autorité royale imprègne encore ces
épaisses bâtisses seigneuriales. Ce Moyen-âge rugueux où quelques-uns se
fixaient comme ligne d’honneur la victoire ou la mort, se fait encore un peu
voir ici. Tragique horizon de vie pour notre temps et nos latitudes, normalité
pour des groupes qui se revendiquent religieux et que nous percevons comme
intégristes.
L’Absolu revendiqué par Bloy aurait tout de cette
posture non négociable. Sa misère claironnée et l’intolérance de son
incommodant prochain auraient tout de la bombe à explosion lente, mais inarrêtable.
Le désordre apparent du diarisme, puzzle littéraire
à construction variable, ne doit pas me faire renoncer à tenir le cap, quelle
que soit la virulence des critiques. Avoir la certitude de la nécessité de son
geste, même s’il ne plaît qu’à peu, surtout s’il ne séduit qu’une minorité,
c’est placer au-dessus des contingences l’utilité, et peut-être l’esthétisme,
de son témoignage segmenté. Ecrire pour s’accrocher un peu, laisser une
parcelle de soi qui créera une réaction, donc une émotion, chez le lecteur du
hasard. Ne pas espérer plus, mais l’essentiel est dans l’acte lui-même, dans
l’instant vécu en écriture pour sur-ressentir, pour se projeter, pour marquer
un arrêt et approfondir.
Ecrire rompt donc avec la linéarité de ce qui se
vit, tissant une toile sémantique aux souples dimensions. Alors
critiquez ! critiquez ! il me restera toujours des petits carreaux à
remplir de signes biscornus.
Vendredi 17 juillet
Depuis la plage ventée entre Agde et Sète.
Petit mot sur mon père, qui semble ne pas avoir
baissé sa consommation de tabac. Au restaurant panoramique de Carcassonne,
alors qu’il s’en est allé s’en griller une avec ma BB, Anna confie son
agacement désabusé face à ce comportement qu’elle considère comme
irresponsable. Elle a renoncé à lui insuffler la volonté d’arrêter, se
demandant même s’il ne s’agit pas d’un lent suicide assumé.
La différence d’âge risque d’être plus prégnante
dans les décennies qui se profilent, si un mal définitif n’a pas interrompu
avant la dualité. Mon père aurait la conviction, non claironnée, que les
maladies liées au tabac sont pour les autres. L’alerte coronarienne qu’il a eue
n’a donc en rien servi une détermination à changer. Advienne que pourra
puisqu’aucun d’entre nous ne peut avoir de prise sur ses résolutions de vie.
À Fontès, le plus bel hommage que l’on pouvait
rendre à nos défunts grands-parents se dessine. Non seulement maman et l’oncle Paul
ont décidé de s’y implanter pour le dernier tiers de leur existence, mais
d’autres membres de la famille ont suivi cette voie : Mona, ma tante
divorcée d’avec Paul et son fils Serge qui a acheté un logis pour le mettre à
disposition de sa mère.
Les étés resteront donc, au contraire de ce que
j’appréhendais dans le texte en hommage à grand-mère disparue, une source de
rassemblement familial à Fontès. Une démonstration affective que nous aurons
l’occasion de tester dans les prochains jours.
Jim et Aurélia nous quittent malheureusement demain
pour rejoindre une location dans les Pyrénées. Le dos du premier ne s’arrange
pas, le faisant souffrir de plus en plus et ne permettant plus de déplacement
autrement que tordu sur le côté ; la jeune grossesse de la seconde est
magnifiquement portée et vécue. De quoi régénérer leur symbiose.
Samedi 18 juillet
Arrivée d’un nouveau couple, Candy et Marius, après
un exténuant trajet à moto.
Mon oncle renoue avec l’époque glorieuse des B., en
achetant plusieurs bâtisses dans le prolongement de la maison, au point d’être
propriétaire de l’ensemble du bâti d’un côté de la rue… à l’exception de la
dernière maison. Encore des travaux d’Hercule, mais c’est un habitué du fait.
Petit tour du village avec ma BB en fin d’après-midi,
et détour par le cimetière : petit arrêt affectif devant la tombe de
Jeanne et Gustave, mes enterrés grands-parents, de Denise et Jacques, grands
oncle et tante disparus et à la recherche vaine de la tombe des Salasc, la
femme ayant rendu l’âme il y a une quinzaine de jours. Une époque s’achève
totalement, avec les derniers proches témoins de cette génération qui
incarnaient l’univers villageois de mes grands-parents. Depuis ce récent
trépas, la partie de la maison que les Salasc détenaient, à l’origine
possession B. sur l’ensemble de l’immeuble, est mise en vente. Prix excessif
pour que Paul ou son fils s’en portent acquéreurs. Cela aurait été un sublime
retour aux sources…
Me reste d’affectives pensées pour les descendants
des Salasc, et notamment leur fille M.-R. : « Les Salasc sont
rentrés » s’alertait la chanson de Jim : ils ont effectivement cessé
pour toujours leur cordiale présence sur le seuil de la porte, en fin
d’après-midi estivale, au moment d’une relative douceur retrouvée. Amabilités
échangées avec ces gens simples et si vrais dans leur gentillesse. Le détail de
ces instants, permis par un harmonieux voisinage auquel on ne prête pas trop
d’attention, se révèle un puissant marqueur affectif pour rendre compte de ce
qu’on a perdu par la force imparable du temps qui passe.
Lundi 20 juillet
Marseillan
plage. Goût du farniente sans négliger la monomanie du diariste : rendre
compte au prisme de l’humeur de l’instant.
Les
scories de l’intellect, rêves, songes et autres cauchemars me renvoient
sporadiquement vers l’époque des châteaux d’O et d’Au avec sa galerie de
figures attachantes quoique mises à distance. La dominante des errances
nocturnes mélange une affection persistante, mais faiblarde, très vite
submergée par la détermination à ne pas retomber dans les travers névrotiques
qui rongent l’existence. L’opportunité du retrait ou de faire sentir ma voie
divergente est saisie, malgré la confusion onirique.
La
réalité m’offre de bien plus performantes possibilités, notamment grâce à
l’écriture. Les extraits de ce Journal
à taire rassemblés dans Heïm le maudit, recueil numérique à
accès protégé, forment un réquisitoire, éparse certes, mais à puissance
grandissante les années passants, contre un personnage qui prétendait détenir
la panacée pour la vie en groupe affinitaire, en fait réunion de petits et
grands pour satisfaire un intérêt personnel, son central appétit sexuel. Sans pédication, point de salut !
A
l’instant me revient l’époque où Hermione, adolescente, affichait un
mécontentement quasi permanent, sans oser le prolonger devant son père. Ne
s’agirait-il pas de la conséquence d’une tentative avortée d’intimité du
libidineux géniteur ? N’ayant pu pleinement satisfaire son redoutable
plaisir, Heïm résumera le portrait de ses deux filles, lors d’excès vitriolés
dont il abusait, à Hermione le laideron et Alice la frigide. Que de la délicate
affection paternelle…
Mercredi 22 juillet
Avant 12h. Vu Potter volet V hier soir avec Nathalie,
sa troupe et Serge. Le trio sort de l’adolescence et se risque à quelques élans
sentimentaux, plus dans l’évocation que dans l’action… il faudra attendre pour
découvrir une courbure d’Hermione Granger. Leur profil, leurs rapports me font
immanquablement penser à ce qu’Hermione, Karl et moi formions au château d’O. On
pourrait même pousser le parallèle jusqu’à la figure patriarcale de Dumbeldorf
et de son ennemi Prince des Ténèbres : la mixture des deux rendrait bien
compte de la double face d’Heïm, de l’apparent patriarche au réel malfaisant.
Jeudi 23 juillet
Journée de bombance et de retrouvailles avec
cousins, cousines, oncles et tantes. Réussite.
Je poursuis la lecture du Journal de Bloy,
mais de plus en plus exaspéré par son arriération religieuse. Ainsi, en mai
1902, il explique les trente mille morts dus à l’éruption foudroyante comme un
facteur « indispensable » pour « contrebalancer (…) l’acte
prodigieux » de leur enfant… une communion. Quel atroce et débile
raisonnement, celui d’un homme aveuglé par son fanatisme.
Vendredi 24 juillet
Dernier jour de plage, avec vagues et bons moments
ludiques. L’après-midi sous le gros et grand épineux à délirer, avé l’accent,
avec Marius pour l’occasion. Des répliques à la Pagnol improvisées pour
entretenir l’ambiance et affûter l’esprit de réparti.
Ma déconnexion d’avec notre monde en crise est
totale. Les seules poussées sombres que je m’accorde restent celles de Bloy,
mais le calibre est implacable, dévastateur, malgré mon approche distanciée.
Samedi 25 juillet
Dernier jour plein à Fontès. Fête de la brocante
avec tsoin tsoin qui résonne de bon matin. De quoi laisser remonter
l’accent du sud pour illustrer les scénettes villageoises.
Ce soir, nous nous joignons au repas musical servi
devant la coopérative. Bleu d’azur, petit vent rafraîchissant : idéal pour
une sortie au marché de Pézenas.
Fond sonore d’une fanfare qui colore l’ambiance
comme il convient pour que chacun se laisse porter par sa décontraction. Pas
toujours le meilleur qui sort de ces agitations collectives, mais cela fournit
le nécessaire pour peupler la vie monotone des sédentaires contraints, ceux qui
se sentent frustrés de ne pouvoir aller renifler de la lointaine contrée. Moi,
ma sédentarité, je la revendique comme un confort pour le voyage intérieur le
plus dépaysant.
Avé l’accent pagnolesque : le plus dur des sports après un repas
chargé, c’est la digestion. Alors pour supporter l’épreuve, rien de mieux qu’un
bon transat et une chaise pliante pour y laisser s’ébattre les gambettes. Sous
le pin majestueux, le vent en rasade, les cigales en chœur, la vie prend une
saveur provençale.
18h. Bref passage à la coopérative de Fontès.
Lundi 27 juillet
Soirée
d’anthologie, samedi dernier, à la coopérative. Treize de la famille pour une
ambiance d’enivrement joyeux et dansant. Une fin de séjour fontésol en
apothéose.
Entente totale avec le cousin Serge, la cousine Nathalie
et Marius le compagnon de Candy. Fontès est donc redevenu le centre familial
pour les étés à venir. Nouvelle inespérée !
Hier soir, du beaucoup plus sérieux, mais non moins
dense, à Arles : un échange vérité avec Richard, chaleureux, mais qui
n’élude pas les ressentis réciproques et l’évocation de tranches douloureuses
et difficiles du passé.
Même si, sur nombre de sujets, je nous sais en
désaccord, il dit me lire régulièrement et se retrouver dans une part notable
d’argumentations. Pas de passion amicale, mais une façon de mieux se connaître
et de garder contact. Son insatisfaction permanente m’évoque souvent celle de
mon père, ce qui rend la quotidienneté un peu éprouvante.
Demain matin, retour dans notre nid qu’il nous
tarde de retrouver.
Jardin principal d’Arles. A l’ombre d’un sapin au
moins tricentenaire, se laisser inspirer par le tout-venant, la douceur d’un
geste, un parfum au hasard, une intensité contenue.
Vendredi 31 juillet
Cocon vert à la Tête d’Or.
Alors que des masses de personnes s’apprêtent à
rejoindre leur lieu de vacances, la rentrée pro se profile pour moi. Le
programme m’a été communiqué hier par courriel : quatre jours pleins, mais
légers en FFP ; sans doute la tendance d’un mois d’août calme. Les
réjouissances et épreuves pédagogiques se cumuleront au cours du mois suivant.
Quel calme olympien aujourd’hui dans ce parc, même
le chant des oiseaux semble raréfié, atténué. Juste le vent dans les feuillages
pour ne pas laisser l’angoisse du vide sonore nous étreindre.
A quelques dizaines de mètres de mon point de
repos, une fine silhouette allongée, presque en position fœtale, pour goûter un
repos sur l’herbe fraîche. Vision d’extrême féminité dans cette scène immobile,
attirante pour un échange improvisé. Soulever cette abondante chevelure claire,
effleurer les jambes et les cuisses de nacre, remonter vers les épaules sans
mouvement, faire frissonner la demoiselle au visage caché.
Le moment de quiétude n’a pas duré longtemps :
une troupe vient de faire une halte sonore à quelques pas d’elle.
Vendredi 14 août
Touffeur au parc qui incite à profiter de l’ombre
des épais feuillages en bord de lac. Soixante-seize morceaux du mélodieux
Coldplay pour intensifier mon voyage intérieur. Murder, l’aléatoire
choix se porte sur du sombre… de quoi pérenniser un semblant de fraîcheur.
Alors que chacun déconnecte d’avec les affres du
temps, l’Insee nous offre la version poétique de sa mission, tout dans le
chiffre libre, incontrôlé, imprévisible. Là où le PIB devait plonger aux
alentours de – 0,6%, l’Institut national des spéculations évasives puis
encombrantes toussote un peu, expectorant quelques grains de sable paillottés,
pour annoncer une progression de 0,3%. Près d’un point de différence…
A ce degré de précision, la mission Apollo XIII
aurait maladroitement frôlé Pluton et le « bond de géant pour
l’humanité » se serait rabougrit en infantiles trépignements.
Quelle apparente bonne nouvelle pour Coué Lagarde,
notre ministre du budget déficitaire, qui peut ainsi se rengorger d’une
prétendue influence de la politique publique menée pour contrer le désastre
annoncé. Ne pas trop claironner, surtout en période de farniente généralisé, ne
vraiment pas fanfaronner, mais tout de même… Bien faire sentir à l’opposition
liquéfiée qu’elle devra revoir son argumentaire pour mobiliser contre les
gestionnaires en charge.
Sauf que. Cet instantané ne pourrait être qu’une
très brève étape technique, une pause avant le gouffre. La stridente musique
des plans sociaux reprendra bientôt sa place, désespérant des pans entiers de
la population, hantant les politiques pour toute initiative de colmatage.
L’alternative sera entre maintien thérapeutique du statu quo social et
délitement sans prise stable, sans baume qui vaille, en route vers la rupture
sociétale. L’économie souterraine, parallèle, mobilisera davantage, creusant un
peu plus les abysses financiers d’un Etat en sursis. Ronflante projection alors
que la crise fera flop ?
Samedi 15 août
Parc de Miribel en solitaire, fin de matinée. Peu
de monde, ce qui garantit quelque distance avec l’autre, essentiel pour la
quiétude psychique.
Vu l’enregistrement du spectacle de Guillon,
l’électron libre et caustique de France Inter qui voit son contrat reconduit en
septembre par la nouvelle direction choisie par le tyran Sarkozy. Bien
joué : stratégie et peut-être un chouia de conviction visant à ne pas
totalement étouffer les critiques sur le service public, comme un implacable
argument contre les alarmistes du Net, notamment, qui hurlent à la fin de la
liberté d’expression alors qu’eux-mêmes, ce faisant, en abusent sans
restriction.
Pour revenir à l’hirsute Guillon : une
intelligence acérée, un sens efficace de la formule carbonisatrice à rapprocher
de celles du regretté Pierre Desproges, lequel ne cachait pas sa filiation
spirituelle avec… Léon Bloy dont je m’apprête à poursuivre L’Invendable.
Dimanche 16 août, 23h09
Surplus de degrés qui renvoie aux jours oppressants
de la canicule. Un 37° à l’ombre aujourd’hui à Lyon.
Ne pas se fixer sur le temps présent, comme en
suspens, mais attendre les branle-bas de combats d’une morose rentrée. Touffeur
d’août avant le suffocant septembre. Côté pro, de nouveaux aspirants brancardiers
s’annoncent dès le premier jour des tests. Espérons que ceux-ci servent
vraiment à éliminer les profils incommodants des petites frappes abuseuses du
système et ne se résument pas à une voie automatique pour remplir coûte que
coûte des places financées.
Dimanche 23 août
Rapidement accepté par AgoraVox, repris par
deux sites (Paperblog et Coxvox) qui se nourrissent des écrits
parus sur le Net, mon article sur Heïm a la diffusion que je souhaitais,
au-delà de mon blog. Lorsqu’on tape Micberth dans Google, mon écrit sort
en première position.
Peu de réactions (et peut-être tout simplement de
lectures) à ce jour : l’une négative sur LDP, de la part d’un vaillant et
courageux anonyme. Il ironise sur le « remarquable travail d’un excellent diarrhéiste »,
soulignant ainsi son propre fond pas très net, voire carrément crade ;
ceci expliquant cela.
Sur AgoraVox un enthousiaste commentaire qui rend
hommage à la singularité du message de Heïm, y décelant des qualités de
visionnaire ! Aucune allusion à la teneur critique de mon traitement. Superbe
ignorance ? Peut-être une seule et même personne derrière. Pas une
réussite éditoriale, donc, mais tel n’était pas l’objectif.
Premier palier sur la place publique d’Internet où
je remets directement en cause la crédibilité du message philosophico-politique
de Heïm au regard des tenants et aboutissants de son existence. Lui et ses
proches liront ces lignes comme une nécessaire clarification. Le désistement de
Karl, pour nos retrouvailles à Paris, a contribué à passer le cap. Advienne que
pourra si la réception déclenche les haines.
Aiguebelette surchargée, les mélodies du MP3 pour
atténuer la gêne des cris. Comme lors des années folles lorsque le
ludique tentait de camoufler les dérives délétères du monde politique, 2009 et
sa suite vont maintenir un semblant du bien-vivre occidental à la mode du
farniente.
Mardi 25 août
Un appel
de Heïm le dimanche soir, un courriel de Monique le lendemain : les Gens du Nord s’agitent après la
publication de mon écrit critique. Le grand jeu de Heïm combinant l’attaque
affective (je n’existe que par « sa » volonté initiale…), les
reproches et les rengaines : que du lourd éculé. Je renforce mon attitude
distance sans lui balancer le détail de mes reproches.
Il fait
mine de jouer sur l’expression « aux plaisirs sucés jusqu’à la moelle de
ses sujets », qui apparaît à la fin de l’article, se risquant même à
prononcer l’ignominieux : « si je t’avais sucé, je m’en
souviendrais ! »
Et le voilà
qui revendique l’impeccabilité de son existence prouvable à tout moment par des
dizaines de tonnes d’archives. Ce fatras paperassier ne tiendra pas une seconde
le choc face à son flagrant délit de minable négation. Oui, libidineux Heïm, tu
m’as sucé, oui ! m’incitant à un écœurant soixante-neuf alors que je
n’avais pas douze ans ! Ce comportement révèle toute la salauderie
manipulatrice du reste de sa prétendue exemplaire existence.
Evidemment,
tout est justifiable, y compris la trahison de sa parole. Son argument :
la parole donnée ne vaut pas avec ceux qu’on estime indigne de la
recevoir ! Eh bien ! je l’applique à la lettre avec le soudard
incommodé par mon évolution.
Et
Monique se fend d’une couche faussement affective, s’arrogeant la qualité de me
délivrer de judicieux conseils décorés de quelques sentences de premier
choix : je dois faire ma « crise de la quarantaine », j’ai perdu
dix ans en m’acharnant à poursuivre la voie du Gâchis exemplaire (argument plus que brumeux puisque le Journal à œillères, ex Gâchis, est totalement pro Heïm, au
contraire de la suite, le Journal à taire).
Surtout
ne pas céder à la polémique : l’entourage de Heïm doit me vouer une haine
terrible. Aucune importance. J’ai affirmé une divergence sur le fond et je ne
l’effacerai pas, mais ils sont si loin de connaître la radicalité de mes
ressentis face à cette zone désormais infréquentable pour moi.
Heïm
risque de me rappeler demain : garder le cap, il ne saura rien de plus.
Je vais
intensifier le brouillage du message en créant sur Wikiquote une amorce des
meilleures citations des écrits de Heïm. Une façon de rendre hommage à
l’incontestable qualité d’un style et de garder l’œil sur sa fin de vie sans
rejet définitif.
A
constater : ce qui l’a irrité le plus, c’est d’apparaître comme un obscur
personnage, de minimiser l’importance de la Tribune
libre de 76 et de reprendre la terminologie des journalistes critiques dans
ces années. Cette tonalité, je l’ai reprise en conscience pour marquer la
rupture avec mes engagements passés, sans les renier. Le « un certain
Heïm » a beaucoup agacé, alors que F. Richard a titré un de ses ouvrages Heïm ? Connais pas !,
singeant la déclaration de Daudet lorsqu’on l’interrogeait sur Bloy. Avec un
panégyrique en contenu, les plus grosses ficelles sont accordées, mais dès
qu’on touche, comme ex proche, à l’exemplarité dont se couronne Heïm, c’est
l’implacable condescendance mal placée.
Point de
crise, Monique, mais la simple continuité dans la dénonciation de travers
ressentis comme tels depuis 1997…
Samedi 29 août
Le vent
de fraicheur sur les bords du Rhône signe comme une fin de saison estivale.
La
nouvelle tentative de Heïm jeudi à 14h45, alors que je devais partir dans le
quart d’heure pour un FFP à Cqfd, s’est écourtée bien plus vite qu’il ne l’aurait
souhaité. Juste le temps de m’évoquer le « buzz » qu’avait engendré
mon article. Pas vraiment vu la trace sur Internet : jamais un de mes
articles sur AgoraVox n’a entraîné
qu’un seul commentaire, le visionnage de l’émission a augmenté de moins de 150
clics et aucun autre écho sur la toile que la reprise habituelle de l’article
par quelques sites. On fait plus bruyant et plus voyant comme buzz, lol !
On peut
être aux antipodes vis-à-vis de Heïm et me reprocher la même chose, ce qui, en
l’espèce, relativise leur procès d’intention. Monique et Alice m’ont chacune
gratiné, à quelques mois d’intervalle, d’un « tu vaux mieux que tes
écrits ! ». Outre la connerie confondante de ce qui se voudrait une
sentence affective dissociant l’abject diariste de l’encore fréquentable
« Lo ! » pour Alice et « Lolo » pour Monique
(répétition sans doute occasionnée par le vénérable âge qu’elle associe à la
sagesse raisonnable), l’expression commune révèle l’atroce inaptitude à
intégrer et à accepter l’évolution d’un ex proche qui échappe à leur si
généreuse volonté d’emprise.
Eh bien
qu’elles déchantent ! Mes écrits c’est moi, totalement, absolument,
infiniment ! Je suis tout entier fondu dans ce que ma plume exprime.
Aucune alambication caractérielle à
chercher mesdames…
Je suis
mes écrits, mes écrits sont moi, aussi détestable, immature et conditionné
puis-je y apparaître. L’irrépressible élan à réagir par la voie littéraire aux
érections morales de cet ankylosé monde du plat pays français aggrave mon cas,
j’en conviens.
Samedi 5 septembre
Encore un message de Heïm qui me réclame un
« dernier » rendez-vous téléphonique car, décidément, il « ne
comprend pas » ma virulence à son encontre. Il doit se faire opérer des
yeux dans dix jours pour pouvoir « écrire de nouveau ou être
aveugle ». La dramaturgie d’un physique au bord du gouffre sans qu’aucune
fatale conséquence ne se soit jamais imposée… Cette fois, peut-être ? Je
ne le souhaite évidemment pas, mais l’ambiance existentielle qu’il colporte
dans chacune de ses interventions téléphoniques m’est de plus en plus
insupportable. Comme un boulet oppressant. Garder pourtant cette distance sans
rupture brutale (il suffirait pour cela que je lui envoie une invitation à
consulter Heïm le maudit en l’intimant de ne pas me rappeler car tout y
est) afin que lui-même soit l’objet d’un double langage, d’une manipulation
déroutante et d’une observation clinique. Patience donc…
A l’annonce de la parution d’un nouvel ouvrage
fracassant d’Yves Bertrand, l’ancien directeur central des Renseignements
généraux de 1992 à 2004, l’envie de plonger dans son précédent réquisitoire, Je
ne sais rien… mais je dirai (presque) tout conçu avec le directeur de Valeurs
actuelles, Eric Branca.
La pâte humaine au cœur de tout : faire
fonctionner ses relations, qui remontent parfois à l’époque estudiantine, pour
faire pression, informer, manipuler et finalement obtenir. Voilà ce que je n’ai
jamais su faire, car j’y suis fondamentalement étranger. Cette propension à
multiplier les contacts masculins me dégoûterait presque. N’ayant aucun goût
pour le pouvoir, je me limite au strict nécessaire.
Vu Joyandet chez Hervouët sur LCI : minable
langue de bois pourri sur son séjour en Lybie. Secrétaire d’Etat, il
représentait la France auprès de l’infect Kadhafi. Les justifications se
voulaient nobles alors qu’il aurait carrément dû tenir le langage du cynisme
nécessaire en politique étrangère. Même chose avec le Gabon dont on feint de ne
pas soutenir le prétendu vainqueur, le fils Bongo… L’odeur de merde incommodait
de plus en plus au cours de sa courte prestation au Journal du monde.
Lundi 7 septembre
Le tintouin médiatique autour de la Grippe A
exaspère déjà. Chaque cas va être cité, répertorié, scruté jusqu’au dégoût de
s’informer lorsque d’éventuels vrais risques majeurs se dresseront. En
attendant, façon de dire : vaut mieux être encore en bonne santé même si
la crise économique vous laisse sur le carreau que de risquer le décès subi,
foudroyant comme pour des millions de nos aïeux à l’époque maudite de la grippe
Influenza.
Le reste des titres de l’actualité semble
accessoire pour nos porteurs de nouvelles. Façon de conditionner les peuples,
même sans intention consciente.
Courriel de Jim qui m’annonce mon prochain statut
de tonton avec la naissance à venir d’une Nalya, leur enfant. Il s’inquiète de
recevoir un courriel pour lire un blog sur Heïm. Je l’éclaire sur le contenu.
Demande d’amitié virtuelle par Bruce sur Myspace
que je fréquente peu. Acceptation… de loin.
J’ai enfin trouvé la mélodie de Giani Esposito et
ses paroles poignantes, le tout interprété en 1957, Les clowns :
achat de la chanson sur Virginmega avant de l’adresser à Jim. Il devrait me
dire la faisabilité de l’air à la guitare pour que j’entame l’écriture des
paroles dédiées à notre maman…
Samedi 12 septembre
Finalement, choix d’Il n’y a pas d‘amour heureux /
Je sous salue Marie de Brassens pour l’anniversaire de février 2010. La
faisabilité, la texture de la voix et l’abondance des paroles plaident pour ce
morceau qui figure parmi les favoris de notre maman.
Jim se fait opérer du dos mardi prochain et ne
pourra pas s’asseoir ou se courber pendant au moins quatre semaines. Espérons
que cela lui change une vie qui n’est plus que douleur et handicap ces derniers
mois.
Dimanche 13 septembre
Actualité : certains s’effarouchent, au PS, du
mauvais coup porté par Hold uPS, arnaques et trahisons. Pourquoi ne
portent-ils pas plainte contre les journalistes auteurs de ce brûlot à
charge ? Si l’initiative leur semble ignominieuse, qu’ils exigent des
preuves : Karim Rissouli et Antonin André affirment d’ailleurs les
détenir. Alors pourquoi traîner plus longtemps : perçons la baudruche
journalistique ou décapitons l’illégitime nouvelle tête !
Hortefeux se fait piéger par « trop de
décontraction » : une blague de comptoir à coloration raciste et tous
ses efforts pour aplanir son image d’ex ministre de l’immigration et de
l’identité nationale sont cramés. A relire la chronologie des échanges on ne
peut douter qu’il visait bien les origines maghrébines du jeune militant.
Tempête qui sort du verre d’eau. Le comble est que le rappel à l’ordre sur une
parole trop libre vienne du champion toutes catégories en écarts
langagiers !
La précipitation des présidents français et
brésilien pour annoncer le contrat de vente des Rafales risque encore de
tourner en eau de boudin lorsqu’il faudra administrativement conclure. Toujours
ces effets de manche où le politique se décrédibilise. Pourquoi ne pas attendre
fin octobre et les conclusions de l’armée de l’air brésilienne ? Des
intérêts supérieurs où le principe d’action se limite souvent à l’effet
d’annonce, médiatiquement porteur, que cela corresponde ou pas, par la suite, à
une réalité. Cela sert l’intérêt immédiat, peut-être, mais jamais les
fondamentaux…
Lundi 14 septembre, 22h43
Des réactions familiales bouleversées après la
lecture de Heïm le maudit. Mon témoignage, mon ressenti ont fait mouche.
Mes parents et Jim sont les premiers à me témoigner de ce choc à la lecture qui
a conforté leur exécration du personnage.
Avec ces pages, j’ai un coup de grâce possible à
tout moment contre Heïm, en inondant la toile. Pas encore le moment…
Décidément, la teneur du débat politique ne
s’enrichit pas en France, et l’ailleurs ne fait pas plus envie.
Jeudi 17 septembre, 22h19
Vu deux numéros du Ce soir (ou jamais !)
du pertinent Taddéi. Un générique qui rappelle, par la coloration de ses images
comme sorties d’un naturel improvisé, le vivace début du Droit de réponse
de Polac. Moins d’éclat, plus de profondeur, mais une liberté de ton qui permet
à chaque invité de s’exprimer dans la durée sans être constamment interrompu.
Taddéi, l’inverse d’un Demorand qui coupe, écourte,
assèche l’argumentation de celui qu’il interroge. Un peu de grâce télévisuelle
donc… si rare.
Les femmes en politique ? Ni pire ni mieux que
les hommes : le PS le démontre tous les jours avec les tribulations des
deux dames qui se haïssent sans retenue.
Plus masculin, mais non moins en détestation
réciproque, de Villepin-Sarkozy vont avancer leurs burnes sur le terrain
judiciaire. L’ancien Premier ministre va-t-il se dégonfler face à l’écrasante
évidence des faits ou ceux-ci vont-ils révéler une stratégie sous-jacente de
celui qui se proclame victime ? Le cloaque n’a pas d’étiquette politique,
il EST la politique.
Mardi 22 septembre
Hier fin d’après-midi, nouvelle tentative de
l’insubmersible Heïm pour décrypter ce que je lui reproche sur le plan
personnel. Une heure et demie de quasi monologue : je n’ai rien lâché
de plus, le laissant à son monomaniaque discours.
Sa priorité : que je ne sombre pas dans la
minoration de ce qu’il est. Pour ce faire, les références se multiplient et il
va jusqu’à affirmer que les « quelque 250 clics » sur l’émission Tribune
libre proposée par Dailymotion, lorsque j’ai rédigé le texte incriminé, aurait
surgonflé au point d’atteindre mille, deux mille, voire plus encore…
Je vérifie l’assertion : au 22 septembre, soit
vingt-trois jours après la parution de mon si désobligeant article, on atteint
vaillamment les 460 visionnages ! On est loin du raz-de-marée buzzien,
quoiqu’il en dise.
Pour le reste, je le laisse à ses certitudes
affichées, jouées ou, plus grave encore, véritables. Il ne « m’a pas
enculé », au sens propre, affirmait-il hier : heureusement
pépère ! Il s’est contenté de me sucer et de se faire sucer avec, pour ma
part, un inextinguible dégoût.
Samedi 26 septembre
Red
Lions, 22h57. Je débarque dans l’antre encore quasi vide
et aperçois de suite celui avec qui Bonny chantait lorsque je l’ai connue. Il
me croit présent pour elle qui devrait passer. Voilà au moins deux ans que je
ne l’ai plus vue. J’en profite pour glaner quelques nouvelles de son compagnon
Eddy, et le chanteur m’indique, laconique, qu’il n’en a aucune et que, de toute
façon, ils ne sont plus ensemble ! A ma dernière escapade au Red,
la serveuse m’annonçait que l’Eddy avait été méchamment atteint par un cancer.
La serveuse me confirme qu’il s’en est sorti, mais que la séparation remonte à
six mois.
L’ancrage dans cette ville, dix ans cette année, me
fournit les panoramas, les mises à distance, les évolutions, effondrements et
résurrections d’accointances peu cultivées. Bien le seul endroit de Lyon où je
suis reconnu et qui m’offre ce vague suivi de gens croisés.
Début de prestation dans ce Red qui peine à
se remplir. Des arrivées perlées qui ne m’évoquent rien de familier : tout
a coulé depuis ces habitudes nocturnes où la plume vagabondait pour une
actualité toujours source de grogne.
Témoignage édifiant de l’ex trader Kerviel chez
Guillaume Durand : ses
arguments et son apparente sincérité tracent la salauderie d’une hiérarchie qui
l’a sacrifié dès que l’emballement de ses positions a pris le mauvais sens.
Vertigineux et insensé « casino » avec l’argent des déposants. Le
terme qualifiant l’activité des banques sur les marchés n’est pas d’un loufoque
pamphlétaire comme moi, mais de Peyrelevade, ancien président du Crédit
lyonnais. Tout ce que je dénonçais dans le Coup
de pouce… dans l’cul suivi du Doigt
bancaire profondément placé est confirmé par un des principaux acteurs qui
a poussé au bout l’attente vorace de ses supérieurs avant de se faire lyncher
dès que les vents du flouze facile se sont déréglés. Pour les cinq milliards de
pertes mis sur sa tête, résultant de cinquante milliards de position, il laisse
entendre que la Société générale aurait stigmatisé sa descente pour mieux
dissimuler de plus interlopes pertes.
Un suivi chirurgical des
économistes à la Cohen nous laisse peu de réjouissances.
Minuit passé : trou noir
économique ou absence d’une voix attractive ? Le Red est toujours en sous-effectif.
Comme au temps des grandes
guerres, de l’Apocalypse, une gente féminine surreprésentée : pas pour me
déplaire.
Toujours pas de trace de la
chanteuse Bonny.
Diversion pour mieux ingurgiter
les sombres prévisions des esprits à l’affût d’un improbable rebond.
Juste pour se carrer une
frousse : l’action conjuguée des Etats qui a pu préserver in extremis le
système bancaire, ouvre des périodes d’explosion budgétaire. Un boomerang
dévastateur. Si la rechute se profile, nombre d’Etats ne pourront réalimenter
les circuits : là l’implosion aiguisera les incertitudes.
Mercredi 30 septembre, 22h59
Bien pris par mes FFP, notamment avec les aspirants
Lieutenant. Densité des connaissances à leur fournir dans une vivance
attractive.
La quarantaine se rapproche méchamment.
Samedi 10 octobre
Demain festivités familiales à Rambouillet, chez
Jim et Aurélia, pour fêter ce passage décennal.
Tintamarre autour des frasques du Mitterrand de la
culture. Sa Mauvaise vie, publiée il y a quatre ans, lui revient en
pleine figure via la charcutière blondasse de la politique, celle qu’il faut
consommer en se bouchant les portugaises. Un joli coup de com. de sa
part, repris par les quadras du PS en mal de lynchage de l’encombrant et
suiffeux neveu.
Désormais, pour être ministre, il faut présenter un
passé éthéré, sans écart ou savoir bien dissimuler ses crades déviances. Le
puritanisme américain nous gagnerait-il ? Et c’est sur la toile que l’on
trouve les plus virulentes attaques contre le Frédo chez, ou plus précisément
DANS, les éphèbes, alors que la plupart de ces implacables censeurs anonymes
doivent cumuler des antichambres sordides, des arrières cours peu reluisantes…
La crasse du gouvernant pour absoudre celle des vindicatifs petites gens. Le
populisme pudibond est en marche…
Dimanche 11 octobre
Raph ne
pourra être présent à la fête de mes quarante printemps : importante
compétition de basket dans lequel il excelle. En français, il n’est pas en
reste : j’ai lu la rédaction qu’il a préparée pour lundi, un récit
conditionné par quelques règles classiques (point de vue interne, temps du
passé, ellipse temporelle…). En quatrième avec un an d’avance, sa calligraphie
et la teneur de son histoire révèlent une maturité presque déconcertante :
une narration vive, le respect des règles n’empêchant pas l’originalité, le
choix judicieux d’un vocabulaire polard
dans la bouche des personnages. Le tout séduit. Une tête bien faite dans un
corps sain, voilà un modèle que le petit
Raph incarne sans peine.
Mercredi 14 octobre
Dernier travers en date : le jeune élu au
Conseil général des Hauts-de-Seine brigue la présidence de l’EPAD, organisme
sous les feux médiatiques. La mainmise de Sarkozy prend un tour filial, comme
un remugle d’une décadence d’Empire.
Prêts à décupler l’importance à accorder à cet
épiphénomène, lorsqu’on liste les épais problèmes que l’on affronte, les
hargneux du Net emboîtent le rythme d’une affaire buzzée l’autre sans
rechigner.
Samedi 24 octobre, 0h36
Gâté, trop gâté pour ces quarante ans. L’affection
témoignée m’a profondément touché, tant côté famille de sang que vers la famille
de ma BB.
Pour le reste, les semaines défilent et
l’inspiration s’assèche. Toujours pas mis en ligne le Net (de) Travers.
Mercredi 28 octobre,
23h50
Toujours autant de crétins à œillères sur AgoraVox.
Mon dernier article pris par ce site, Un Net (de) Travers, a osé
s’attaquer au sacrosaint Peuple du Net : les hystéros se regimbent par de
basses tentatives de critique ad hominem. Rien de vraiment argumenté, un
écrit mal compris et des antiennes sans grand intérêt.
Le sens du vent judiciaire tourne pour la vieille
bête Pasqua.
Jeudi 5 novembre, 23h34
Pour compléter le compte rendu des haineuses
réactions à mon Net (de) Travers, je dois faire référence à deux
imaginatives trouvailles.
D’une part le détournement du terme diariste
pour m’assimiler à un « diarrhéiste ». Joli ! L’auteur de ce
délicat paronyme devrait savoir que je m’efforce à exceller dans ce peu
ragoûtant registre pour mieux… le conchier ! L’anonyme planqué serait
inspiré de réviser certains contes classiques.
Plus surprenante attaque : je ne serais pas
moi-même, mais le pseudonyme (!) utilisé par le suppôt de Sarkozy, le détesté
Frédéric Lefebvre. Vaseux amalgame, non pour un panégyrique du Président que
j’aurais commis, mais pour mon attaque en règle contre les planqués du Net qui
se revendiquent représentatifs de la colère populaire.
Combien tout cela me comble : ne surtout pas
être de leur côté garantit mon intégrité mentale et me dispense d’un récurage
de près.
Jeudi 3 décembre
Hier soir, restau partagé avec ma BB pour fêter nos
huit années partagées. Cette douceur de vivre dans une dualité sans
envahissement réciproque nous convient. Equilibre subtil de deux personnalités
qui se complètent et s’apportent l’attention nécessaire. Lyonnais de cœur,
d’autant plus grâce à cet ancrage inespéré.
A l’heure où l’on affirme la littérature plus
autobiographique que jamais, je me complais dans un diarisme sans
débouché éditorial, nourri sporadiquement sur le Net pour croire à une obscure
utilité.
Pas sûr que ces dernières phrases soient très
limpides. Aucune importance, les critiques se déchaînent et quelques rares
hommages contrebalancent.
Il semble que l’urgence d’écrire m’anime beaucoup
moins. Comme une plume en pâte… rien de percutant à y déceler.
Après cette résurgence du néfaste Heïm, suite à mon
irrévérencieuse chronique, le silence s’impose à nouveau. Point de raz de marée
pour aller visionner l’extrait du Tribune libre ayant aiguisé ma plume.
Trois mois et demi après le compteur est passé de 250 à 750… soit un bond
magistral de cinq connexions par jour. Le vieillard se voudrait central alors
que pas un péquin sur cent croisés dans la rue ne connaît même son nom (le
réel !). Risible manifestation de sa part donc, comme si la première des
offenses tenait à une sous-estimation de son immanente influence…
La vieillesse un naufrage ? Echoué le Heïm,
sur les berges de sa réussite autoproclamée. Envers et contre tous les connards
qui ont plus ou moins longuement pollué son existence et qu’il a bien voulu,
dans sa magnificente grâce, accueillir, exploiter et expectorer au loin une
fois le jus tari.
Curieux cet extrême, implacable détachement lorsque
je songe à lui et à ses dernières années… comme si plus aucune humanité ne me
portait vers cet individu et les rogatons de sa particulaire mesnie.
Ni nostalgie, ni amertume : une distance cosmique d’avec cet univers si
radicalement embrassé quinze ans plus tôt.
Mercredi 23 décembre
Big Lutèce et ses rageantes conjonctions :
d’un côté le RER A toujours perturbé par la grève d’agents revendicateurs, de
l’autre le RER C qui a subi un dommage sur sa voie de circulation, conséquences
en chaîne : accident de voiture contre un arbre qui s’écroule et fait
chuter un bloc de béton sur les rails. Pour nous deux, en transit et
surchargés, après avoir rejoint à pied la gare d’Austerlitz, une rame est
passée par les Invalides d’où nous attendons un départ pour Pontoise.
Confirmation d’une forme d’aliénation moderne envers les transports, de quelque
nature qu’ils soient. Bouger pour s’évader, content les férus du parcours
spatial… comme un leurre.
Cameron n’a pas été tendre avec l’humanité dans son
captivant Avatar. Derrière l’apparente dénonciation des puissances
économiques d’un futur décidément inapte à changer la nature humaine, se niche
une moins tenable position : les vrais responsables sont bien plus
nombreux, puisqu’il s’agit des consommateurs qui pérennisent le système global
en se contentant d’une passivité suiveuse.
Samedi 26 décembre
Du Cellier. Un semblant d’amorce de panaris me
fait abandonner les prolongations du dîner pour me retrouver un peu sans
obligation de prestation. Toujours ces restes d’incapacité à m’intégrer au
naturel dans une collectivité humaine si chaleureuse soit-elle. Une grande
lassitude de tout m’étreint dans ces moments d’imperméabilité à l’alentour.
A la
moitié de la coupure hivernale, trop rapidement vécue… Mon retrait comme une
pause pour s’imaginer davantage maître des instants qui filent. Les jeunesses
en devenir nous poussent bien malgré elles vers les zones aux avenirs plus ou
moins amincis, voire hypothéqués.
Lundi 28 décembre
Parmi les
présents, les Mémoires de Jacques
Chirac, Chaque pas doit être un but.
Occasion de découvrir l’homme politique complexe par lui-même. Celui qui
faisait parfois figure de gourdiflot d’Etat livre la genèse de son accession à
la responsabilité suprême dans notre forme de société.
De plus
en plus chez moi, pour ces personnalités hors norme, un humanisme voltairien se
développe : impitoyable dans la charge contre l’homme public aux affaires
lorsque l’indignation s’exacerbe, je ne peux contenir une forme d’affection,
lorsqu’ils se trouvent retirés des affaires mais qu’ils ont permis, quoiqu’on
pense de leur bilan gestionnaire, au système démocratique apaisé de s’ancrer
davantage et à notre pays d’échapper aux pire tourments qui grouillent sur le
gros reste de la planète. Comme un hommage à leur rôle plus fondamental,
au-delà des politiques conjoncturelles menées : le maintien d’institutions
qui, vaille que vaille, permettent à la France d’incarner une des plus
attractives zones d’existence.
Chirac,
donc, se livre au soir de son frénétique parcours. Première révélation pour
moi : sa participation à la guerre d’Algérie pendant quatorze mois, et sa
haute conscience de l’indigne lâchage des harkis après la signature des accords
d’Evian. Un sacrifice des frères d’armes que l’officier Chirac n’a toujours pas
digéré. Une déchirure encore vivace dans son gaullisme. Comment ne pas
embrasser sa position, partagée entre son anticolonialisme viscéral et sa
proximité instinctive d’avec ceux des Algériens qui avaient choisi de rester
fidèles à la nation française. Une complexité parmi tellement d’autres.
Chirac
est en même temps celui qui a signé l’appel de Stockholm invitant à éradiquer
l’arme atomique et l’Hiro-Chirac qui
reprendra, envers et contre la tendance mondiale, les essais nucléaires pour
pérenniser notre politique de dissuasion. Une capacité à intégrer les intérêts
supérieurs de l’Etat qu’on dirige sans renier d’un trait ses aspirations
premières.
Soir. Chez Richard, au repas, toujours ses
épuisantes tendances à l’allusif. Porte sur le système, à force. Du mal à
supporter plus d’une journée.
Mardi 29 décembre
La part
des évolutions techniques et technologiques qui exacerbent notre part barbare.
Tout Avatar est là. Se laisser
envahir par la grâce de Neytiri, princesse de ce royaume imaginé. D’un coup, un
regret d’appartenir à cette laide et conquérante humanité et une frustration
que n’existe pas, ou que soit hors de portée, cette forme bien plus évoluée
d’êtres vivants. Dans la part d’imaginaire, une niche pour ce qui nous fait
dépasser les contingences incommodantes.
Le retour
au labeur se rapproche, un début d’année en grisaille avec ce recommencement
qui plombe notre capacité à être pleinement, pour ceux attachés à une activité
non artistique. Se résoudre à cette forme basique d’existence pour ne pas être
confronté à ses propres carences, à ses handicaps sociaux. Les miens, et c’est
idéal, correspondent de plus en plus avec ce que j’exècre. M’en suis-je
persuadé ? Peut-être et peu importe… Aucun plan de carrière, le moins
possible de déplacements motorisés, l’aversion des voyages spatiaux vers de lointaines
contrées, la nausée des rassemblements tendance entassement et toute une
panoplie de ce qui fait se targuer le mâle en vue pour une bien grotesque
parade.
Tiens, à
signaler, une épouse mal éduquée d’un chanteur auquel on a cherché des noises,
il y a quelques mois, sur sa prétendue proximité avec Paul Léautaud. Mme Perret
fait la démarche de me téléphoner pour requérir un soutien. Je me fends alors
d’un courrier hommage timbré et gentiment envoyé… il y a plus de trois mois.
J’attends toujours ne serait-ce qu’un accusé de réception. Aucun signe, missive
passée par perte… Sans doute n’étais-je pas suffisamment important et
n’avais-je pas l’influence requise pour que le couple daigne répondre, même
d’une ligne. C’est à ce genre de signe qu’on décèle la médiocrité opportuniste,
y compris chez des gens n’ayant apparemment plus rien à prouver. Cela
plaiderait presque pour la thèse des Silve et compagnie…
Pas plus
de nouvelle du documentaire… combien il faut prendre ces paillettes parisiennes
avec distance et circonspection. Sans doute qu’aucune chaîne n’a voulu acheter
ce sujet sur Léautaud sans pointure médiatique interrogée (et malgré la
présence d’un académicien).
En fond
sonore, la énième crise de la petite Ilya qui ne parvient pas à canaliser ses
contrariétés. Wesy, l’autre fille de Richard, a quatorze ans, la taille de ma
BB et la maturité d’une jeune femme : impressionnant.
Demain,
un levé à l’aube pour faire le trajet Le Cellier-Lyon avec les parents B. De
l’apaisé pour ce retour au bercail.
Avec
Richard et sa fille aînée, après-midi au cinéma. Séances 3D d’Avatar complètes,
nous nous rabattons sur Solomon Kane,
un navet grandiloquent qui suit le parcours de rédemption du guerrier Solomon,
un petit temps « homme de paix » avant d’être contraint, le pôvre, à
reprendre les lames tranchantes. Entre la flotte qui ne cesse de débarouler sur
des paysages détrempés, gadouilleux –
encore une belle image colportée de l’Angleterre ! – et la lancinante
tendance aux massacres en série avec victimes bruyantes, le film épuise poncifs
et spectateurs pour ne surtout pas quitter sa voie de nullité
cinématographique. A oublier au plus vite.
En
arrivant au complexe de salles, une affiche géante avec une vue de profil,
stupéfiante ressemblance, de celui qui incarne Gainsbourg (une vie héroïque) à sortir en janvier 2010… déjà 2010…
ça file à vous dégoûter du temps qui passe…
A vouloir
remplir les quelques pages restantes de ce Manus
XIX, je me complais dans le factuel basique.
Des
familles proches qui vont bien et une ex famille de cœur dont, j’espère, je
n’entendrai plus parler pour l’année à venir. L’insubmersible au mille maux
déclarés cultive encore ce qu’il se convainc d’être de l’impeccabilité de vie.
Comment oser ce terme et s’en faire un étendard contre tous ceux qui se
risqueraient à le contredire lorsqu’on réunit l’ensemble des témoignages de
ceux qui l’ont côtoyé et qui sont sortis de son influence.
Même le
plus anecdotique marque sa façon d’utiliser l’autre. Mon pôpa me rapporte ainsi
le cas de son appartement rue de l’Ouest à Paris, défraichi certes, mais sis
dans un groupement d’immeubles avec cour intérieure et dont certains
rez-de-chaussée avaient accueilli des ateliers de peintres impressionnistes.
Alors que ce coin du XIVe arrondissement allait être en chantier de
reconstruction totale, ce lieu fut protégé. J’y louerai d’ailleurs quelques
mois, en 1994 ou 95, comme éditeur à la dérive, une surface pour prendre le
relai de la vitrine parisienne que
nous n’avions plus les moyens d’assumer. Un siège provisoire pour une débâcle
programmée.
Revenons
à l’époque du pôpa : il avait effectué quelques travaux et comptait bien
le sous-louer en intégrant ces investissements. Alors qu’il avait trouvé
preneur, le prix restant très attractif, il en a parlé incidemment à Heïm qui
s’est montré très intéressé par l’affaire, d’autant qu’il n’aurait ainsi pas à
traiter directement avec le propriétaire, mais seulement avec
« l’ami ». « Votre prix se évidemment le mien »
renchérit-il, toujours abondant en paroles généreuses.
Au moment
de conclure, ses insidieuses maîtresses, celles que je considèrerais un temps
comme des mamans, lui font passer le
message, bien briefées par Heïm, qu’il profite de la situation, qu’il devrait
être plus raisonnable financièrement… Après la bonté affichée (alors que pôpa
n’avait rien demandé !) la tentative de culpabilisation par ses sbires
féminins. Il ne cèdera pas.
Second
acte de cette petite salauderie à la sauce heïmienne,
quelques années plus tard, y ayant installé certaines de ses femmes afin qu’elles puissent bosser à
Paris et lui rapporter le fric nécessaire, un proxénète de luxe en somme, pôpa
apprendra (comme caution de fait) que certaines échéances du loyer n’avaient
pas été honorées. Rappelons que, au même moment, Heïm se rengorgeait d’être
châtelain avec quelques enfants-domestiques à sa botte ! A dégueuler.
Un
véritable travail universitaire pourrait être consacré à faire témoigner tous
ceux qui ont croisé son chemin et qui ont été en affaires (au sens large) avec lui. En regard de la monumentale Vie rebelle consacrée à Heïm par Franck Roc,
panégyriste en chef (mais tout seul !), nous aurions la sordide réalité
d’un personnage ayant fait de la manipulation, des fausses promesses, du double
langage, de l’abus et de la consommation (au sens physique) de jeunes êtres en
devenir et sous son efficace influence, une règle inavouable de vie. Et lorsque
les écarts sont évoqués, c’est pour mieux souligner qu’avec les personnes qui
lui sont inférieures, les principes moraux ne s’appliquent pas ! Autant
dire que tout lui a été permis de son vivant, mais que sa crasse de vie
emportera toutes les fioritures laudatives qui auraient subsisté pour une
notoriété outre-tombe.
Aucun
compte à régler, juste une vérité à restituer. Comme une purge personnelle qui
s’ajoute. Nourrir Heïm le maudit à
chaque occasion. Autant de bonnes raisons qui justifient cette nouvelle charge.
Lui avoir
fait effleurer la teneur d’un ressenti avec l’article « Tribune libre pour Micberth en liberté »
sans rien lâcher de plus : la mission est accomplie pour 2009.
22h30.
Bientôt l’extinction du filament. Un bon moment pour finir le court séjour au
Cellier. Ma BB n’aura encore pas vu sa copine Laure, à se demander si la prise
de distance n’est pas un souhait réciproque.
Demain de
l’asphalte…
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