2007 – Les tics d'une vie
Lundi 1er janvier
Au
chaud dans notre nid lyonnais, un tendre et joyeux passage du six au sept, en
se souhaitant une heureuse conception pour cette année. Quelques mets goûteux
(apéritif varié arrosé d’une blanquette de Limoux avec crème à la fraise et aux
fraises des bois ; foie gras d’oie artisanal ramené de Corrèze accompagné
d’un Sauterne 2004 ; boudins blancs aux morilles avec son fagot lardé
d’haricots verts soulignés par un Cahors 2004 ; bûche glacée aux
chocolats), une émission distractive, quelques cadeaux (restes du Noël
Saint-Crépin non fêté) : de la pure symbiose avec ma BB.
Après
avoir fait paraître sur mon blog LD pamphlétaire et sur le site Points
communs.com les passages écrits les 24 et 26 décembre sur ma feue
grand-mère, des courriels d’hommage à la qualité sensible de mon texte. Pas une
fausse note dans ces réactions de personnes inconnues mais touchées par mon
témoignage d’amour. Ne devrais-je pas verser dans l’écriture sensible, celle
dans laquelle peut s’identifier le lecteur du hasard, plutôt que de rester
chevillé à la plume incendiaire… Même si l’évolution de ma tonalité littéraire
m’a fait passer du pamphlétaire au réfractaire, l’essentiel reste constitué
d’attaques tous azimuts.
Reçu
hier un mail de S. (qui signe Hermione, le prénom que je lui attribue dans la version publiée de mon Journal) suite à un mailing par courriel
à tous mes contacts pour les prévenir de l’ouverture d’une nouvelle adresse
e-mail, l’ancienne servant comme moyen d’identification lors des référencements
de mes blogs sur des moteurs de recherche et étant polluée, de ce fait, par
d’innombrables spams indésirables.
Courriel
étonnant de Hermione donc : un ton recherché d’une femme qui se veut en
retrait du monde, désespérée par les ruptures familiales cumulées, mais
commençant à vivre à l’aune de ses rêves d’enfant dans une magnifique propriété
située dans le Lot. Son exécration
de la Somme, et de Chaulnes en particulier, s’explique par les époques sombres
qu’elles incarnent. A la fin, elle rend hommage au garçon (tel un frère) qui a
partagé quelques années de son enfance. Nos retrouvailles, si elles ont lieu un
jour, concentreront toute l’émotion cumulée de cette complicité enfantine
perdue à jamais, en route déjà vers les désabusements nostalgiques.
Je
garde ce surprenant courriel comme une trace de cette chère Hermione, artiste
talentueuse et incarnation des moments féeriques d’une tranche de mon enfance.
Dans
l’actualité de la fin 2006 : la mort d’un James Brown à bout de souffle et
l’exécution à la va-vite de Saddam Hussein qui acquiert ainsi, pour une bonne
partie du monde arabo-musulman, le statut de martyr. Encore une erreur
fondamentale dans la gestion du chaos irakien…
Jeudi 4 janvier
D’une
bien maussade humeur, sans explication rationnelle. Aucune envie d’échanges, de
conversations, de dialogues. Il me faut une quarantaine volontaire.
Passage
des parents B, de la sœur et de la marraine de BB pour le dîner : nulle
envie de prendre part à la convivialité. Peut-être la résultante d’une
surabondance d’instants collectifs. Besoin vital de retrait.
Dimanche 7
janvier, 23h20
Quelques
heures de sommeil avant une rentrée sans temps mort. Les moments de
recueillement et de délassement doivent être délaissés.
Vu ce
soir la magistrale et dramatique interprétation de Harpagon par le tonitruant
Serrault. L’acariâtre personnage, par cette incarnation, appelle un peu plus
encore l’antipathie. De Funès l’avait allégé d’une nervosité comique, Serrault
l’assombrit de tous les vices médiocres. Les déambulations des personnages dans
cette austère, mais labyrinthique demeure, insuffle une vitalité à cette
version où chaque virgule du texte semble avoir été respectée.
Avant
extinction, quelques lignes du défenseur de feu Revel, Pierre Boncenne, qui
démontre aisément la pesanteur ou la volonté méprisable d’une bonne part de
cette prétendue élite intellectuelle qui a tout fait pour ignorer, minimiser ou
déformer l’œuvre majeure de ce journaliste-penseur, de cet essayiste hors pair.
Vive Revel !
Jeudi 11 janvier
Le
rythme des semaines pro reprend sa pleine place, après cette parenthèse
émotionnelle. Les aspirants lieutenant ont fait leur entrée en formation,
l’équipe des intervenants occupe la brèche, et je me fonds dans ce rôle de
modeste formateur de centre privé. Par fainéantise sociale, j’ai hypothéqué
tout plan de carrière. La dérisoire rémunération versée, l’absence d’évolution
possible dans cette micro structure, le bien-être global des conditions de
travail, tout cela forme une niche dont j’aurai du mal à m’extraire par ma volonté.
Hommage
à Samuel Etienne et à sa troupe de bretteurs renouvelée chaque soir pour
s’indigner sur l’actualité. Le N’ayons pas peur des mots surnage parmi
les quelques très rares émissions télévisées auxquelles je me suis fidélisé.
Entre invectives et raisonnements, la variété des profils assure à l’émission
un souffle vivifiant.
Alors
laissons-nous porter par les indignations de l’olympien Tesson, tirons à coup
de sondages aiguisés par Jean-Marc Lech, récoltons les fines analyses de
Bénamou, accrochons la barytonne bourrasque vocale de maître Szpiner,
noyons-nous dans la radicalité aux yeux clairs de Clémentine Autin, achevons
les adversaires avec le doublé dirigeant de Marianne
chez Charlie, voguons de métier en
métier pour déterminer qui argumentera davantage du publicitaire à l’auteur, du
politique à l’avocat…
Samedi 13 janvier, 0h30
De retour d’un agréable dîner
chez Aline et Pedro. Leur petite a bien poussé et grossi, mais la maman semble
se lasser de cette quotidienneté à pouponner. Pas d’insurmontables problèmes,
mais de petites tensions à gérer. Sa volonté, dès que possible, est de
retrouver une situation professionnelle qui corresponde à ses recherches. Pedro semble prendre avec
philosophie les quelques difficultés d’acclimatation de son épouse. Pour le
reste, toujours de l’harmonie.
9h30. Pas toujours contempteur
des profils de jeunes gens à former. Dans le groupe des SPP1 de cette année,
une dizaine d’éléments à la mentalité joyeuse, mais studieuse, emmenée par la
pétaradante Marie-Lyne B., issue de Nouvelle-Calédonie, qui me témoigne un
gratifiant intérêt pour mes interventions. Cette semaine, au début d’un des
cours, un petit hippopotame en peluche m’attend sur la table avec un gentil
petit mot de la part des SPP1, en réalité de cette Marie-Lyne et de ce noyau
complice. Très touché par la démarche.
Dimanche 21 janvier
Par un courriel titré Clap
dernière ! j’ai mis un terme aux récentes retrouvailles (à distance)
avec Hermione qui, finalement, se complaît dans la singerie d’un autre
personnage : l’atrabilaire Carabosse.
Après un premier échange
touchant, réaction à mon texte sur ma feue grand-mère, dans lequel elle
campait, avec quelque talent (et sans doute l’aide de son compagnon) ses
conditions contrastées de vie, le ton a vite changé.
N’ayant pas admis mes propos
dans La vase ou le mur, elle m’adresse une contre-argumentation pointant
quelques signes d’attaques intuitu personae. Saisissant l’occasion
d’établir une correspondance polémique, je souligne ce qui m’apparaît comme des
points de faiblesse dans ses propos, mais en prenant garde (mon instinct ne m’y
incitant d’ailleurs pas) de ne lancer aucune insulte à son égard. Hier,
quelques jours plus tard pour peaufiner ses effets, je reçois un pseudo
commentaire de ma réponse, mais vrai catalogue d’injures à mon endroit.
Ne me soumettant pas à sa
première logorrhée, elle s’essaye à l’indigne charge, sous prétexte d’avoir
décelé du condescendant dans mes propos. C’en est donc terminé aussi avec cet
enfant de sang de Heïm. Hubert l’arriviste, Alice la déjantée et Hermione
l’infâme : beau trio ! Cette dernière, petite crapule inconsommable,
gesticule en s’imaginant très supérieure dans ses choix de vie. Sa magnifique
propriété payée avec… et puis merde ! Aucune envie de perdre mon temps
avec ce qui s’apparente à du sous-Heïm sans finesse. Qu’elle reste dans ses
certitudes d’incomprise et ne vienne plus m’importuner. Six lignes de courriel
pour l’évacuer, c’est bien assez.
Samedi 10 février, sans doute autour de
minuit.
Soirée de retrouvailles
chaleureuses chez maman et Jean, avec Jim et Aurélia, autour d’un Loto déjanté.
Au sixième ou septième lot, le téléphone : Candy, la fille de Jean, est en
larmes après des violences échangées avec son compagnon (le projet de
séparation était décidé pour la fin de semaine prochaine). Suspension des
festivités, Jean va la chercher à Paris. Malheurs cumulés pour nos fêtes :
après un Noël endeuillé, une réunion de février entachée par cette violente fin
sentimentale. La maman de Candy tutoyant la mort, nous avons d’abord cru à un
décès traumatisant, mais prévisible. C’est finalement la sordide violence d’un
couple à l’agonie qui aura rompu le charme insouciant de la soirée.
Découverte d’une facette
insoupçonnée de l’adolescence de Jim : aux pires moments, il s’est adonné
au caillassage des trains et au vol en bande organisée, entre autres
méfaits. Il reconnaît aujourd’hui l’extrême stupidité de ses agissements. Parti
du domicile maternel alors qu’il n’avait que quatorze ans, je n’ai pas connu
son interlope période, mais maman s’est alors laissé berner, lui faisant
totalement confiance.
A méditer : l’existence
des êtres que l’on connaît, que l’on côtoie, est toujours plus complexe que
celle qu’on se figure. La tendance simplificatrice…
Dimanche 11 février
Noël 2006 et anniversaire de
maman en une soirée : nous avons encore été bien gâtés avec, notamment, un
lecteur-enregistreur-graveur DVD de 160 gigas.
Le jour saint de
notre-sainte-mère-Marie, hommage à son premier miracle, choisi par Ségolène
Royal pour présenter ses choix politiques dans le fouillis des débats
participatifs.
L’aspiration utopique au
meilleur des systèmes de gouvernance fait rejeter ce mécanisme de l’élection qui
confie à un peuple cumulant les défauts le soin de désigner le premier d’entre
eux. La maturation évacue ce leurre d’une meilleure mécanique institutionnelle
au profit d’un réalisme initial.
Mardi 13 février
De retour à Lugdunum, après
deux denses journées de tourisme à Paris. Vagabondage sur les terres d’élection
de mes études juridico-littéraires. En ces temps studieux, je ne songeais guère
à profiter du quartier latin dans son débordement de vie estudiantine. De
l’ancienne à la Sorbonne nouvelle, je consacrais le strict nécessaire à la
prise du savoir délivré, sans prolongement humain. Sitôt achevées mes obligations
en amphi ou en salle, je filais vers mes lieux de recherches éditoriales :
bibliothèque nationale ou l’historique de Paris, au premier chef. Réfractaire
toujours pressé, j’ai sans doute hypothéqué d’innombrables instants de
complicité humaine d’où auraient peut-être émergé quelques contacts utiles pour
une suite carriériste.
De ces promenades, la trace
des années passées : une BN sans plus la bousculade à l’entrée de la
cathédralesque salle de lecture. Vide de tout, êtres et bouquins en symbiose,
depuis le transfert des fonds à la TGB Mitterrand. Quelques images surgissent
dans cette ambiance feutrée : mon premier contact avec la resplendissante
Shue (amie iranienne dont j’ai de moins en moins de nouvelles) en 1996, à la
recherche de références pour son mémoire et que j’ai gourmandement aidée ;
les joyeux échanges avec Nadette (perdue de vue) qui bûchait sur sa thèse dans
la salle des manuscrits…
En rapide panorama :
quelques pas en haut de l’Arc de triomphe pour laisser plonger son regard dans
les dessins géométriques des impériales avenues, sur les terrasses
paradisiaques ; descente au bras de ma belle des Champs Elysées pour se
croire emportés par quelque bourrasque qui nous surdimensionnerait ;
autre descente, recueillie celle-là, dans les labyrinthiques couloirs de la
crypte du Panthéon. Entre toutes les tombes, celle des Curies retient
l’attention émue par les multiples petits mots dans toutes les langues déposés
par les visiteurs…
Fin des réflexions sur le
système démocratique : se laisser convaincre par le pis-aller des discours,
jauger chacun sur la combinaison d’une audace porteuse d’espérance et de
réalisme gestionnaire évitant les déconvenues récurrentes. Les adaptations du
discours à l’estrade occupée, à l’auditoire courtisé.
Dimanche 18 février, 22h40
Fini la semaine de
délassement : une reprise chargée avec une majorité d’interventions pour
les Lieutenants.
Cette campagne électorale
laisse planer une curieuse atmosphère. Les ratés de Ségolène Royal en bisbille
avec la maison mère rue de Solférino et les pontes déchus lors des
primaires ; l’emballement dispendieux de Nicolas Sarkozy rappelé au
réalisme budgétaire par quelques membres de son équipe (Fillon suivra-t-il la
voie de Besson ?) ; la tentative bayrounienne de s’imposer
comme la seule alternance crédible avec sa tonalité révolutionnaire
centriste ; l’enjolivement du discours lepéniste pour atteindre la
respectabilité politique (merci à Marine et à l’essayiste… ami de Dieudonné !) ; l’agitation
parsemée des partis à la gauche du PS qui démontrent, une fois de plus, leur
incapacité à se rassembler pour peser : ce jeu d’ombres et de lumières
fascine, inquiète, rassure, tour à tour. A suivre…
Vendredi 23 février
Le néant argumentatif. La
dernière trouvaille de l’ex député poujadiste, « nier la valeur historique
du 11 septembre ». Cette pure
provocation saura séduire le simplisme si confortable des destinataires bien
ciblés. Ni plus, ni moins choquant que la ribambelle d’escrocs de la pensée qui
se sont essayés à la négation de la présence matérielle d’un avion écrasé dans
le Pentagone.
Depuis quand le critère de la
gravité d’un acte et sa résonance historique se limitent-ils à un décompte
macabre ?
Jeudi 8 mars, 23h30
Ma BB sur le pont des
urgences, moi la tête calée au fond du polochon, après une soirée vagabonde sur
le net avec en son de fond la prestation sarkozienne.
A la fin de ce mois, ma BB
aura quarante ans. Nous voilà engagés dans la seconde moitié de notre existence
que l’on espère la plus longue et douce. Tout cela défile et le tournis n’est
pas loin.
Croisé ce soir Elo sur
Msn : introspection poussée sur son profil psychologique, puis esquisse de
la mienne. Une maturité qui croît.
Mercredi 28 mars
Ma BB sortie avec ses
collègues de travail pour ses quarante ans, je me concentre sur la campagne.
L’insécurité, thème phare de
la présidentielle 2002, se réinviterait-elle dans le débat préélectoral ?
Hier, le scénario idéal pour déclencher les mêmes penchants idéologiques :
le contrôle musclé d’un délinquant en situation irrégulière, multirécidiviste,
et qui parvient à ameuter les branleurs et casseurs de tous acabits au sous-sol
de la gare du Nord. De là, un ballet d’hyper violence dans cet endroit
stratégique pour les transports dans Paris. L’occasion, pour le nouveau
ministre de l’Intérieur, de faire entendre sa spécificité comme rhétorique et
choix de vocabulaire. Une fermeté tout en souplesse terminologique. Pour le
reste, des réactions attendues, sans surprise. La bande de casseurs a, en tout
cas, réussi un bel exploit : rapporter à l’extrême droite quelques points
d’intention de vote.
Samedi 31 mars
L’élan vital, celui qui rend
plus prégnant l’absence de croyance en un être supérieur, définit-il notre
rapport complexifié, stratifié, au monde ? Les échanges combinant sans
artifice les sens et la raison enthousiasment par leur évidence.
A trop maîtriser, voire
censurer le contenu, ces pages s’affadissent. Le message philosophique pourrait
combler ces carences et permettre un champ plus universel, mais non moins
inscrit dans une expérience assumée.
Transposer pour évoquer, mais
jusqu’à quel point pour respecter toutes les parties et point fissurer l’accord
implicite. La liberté d’union des êtres s’assume dans l’infinie précaution de
ne pas blesser l’autre, de ne pas substituer à une apparente plénitude des
épisodes insoupçonnés, mais dans la logique d’un équilibre lentement édifié.
Vers Marseille, la dictature
syndicale sévit et prend en otage une commune, une région et, pourquoi pas, une
nation.
Lundi 2 avril, 23h20
Les Faites entrer l’accusé
s’appesantissent sur les disjonctages barbares de l’être humain. Ce
soir, visionnage de la première partie du massacre familial commis (très
probablement) par Dany Leprince. Echo morbide aux Roman, Allègre, Georges,
Heaulme et autres sanguinaires à la visée unique ou répétitive. Aucune
explication rationnelle possible : le point de rupture d’un être qui
déroule la mécanique meurtrière. A l’échelle d’un groupe, ou d’une population
entière, cela donne les Hutus contre les Tutsis.
Ce soir, dans C dans l’air,
le survolté J.-F. Kahn a souligné quelques incongruités dans certains arguments
de l’extrême gauche contre le drapeau national, notamment l’accusation de
connotation sanguinaire et/ou pétainiste dans ce symbole. Ne nous attardons
pas, évidemment, sur ce que peuvent bien traîner les symboles communistes,
trotskystes et ceux d’autres chapelles rouges… sang ! Indigne parti pris.
Mercredi 4 avril, 0h30
Frénésie de duplication :
le transfert de ma vidéothèque vers des DVD se poursuit à l’aune rétrécie des
journées.
Les débats de la campagne
s’enlisent…
Une lectrice passionnée par
mon Journal sur Blog propose de me
faire quelques suggestions pour de menues corrections.
Peut-on encore parler d’amitié
avec les Liselle, Shue, Aurélie… plus de nouvelles de leur part et mon peu
d’enclin à les relancer.
Vendredi 6 avril
Ce Shaeffer a un tracé
décidément trop fin…
Les mains endoloris par le
montage de l’écritoire, cadeau pour BB dimanche. Treize personnes invitées pour
ses quatre décennies cumulées.
Les médias semblent s’être
concertés pour ne pas monter en épingle ces violences policières, filmées par
un amateur, contre deux racailles. A l’inverse de 2002, l’insécurité
n’occupe pas les esprits malgré l’amorce d’émeute à la gare du Nord.
Responsabilisation, manipulation ? Pas sûr que cela suffise à émousser
l’audience de la droite extrême.
La Croix Rousse lyonnaise à
l’honneur sur la Une du Monde week-end : photo des quelques agités
qui ont dissuadé le candidat UMP de se rendre dans ce quartier pourtant loin de
la zone de non droit. Les hostilités…
Dimanche 15 avril
Singuliers instants d’un
printemps prometteur. Le vacarme électoral s’oublie avec les ondes ventées du
parc Tête d’Or. Partager les affections en respectant l’intégrité et les choix
de l’autre.
L’idéologie et les schémas
communs ne tiennent plus face à l’attraction d’une personnalité. Se
correspondre pour que l’approfondissement naturel irrigue l’autre. L’émotion
cultivée par une absence inexpliquée, tout en conservant la distance à
respecter.
Vu Staline, le tyran rouge
mis en scène pour une convivialité pédagogique, avec moult images d’archives
colorisées et musiques à effets émotionnels. Centré sur cette personnalité
versée dans l’autocratisme sanguinaire, le documentaire n’évoque pas le vice
intrinsèquement criminogène du communisme.
Trop dans la sérénité pour
être vraiment inspiré.
Lundi 16 avril, 22h30
Dernière semaine avant le
premier tour de ces présidentielles qui auront exacerbé les passions polémiques.
Entre la banalisation d’un Le Pen égrotant et la démonisation d’un
Sarkozy surchauffé, l’ambiance médiatico-politique ne laisse augurer aucune
sérénité pour le second tour.
Le 20 minutes, journal
gratuit distribué à Lyon, proposait une interview du candidat UMP. Pour
annoncer cet entretien, la une se charge d’une photo gros plan de l’intéressé
qui n’a pas dû le réjouir : un visage blafard, l’air patibulaire, des
lignes du visage déformées comme lorsque l’objectif est trop proche de la personne,
en somme rien d’un cliché qui donne envie. Et pour parachever la terreur que
peut inspirer la bouille mal photographiée de Sarkozy, un titre aux accents armagedoniens :
« un projet de civilisation », rien de moins que ça ! Et si la
surprise était l’élimination de Sarkozy au premier tour ? Si cette presse
un tantinet hypocrite (elle fait, en effet, figurer de magnifiques photos du
candidat, prises lors de l’entretien, dans les pages intérieures) voulait
obtenir ce résultat, elle ne s’y prendrait pas autrement…
Reste le fond des programmes
pour se décider, mais, en l’espèce, j’attends toujours que la Poste (qui se
revendique un service public vital) daigne me les livrer.
Mardi 17 avril
Les publics de resocialisation
que nous recevons sous l’appellation AOF présentent quelques énergumènes
rebutants, moulés par ce que je supporte le moins chez l’humanoïde :
irrespect, fainéantise, sentiment que tout leur est dû sans autre effort de
leur part. Un vrai cumul pour assimiler sans peine ces quelques cas à des
petites frappes à karchériser au plus vite. Rien que pour emmerder cette
révulsante racaille, l’irrépressible envie de voter à deux mains Sarkozy. Faire
s’effacer de leur sale trogne ce sourire imbu de crétins des cités.
À côté de ces cas, des
individus à l’âme de qualité, qu’on a envie de faire progresser, malgré les
faiblesses considérables.
Cqfd s’encombre des premiers
car ils génèrent des financements conséquents de la région.
Je n’ai pas la fibre
philanthropique qui m’insufflerait la foi dans l’intervention auprès de ces
publics. Des éducateurs spécialisés sembleraient davantage requis.
Aucune tolérance envers ceux
qui profitent des aides sociales (ici une formation financée) sans faire montre
d’une volonté minimale de progresser.
Lundi 23 avril, 22h50
Les analyses, les échanges et
les déclarations des candidats m’ont abreuvé toute la soirée d’hier. La mine
réjouie de quelques journalistes de télévision avant vingt heures et d’invités
à étiquettes UMP ou PS ne laissait planer quasiment aucun doute sur la
bipolarisation régénérée, même si Bayrou a fait naître, en puissance
électorale, une troisième voie crédible.
La mine déconfite du vieux Le
Pen et de quelques représentants d’extrême droite laisse augurer une nuit
des longs couteaux dans les instances dirigeantes.
Petite révolution culturelle
personnelle en participant à cette mobilisation civique, la plus forte pour un
premier tour depuis la première de la Ve, en 1965, avec le grand
Général mis en ballottage par le jeune Fanfan fringant. Une claque à mes
convictions en matière démocratique, que je ne renie en rien, mais que je
relativise au regard de la situation de nombre de pays privés de ce système, si
perfectible soit-il.
S’approprier un peu de cette
fiction citoyenne permet de ne pas sombrer dans le nihilisme stérile.
Mercredi 2 mai, 23h55
Dernier acte, et sans doute le
majeur, de ce second tour, le débat tant attendu a délivré l’opposition quasi
frontale de deux fortes personnalités. De longs et fastidieux passages sur les
sujets sociaux attendus par les électeurs, et quelques passages de vifs
échanges.
Sarkozy est parvenu à garder
son calme face à la colère entretenue de Royal. Un bilan en demi-teinte :
une candidate moins mécanique qu’attendu et un candidat moins percutant
qu’escompté. Performance réciproque neutralisée qui ne devrait pas bénéficier
plus à l’un qu’à l’autre.
A ce titre, le plan de Bayrou
devrait se réaliser… à lui d’animer la force principale de l’opposition.
Vendredi 4 mai
Pas à l’aise du tout à Arles,
pour ce séjour éclair. Hier soir, à plusieurs reprises, du TSS haineux qui
apparenteraient les stigmatisations de Le Pen à de l’humanisme bienveillant.
Plutôt que de contrecarrer avec, en ligne de mire, une rupture définitive de ma
part, j’ai adopté la posture du retrait intellectuel, de l’extrême distance
avec cette hystérie à la seule évocation du patronyme Sarkozy.
Je n’ai rien de l’adepte
inconditionnel du candidat UMP, mais j’exècre cette diabolisation par des
gauchistes prétendument généreux. Rien à foutre de leurs craintes : je
voterai Sarkozy. Comme ceux qui vont glisser dans l’urne un bulletin Royal pour
ne surtout pas voir accéder à l’Elysée Belzébuth-Sarkozy, j’apporterai ma voix
à ce démon incarné pour que le système démocratique (tant défendu par les anti-Sarkozy)
mouche leur morgue et accentue leur défiance. Peut-être même que certains
songeront à quitter le territoire : bon débarras !
Ils le prennent pour un
dangereux agité, je l’estime déterminé ; ils pointent son peu d’enclin
pour les libertés publiques et le pluralisme, j’y vois une affirmation des
devoirs de chacun et la netteté de ses convictions ; ils enragent contre
une rhétorique simplificatrice, je loue l’efficace clarté de son
discours ; ils vomissent l’homme politique, je conchie leur nausée.
Mardi 8 mai, 23h05
Quelques heures de sommeil
avant une reprise allégée. Les urnes ont imposé Sarkozy, mettant une belle
claque à tous ces anti primaires. Mais la générosité d’extrême gauche et les
parasites-casseurs qui s’y collent ne pouvaient admettre la voie démocratique :
violence, vandalisme, incendies. Le triptyque de la guérilla urbaine voudrait
s’opposer au choix majoritaire. Leurs seuls débordements justifient l’arrivée
de cette droite décomplexée. Certains nous prédisent une dérive autoritariste… subtile
connaissance des autocraties dans le monde.
Sarkozy prend quelques jours
de repos sur le yacht d’une relation richissime… et il devrait en avoir
honte ? Que ces petits commentateurs hurlent davantage pour l’utilisation
de l’argent public en dépenses somptuaires…
Tout cela laisse augurer un quinquennat pour
le moins tendu et une société mure pour toutes les explosions.
Vendredi 17 mai, 0h45
Fin du dîner partagé avec Louise
et Richard.
La passation des pouvoirs,
troisième du genre pour la Ve République, a bénéficié du souffle
nouveau d’une présidence en tension pour l’action et les réactions.
Reçu, cette semaine, un long
courriel d’un anonyme se présentant comme un professeur d’économie de 25 ans.
Attaque en règle contre mon néant de style, le contenu indigent de mon Journal
pamphlétaire puis réfractaire. Lâche indignité du piètre trépigneur !
Je lui ai retourné quelques lignes lapidaires laissant bien sentir le profond
mépris que m’inspirait sa démarche et sa personne.
Vu que Hermione a perdu son
article sur Wikipédia, car il s’assimilait trop à un panégyrique publicitaire.
Le tournis m’assomme…
impossible approfondissement.
23h20. Soirée avec ma BB,
l’écran habité par un chef d’œuvre de plus du prolifique Eastwood : Million
Dollar Baby. Tout en retenue, conduit vers l’inexorable de ce qu’on redoute
mais qui densifie l’émotion, servi par l’interprétation, l’incarnation
magistrale des trois personnages, ce film happe le meilleur en nous pour la
mise au fronton d’une belle, loyale, mais grognonne humanité. La jeune
boxeuse a compris l’essence de l’existence et ses valeurs cardinales. L’acte
d’amour euthanasique saisit aux tripes et au cœur.
Au même moment, le président
Sarkozy goûte sa deuxième courte nuit post-nomination. Une composition
gouvernementale suffisamment complexe et à facettes multiples pour combler la
manie de l’exégèse. La mauvaise foi des quelques représentants de l’opposition
ne parvient pas à contrebalancer les jolis coups de poker politique de la paire
complémentaire de l’exécutif. A suivre…
Samedi 18 mai
Tentative de balade dans les
monts du Lyonnais, après un déjeuner chez Les Touristes à Lyzoron.
Impossible de retrouver le bon chemin du départ. Après deux essais infructueux,
nous rentrons.
Les ministres vont monopoliser
les médias par un écho claironné de leurs initiatives, actions et
réformes : une façon de se bien faire voir par le président Sarkozy qui
sue à fond lors de ses joggings immortalisés, à l’échelle du temps médiatique.
Y a-t-il un semblant de fond,
de profondeur, de réelle volonté réformatrice dans toute cette mise en scène
quasi obsessionnelle du résultat médiatique escompté ? Osons l’espérer
encore un peu… en attendant les législatives…
Dimanche 27 mai
Vivoter, serait-ce finalement
ça mon lot, jusqu’à regretter la sous-exploitation des années consumées.
Dès que je me retrouve seul,
peu d’enclin pour explorer les voies créatives et me fixer d’enthousiasmants
objectifs. Rétréci sur des impératifs hormonaux, je m’enterre à doses
d’instants inutiles.
L’Allelujah de Jeff
Buckley a quelque chose de poignant dans l’âme.
Blog principal délaissé depuis
la fin des présidentielles. S’extraire du conditionnement médiatico-sarkozyste
pour méditer sur de plus nobles et fondamentaux thèmes.
Au Monde, Colombani vit
ses dernières semaines. L’ambiance de la rédaction doit ressembler à ma
morosité intérieure. La différence : je dois rester avec moi-même, malgré
la sévérité du désaveu.
Lundi 28 mai
9h30. Hier soir, appel
inattendu de Jim : avec Aurélia, ils attendent un bébé, quinze jours
qu’ils le savent. Heureuse nouvelle que notre tendre grand-mère n’aura pas eu
la joie de partager.
23h15. Etranges ballets des
partis, du gouvernement et des médias lors de cette campagne législative. Si la
majorité absolue n’échappera pas à l’UMP, l’agitation des officines
ministérielles laisse transparaître une fébrilité. Les chroniqueurs et
journalistes s’essayent déjà à trouver les failles et les contradictions du
nouveau pouvoir en place. Hystérie des exégètes de la vie politique
française : avant même l’installation de la nouvelle majorité législative,
on suspecte l’exécutif en rodage de tous les renoncements. Cirque indigeste des
plumes de la presse. Attendons un peu, que diable !
Idem pour les sondages qui
polluent et parasitent l’expression démocratique. Telle proposition est
désapprouvée par une majorité des Français selon tel sondage… alors que cela
figurait au programme de l’élu. Que faire ? Renoncer aux urnes ou se
torcher avec les Ipsos, SOFRES et autre BVA ?
Le rythme effréné de cet
univers médiatico-politique devrait m’incliner à écrire sur du plus
fondamental, du plus universel, du plus sensible… mais ai-je seulement le début
d’une inspiration pour cela ? Lire, à nouveau, plus d’ouvrages que de
presse, et le monde reprendra son épaisseur… Cette immédiateté éphémère
pervertit, déforme notre vision du monde. Voilà qui doit m’imprégner. Hauteur
et synthèse sur ce curieux panorama politique.
Ainsi le PS n’a pas modifié
d’un iota les vieux réflexes qui ont entraîné sa chute en 2002 ; les
Besancenot, Buffet et Laguiller toujours incapables d’entente pour peser un
tant soit peu ailleurs qu’avec les braillards grévistes sur l’asphalte. A
vomir !
Samedi 9 juin
Auto-inauguration des nouveaux
quais du Rhône. Lyon me va décidément si bien. Pris un vélo’v depuis la place
Rouget de Lisle pour ne plus quitter une piste cyclable protégée : longer
la nouvelle ligne de tramway Meyrieu-Part Dieu, passer devant la gare, border
le centre commercial, remonter la rue de La Part Dieu ombragée et plonger vers
ces quais verdoyants pour choisir un transat de bois avec vue apaisante sur le
Rhône. Au contraire de la Seine parisienne, notre fleuve se met à portée de vue
par sa largeur et le peu de distance qui le sépare du bord piétonnier :
une proximité et une dimension, d’une rive l’autre, qui favorise le prélassement
méditatif. A gauche le pont Lafayette et ses drapeaux flottants (les couleurs
de Lyon, la France et l’Union européenne dans un ballet improvisé), en face la
presqu’île et ses bâtisses d’un calme olympien, à droite la passerelle du
Collège et ses piétons baladeurs. Belle idée de rendre cet espace, jusqu’alors
voué à des enfilades d’automobiles garées, aux êtres non motorisés, détendus.
Le samedi, alors que le gros
du peuple se restaure ou fait ses achats, j’apprécie d’autant plus les pavés
non encombrés.
Tour d’horizon de l’actualité
sous l’astre brûlant. La représentation à Heiligendamm a donné lieu à toute la
frénésie médiatique inversement proportionnelle à l’efficacité retirable des
conciliabules. Certes la rencontre des dirigeants des plus grandes puissances
démocratiques (ou déclarées comme telles, selon les critères de la pureté poutinienne)
a le mérite de détendre quelques tensions accumulées ou affichées. Pour le
reste, jeux d’ombres à l’adresse des crédulités environnantes.
Baptême du feu diplomatique
pour un Sarkozy se voulant plus détendu, plus alerte et bien plus volontaire
que ses paires.
Mercredi 13 juin
Une vie cocoonée avec BB, sans
plus trop s’échiner au suivi relationnel en l’absence de répondant en face. La
distance géographique a suspendu ou rompu (l’avenir le précisera) les liens
avec les unes l’affadissement des rapports ou les trajectoires divergentes ont
étiolé ou empêché les entrevues avec les autres. Finalement, le néant a du
bon : il préserve le temps vagabond.
Sarkozy va décrocher une
écrasante majorité parlementaire, ce qui devrait me décider à aiguiser la plume
pour fustiger tout ce qui me heurterait.
Reconnaître ses talents
politique, stratégique et rhétorique ne doit pas brider son regard critique.
L’activisme à tout prix, tics comportementaux compris (tel le léger mouvement
d’épaule qui semble dire « c’est bien moi, là, le premier des
Français ! »), tout en s’échinant à jouer un coup d’avance pour
anticiper les attaques adverses, ne peut
empêcher dérives et trébuchages. La dynamique de conquête du pouvoir s’exerce
plus facilement que l’exercice gestionnaire et réformateur des rênes attrapées.
Mercredi 20 juin
22h43. Grosse vague d’éclairs
dans le ciel lyonnais et précipitations sonores qu ne parviendront pas à
rafraîchir l’atmosphère. La touffeur devient de plus en plus fréquente et
précoce les années passants : sans doute les premiers résultats de
l’alarmant (ou présenté comme tel) réchauffement climatique.
Parmi les publics pris en
charge par Cqfd, un groupe qui réunit des jeunes à socialiser et pour lesquels
un projet professionnel pourrait se dessiner. Autant les faiblesses
intellectuelles ne me gênent pas, autant la perversion délinquante me révulse. Dans
la deuxième session, un certain T.Y., crapule évidente, parasite inutile prêt à
vous refroidir dans le dos. Sa seule présence me hérisse. Son conseil de
discipline avait lieu ce matin, lequel devrait être suivi d’une exclusion
définitive. Bon débarras ! Certaines personnalités engendrent comme une
allergie existentielle et ne peuvent permettre aucune compassion. Presque
l’envie d’un enlisement terminal.
Samedi 23 juin
À l’une des terrasses bordant
le Rhône : quelques péniches s’y sont ancrées pour servir boissons et
boustifaille aux promeneurs en mal de farniente.
Je reviens du Palais Bondy où
Cécile M. a livré deux toiles pour l’exposition Figuration critique.
Ce matin, je lui
envoie un texto pour lui proposer qu’on déjeune ensemble. Elle m’appelle alors
que je suis encore aux Portes ouvertes de Cqfd, ce qui m’oblige à devoir
la recontacter. Messagerie branchée quelques minutes plus tard, je patiente
jusqu’à quinze heures, puis je me décide à me rendre au Palais Bondy pour,
peut-être, la rencontrer à l’improviste. Curieux hasard : au moment où
j’attache mon vélo, texto elliptique de CM : « En réunion avec
organisateurs » sous-entendant son indisponibilité pour une durée
indéterminée. J’en profite pour faire le tour de l’expo au pas de charge. Juste
avant mon départ, j’interroge quelques employés et un monsieur plus au courant,
peut-être bien un des organisateurs, m’assure qu’il ne l’a pas vue depuis le
début de l’exposition, et n’a été en contact qu’avec ses deux toiles. Je reste
sans voix.
Si, effectivement,
elle n’a pas mis le pied à Lyon, pourquoi ces inutiles mensonges ?
Déception humaine de plus.
Lundi 25 juin
Samedi, rapide entrevue avec
Cécile M., portée par sa réussite artistique. Un visage vieilli, mais une âme
pleine d’enthousiasme. Ses combats ont été acharnés pour parvenir à sa
position. Elle sera l’une des cinquante artistes européennes retenus par la
Chine pour produire un fonds de toiles pendant deux mois. L’un de ses deux
tableaux exposés au Palais Bondy à Lyon (La Cène) a été vendu dix mille euros
depuis longtemps.
De bien plus modestes atours
pour mon évolution professionnelle : appris
aujourd’hui l’attribution d’une prime de trois cents euros brut début juillet
et l’augmentation de cent dix euros brut à partir de septembre. Bien ridicule
situation d’employé moyen. Reste les avantages de proximité et d’entente avec
l’équipe.
Chiffres qui feraient mourir
de rire les jeunots qui ont participé à la foireuse (à moyen terme, mais
juteuse à long) aventure de la nouvelle économie. Un documentaire vivant,
réactif et légèrement ironique dépeint l’époque pionnière, l’engouement
disproportionné puis l’écroulement inopiné. Périodiquement, l’histoire humaine
offre ces instants d’enthousiasme pour une féerique avancée de la modernité
suivis d’un rééquilibrage brutal et purgatif de ce gonflement. Les débuts de l’électricité
ont ainsi connu le même phénomène.
Samedi 30 juin, 0h30
Une moitié d’année épuisée.
Nouvelle voiture pour ma BB (et accessoirement moi) : une Grande Punto
aux lignes fluides et au confort appréciable.
Vu ce soir le long, et parfois
alambiqué, documentaire sur la trajectoire singulière et controversée de
l’avocat Jacques Vergès. Son engagement à défendre ce qui incarne le pire pour
la plupart, répond à un profond sentiment de devoir se ranger aux côtés de ceux
qu’il perçoit comme les opprimés d’une époque, même si eux-mêmes ont été les
oppresseurs à une autre période. Quoiqu’on pense du personnage, sa
détermination force le respect.
Oublié de noter mon entrevue,
le week-end dernier, avec l’artiste peintre Cécile M., non croisée depuis 1987…
vingt ans déjà ! Elle semble épanouie et fière de son parcours qui lui
permet aujourd’hui de vivre largement de la vente de ses toiles.
Vendredi 6 juillet
22h35. Les sonorités
médiévales de Sting enluthé accompagnent cette fin de soirée au Cellier.
Voyage dans la Grande Punto avec le sentiment enjoué de posséder une
nouvelle monture plus esthétique, plus puissante, plus confortable… Vrai
gamin incohérent avec lui-même. Mes dénonciations vitriolées de l’univers automobile
n’ont pas empêché cette vague instinctive du paraître qui me submerge au-delà
de toute considération intellectualisée.
Retrouvailles des parents B,
de la sœur et de sa petite particulièrement bruyante en cris éperdus ce soir. A
chaque fois me revient le regard misanthrope de Léautaud. Comme un élan
allergique d’instinct. Pas humainement correct mais [illisible]
présent.
Sans doute quelques dosages
alcoolisés de trop pour ma carcasse voyagée, je laisse venir les grognes et
impressions sans retenue… Faut-il forcément associer qualité et
anticipation ? Là c’est du couillon… La létalité de mes scribouillages
doit m’alerter sur l’utilité de mes piètres réflexions. Pendant ce temps le
sobre Sarkozy savoure l’objectif atteint et peaufine les séductions
machiavéliques distillées. Du grand art au regard duquel le dégingandé de
Villepin fait figure de trisomique politique.
Samedi 7 juillet, 0h05
Journée grisaille qui n’a pas
obéré les diverses activités : une matinée à Saint-Denis la Chevasse pour
aider Emma et François à débarrasser quelques gravas. Enorme boulot réalisé
dans leur demeure, mais encore en cours pour l’essentiel : mur abattu pour
obtenir une pièce gigantesque au rez-de-chaussée, électricité refaite, cuisine
aménagée… Un vaste nid se dessine au sein de cette Vendée profonde. La localité
affichait une prestigieuse, et sans doute impressionnante, manifestation :
course effrénée de Solex déchaînés. Du rural jusqu’au bout des mottes !
Après-midi studieuse à saisir
l’année 2003 de mon Journal sur un portable surchauffé, celui dont se
servait Shue (dont je n’ai plus de nouvelles) en 1996 pour consigner ses
recherches irriguant son mémoire de didactologie linguistique. Un matériel qui
parvient difficilement aux deux gigas de puissance alors que la clé USB de
quelques grammes que je branche dans la Punto Grande cumule huit gigas…
Technologie, quand tu nous donnes le vertige…
La petite Ilya de Louise, à
quelque quatre mois, transmet souvent ses besoins à travers des cris et pleurs
d’une intensité redoutable. Je reste admiratif face au calme affiché de sa mère
et de la famille B en général. Je ne dois pas fonctionner de si sereine façon…
Lundi 9 juillet
La grisaille favorise les
choses de l’esprit en ce début de pause estivale.
Achevé le premier des six
ouvrages en cours depuis quelques mois (quelques années pour certains). Le
Boncenne sur Jean-François Revel m’a éclairé sur le parcours intellectuel de ce
réfractaire par excellence. Toujours à contre-courant du bon pensé ambiant, il
n’a jamais sacrifié ses convictions sur l’autel du carriérisme. Admiration et
considération pour cet esprit libre qui, pourtant, présente une trajectoire
idéologique opposée à la mienne et affiche des défiances susceptibles de me
braquer.
Marqué à gauche dans ses
première réflexions sur le monde, il affûte ses piques contre le de Gaulle de
la Ve, en osmose avec le Mitterrand d’alors qu’il stigmatisera tant
lors de sa monarchie républicaine.
De Gaulle n’avait, bien sûr,
rien de l’enfant de cœur, mais quel dirigeant peut se priver des armes
cyniques, du pragmatisme cruel et de l’impitoyable manipulation qu’exige
l’exercice pérenne du pouvoir, sauf à calquer les séniles fanfaronnades d’un
Deschanel en perdition. La crédibilité d’un chef d’Etat tient surtout à son
extrême conscience des intérêts du pays dont il a la charge et à sa capacité
d’agir pour les servir au mieux. Et ça, de Gaulle les réunissait plus que tout
autre.
Revel se complaisait, pour
quelques cortex embrumés par le consensus rassurant, dans la stérile posture du
polémiste, voire – quelle abjection ! – du pamphlétaire. Voilà l’infâme
étiquette avancée. La molle inconstance d’un Roger-Pol Droit souligne cette
tare littéraire de l’essayiste musclé, niant ainsi, du haut de son
« particulaire » magistère, les plus considérables plumes hexagonales
qui ont magistralement vitriolé leurs propos pour rendre consistant leur
argumentation. Les Pascal, Voltaire, Diderot et Hugo, par exemple, que Revel
publiera dans sa collection Libertés. La grandeur d’être de Revel, ses
lumineux raisonnements, la fluidité implacable d’une écriture rayonnante :
panégyrique assumé, proclamé, hurlé à la communauté humaine pour qu’elle laisse
émerger davantage de ces consciences insoumises. Notre époque affadie en a tant
besoin !
Mardi 10 juillet
« Petit mais
costaud », « l’homme qui convainc plus vite que son
ombre » : les détournements de formules de notre base culturelle
pourraient se multiplier pour désigner, de laudative façon, le président
Sarkozy. La tendance populo-gauchiste étant de critiquer, souvent avec le
simplisme discriminatoire des mauvais perdants, mon instinct réfractaire à
cette frange pseudo généreuse m’incline à l’observation bienveillante d’une
présidence débutée sans temps mort. « Omniprésident » ironise
François Hollande, jubilant de sa trouvaille, oubliant un court instant le
champ de ruines qu’il secrétarise comme charcutier en chef de la farce
socialiste, Sert-à-rien général du parti des sots en lice pour… 2012.
L’épreuve européenne a été
magistralement abordée : là où les fossoyeurs de la Constitution se sont
vautrés dans l’inconsistance programmatique, chacun ne pouvant se projeter
au-delà de sa mini chapelle, trahissant tous leurs engagements de constituer
une force cohérente et refondatrice des priorités européennes, Sarkozy a
emporté l’adhésion des plus sceptiques pour un traité simplifié qui devrait
permettre le fonctionnement institutionnel à vingt-sept, malheureusement pas
pleinement avant 2014. Les humeurs nonistes des Français puis des Néerlandais
auront coûté dix ans à la constitution européenne. Triste ironie pour ceux, à
gauche, qui ont bavé victoire au soir du Non français : les trois quarts
de la Constitution restent de fait en application puisque ce n’était que la
synthèse des traités antérieurs toujours valides ; l’essentiel de la
partie institutionnelle est repris par le traité simplifié lequel sera ratifié
par voie parlementaire ; seule la Charte des droits fondamentaux
(d’inspiration française dans sa tonalité et sa philosophie), refusée par les
autorités britanniques saisissant cette nouvelle opportunité de se distinguer,
aura été la victime complète des Fabius, Le Pen, Besancenot, de Villiers et
Laguiller. Belle réussite que d’avoir permis à la Grande Bretagne de poursuivre
son hyper libéralisme dans ses recherches scientifiques. L’insane Emmanuelli et
son patibulaire compère Mélenchon peuvent se réjouir : le droit à
l’avortement ne sera plus mis en péril par le « droit à la vie » que
consacrait cette maudite Charte pour, en fait, rendre impossible le retour de
la peine de mort.
Certains chroniqueurs
prévoyaient déjà la première défaite de Sarkozy sur la scène européenne à
l’occasion de la réunion de l’Eurogroup. Raté, les ombrageux ! En quarante
minutes, il a su argumenter pour la perspective d’un assainissement des
finances à l’horizon 2012 (et plus 2010). Jean-Claude Juncker, qu’on ne peut
soupçonner de connivences mal placées avec le président français lui a délivré
un inespéré satisfecit. On devrait faire la fine bouche simplement parce que
les amers de gauche lui prêtent toutes les dérives autoritaires ?
Laisser la présidence de la
commission des finances de l’Assemblée nationale à l’opposition, choisir
Bernard Kouchner pour un ministère régalien, soutenir la candidature de
Strauss-Kahn à la présidence du FMI témoignent peut-être d’un machiavélisme
hors norme (Mitterrand ferait presque figure d’amateur : cette perte de
magistère amoral chiffonnerait-elle les socialistes !), mais sûrement pas
d’un apprenti fasciste.
Le temps des critiques
crédibles viendra, mais à force de s’épuiser à l’anti-sarkozysme primaire, les
agités de la gauche démontrent leur triste immaturité à assumer une digne
opposition, situation politique qu’ils auraient pourtant eu tout le loisir
d’expérimenter, de maîtriser et d’affiner : trente-cinq années sur le
bientôt demi siècle de la Ve République. En l’espèce, l’expérience ne sert que le pire.
Hier, visite du
château des ducs de Bretagne, belle bâtisse dans laquelle devraient se réfugier
tous les hurleurs à la dérive autoritaire du pouvoir à la sauce Sarkozy… Tous
aux oubliettes, qu’on en finisse !
Mercredi 11 juillet
La grisaille toujours
d’actualité sur Le Cellier, je me centre sur la saisie de mon Journal
(l’année 2004 commencée ce matin) et la lecture d’ouvrages en cours.
Timour
Serguei Bogousslavski et sa Morue
de Brixton m’offrent quelques plaisirs
stylistiques. Ce récit d’une vie mouvementée, en rupture avec une société
saisie au scalpel, pourrait m’inciter à convertir mon témoignage chronologique
en cohérence littéraire. Pas encore mûr pour cela. La distance temporelle fera
peut-être émerger des détails et affûtera mes propos comme ceux de ce « jeune
écrivain de quatre-vingt-quatre ans » en 1998, ainsi que l’annonce la quatrième
de couverture de ce pavé aux joyaux incisifs.
A
l’avenant : « l’Auriol frottait le trône de son cul social, et j’eus plaisir à
me souvenir d’avoir, par élan poétique et mépris d’aristo, pissé, à Alger, dans
le tiroir de son bureau ».
Pour souligner l’abjection du corps judiciaire faisandé, une charge
pamphlétaire du plus bel effet : « Conscient de l’aspect terrifiant et funèbre
de son rôle, monsieur le procureur vêtait de noir sa viande que l’on devinait
molle sur des os pleins d’orgueil. Après avoir servi le Pétain et sa bande et
croqué quelques juifs, il ne rougissait pas d’avoir pendu au mur le noble et
fier tarin du général de Gaulle, et il demeurait blême. »
Et
comme une implacable généralisation : « Dans le soupir j’appréciai l’esthétique
nette et sure de l’état fonctionnaire : un peu de blé dans le goulot et le
pantin fonctionne. »
Lucidité
inaltérable : « les crimes, les iniquités, les corruptions étant inséparables
de l’action politique, seuls les hommes définis par ces actes ambitionnent de
s’y adonner et y réussissent. Le tour de leur monde est vite fait, bien qu’il
soit sans limites dans ses turpitudes. » Le pauvre Bayrou devrait donc
abandonner toute prétention au trône…
Sartre à la fête : Revel l’avait épinglé, Bogousslavski le cloue au pilori. «
(…) ce Sartre, animal doté d’un machin mental rare, de talent, et pourtant avec
ça nullité spirituelle éclatante. A propos de cet agité, dont l’encre racole
encore les amants clopinants de la pensée bancale, il est bon, pour lui donner
sa place sur l’échelle de l’esprit, de tirer de l’oubli qu’il fit imprimer et
coller sur les murs de Paris la cafetière salvatrice du général de Gaulle
pourvue des moustaches d’Hitler… Qu’il y ait parmi les clercs un nombre plus
élevé de sots tordus qu’en d’autres espèces devrait être un sujet d’études.
Mon
oncle, coco déclaré et sartrien de fait, avait représenté un de mes grands
cousins en cafetière moustachue… une référence indécelable, jusqu’à
aujourd’hui, pour le pékin inculte que je suis ! Ce grand cousin, plutôt marqué
à droite, s’est fait croquer par l’oncle sans pouvoir imaginer l’attaque
clandestine dont il faisait l’objet sous couvert de production affective.
Même
le gaulliste Malraux s’en prend une décapante ration : « Ce désir insatisfait
m’inspirait devant le faux, le clinquant sottement admiré, et d’abord celui,
fleuve, de la tronche à malices et à tics de Malraux, champion incontestable de
la frime intellectuelle bien nourrie de bouillie savante. (…) Il me faisait
penser à un mérou nerveux, gonflé de verbe[s] creux. »
Le
pamphlétaire eut aussi ses admirations : Cocteau, Picasso, Fernand Léger…
Quelques trouvailles à encadrer : « Je n’aimais pas me lever tôt, les matins de
la capitale puaient la sueur des pauvres et les pets des ambitieux… » ; « Le
touriste, cette ordure animée qui salit la Terre de ses pas afin de fuir son
vide et prendre des photos pour montrer à d’autres idiots ce qu’il n’eut pas le
temps de voir, est la lèpre du siècle… » Je me fais du mal là…
Et
les jockeys, qui eût pensé à les assaisonner : ils « avaient l’air de petits
chimpanzés habillés. Ils faisaient jeu de cirque avec leurs culs menus [pluriel
curieux], bien trop pour leurs culottes, leurs pattes un peu trop grêles et pas
racées du tout à côté de celles des bourrins, leurs blouses de carnaval, leur
barda sous le bras pour aller se faire peser comme des poulets ou du fromage
sur les marchés. »
Identité
de perception via les redoutées cours de récréation : « J’avais en horreur les
braillards de mon âge, vulgaires et sots pour la plupart, bêtement brutaux et
bruyants. » Tout ce qui emplit les stades à l’âge adulte, tardant à s’entasser
dans les fosses très communes.
L’art de la description, il s’y adonne jusqu’au jubilatoire : « De sa vaste
personne émanait une odeur légère de friture qui semblait donner la nausée à un
grand Jésus crucifié, juste derrière lui sur le mur. » Un régal !
Aphorisme
déniché : « Croire est le contraire de savoir, c’est le fourbi de la pensée
arrangée en blindé aveugle. »
Terrible
évidence assénée sur la piètre nature humaine : « Peu d’hommes sont capables de
véritable errance, de marcher sur les chemins ultimes de la liberté où nul abri
ni gamelle ne sont assurés au bout de la route et de la journée… »
Une
autre, en telle symbiose avec mes convictions que je la surécris : « (…) je
méprisais la foule, ses basses convictions et leur inévitable crotte : le
fanatisme. Semblable au temps ou à la vie, le mépris est irréversible. Tendre
la main à un homme, oui et toujours, aux hommes non, et à jamais. »
Enfin,
instant d’une nostalgie pour mes fosses de l’irréalisé : « Souvent je songe aux
destins à jamais inconnus de ces êtres à peine entrevus et qui pourtant
demeurent en moi gravés, et je reçois d’eux la tristesse de n’avoir pu ni su
les accompagner, peut-être les aimer, les aider sur l’horrible chemin de jours
que toute vie finalement se révèle… » Piocher ça et là dans cette fresque
humaine tourneboulante. A lire d’urgence donc.
Jeudi 12 juillet
‘Tite balade à
vélo sur les bords de la Loire avec ma BB, entre le Cellier et Thouaré.
Goûter à la première après-midi aux consonances un peu estivales. Bords bien
plus sauvages que pour le Rhône, les couleurs ondulent par la danse du vent.
Dualité paisible qui se laisse porter par ces moments d’évidente harmonie.
Ambiance Tontons
flingueurs grinçants dans le groupe parlementaire socialiste de l’Assemblée
nationale. Le Sert-à-rien général Hollande
est fidèlement relayé à la Chambre des députés par l’Ayatollah Ayrault, digne
héritier du terrorisant Carrier. N’admettant pas que l’un des piliers du PS,
Jack Lang, puisse répondre à l’invitation du président Sarkozy d’intégrer une
commission de réflexion sur la réforme des institutions, il le menace d’une
exclusion du groupe. Le Sert-à-rien
Hollande ne désavoue pas, Jack Lang s’irrite et quitte ses fonctions au bureau
national du parti, restant simple militant, comme Jospin.
Le grand chantier
de la refondation idéologique s’annonce périlleux pour les esprits libres. PS,
parti stalinien ? On eût apprécié une identique sévérité à l’égard des
Fabius, Emmanuelli et Mélenchon lorsque, contre l’avis des militants, ils ont
poursuivi leur campagne destructrice du traité constitutionnel. Là, la faute
lourde existait, la déloyauté pendable fanfaronnait, et ce quel que soit les
résultats du référendum (vire-t-on de leur poste tous les perdants aux
élections qui ont respecté la ligne idéologique de leur parti ?).
Sarkozy va
certainement trébucher, décevoir, déchanter face aux réalités multiples qui
s’imposent, mais la gauche française n’est pas prête de retrouver les ors
élyséens tant que, en interne, elle fera montre d’une telle immaturité, d’un
tel ostracisme ringard.
Vendredi 13 juillet
Du bleu d’été au
ciel, enfin ! Notre dépendance cromagnonne au climat s’accentue avec
l’obsession d’une mise à profit maximale de la période ludique octroyée.
Affligeant, mais humain.
Apéritif dînatoire
chez Laure
et Daniel. Gentil moment pour des échanges sans
importance. Leurs enfants poussent, bien sûr : Erwan, petit jeune homme sérieux, fin d’esprit, longiligne de
corps, témoigne de son attachement à l’environnement et de sa
responsabilisation comportementale ; Lina,
à trois ans, avec sa bouille de chipie charmeuse et ses longues couettes
blondes, a tout le potentiel de l’espiègle attachante.
Parangon de
l’ordure politique qui exploite sans état d’âme les faiblesses occidentales, Kadhafi
va parvenir à ne pas débourser un sou pour dédommager les familles de victimes
de son attentat aérien. En faisant accuser et condamner à mort des infirmières
bulgares (donc de citoyenneté européenne) pour empoisonnement au Sida de
plusieurs centaines d’enfants libyens, alors que la seule cause crédible pour
le professeur Montagnier (et des dizaines de scientifiques) est l’insalubrité
criminelle du système hospitalier, la raclure Kadhafi a forcé la porte d’une
ignoble négociation financière avec l’Union européenne. Leurs têtes (et celle
du médecin palestinien) contre une somme équivalant à celle qu’il aurait dû
débourser pour les familles victimes du détritus terroriste enturbanné. La
transitivité écœure : c’est nous, les contribuables européens, qui
finançons de fait la salauderie assassine de Kadhafi la chiasse. Et le pompon
institutionnel est délivré par le nauséeux Machin, l’Ordre des Nuisibles
Usurpateurs : par un impénétrable mécanisme du fonctionnement interne, la
Libye, et donc le bandit patibulaire jouisseur d’atrocités, se retrouve à présider
la Commission internationale des droits de l’homme ! Comme le rappelle
l’esprit éclairé : ne reste plus qu’à se croiser les bras et à sourire de
désespoir à la face du monde.
Dimanche 15 juillet
Arrivés hier à
Tréogat, bien à l’écart du village, dans une charmante bâtisse aux murs anciens
aménagée pour le séjour des touristes : en face la demeure des
propriétaires qui nous font découvrir les espaces confortable du lieu. Chacun
ses appartements, chambre et salle de bain, ce qui nous laisse entrevoir une
liberté totale dans nos intimités respectives.
Très vite, le
défaut majeur de la maison : l’absence totale d’insonorisation entre les
deux étages. Tout entendre du couple voisin : voilà qui va nous
contraindre à une sagesse respectueuse des autres par propre sentiment pudique.
Et le gris
pluvieux règne toujours… bénéfique pour les plongées livresques et
scripturales.
Mardi 17 juillet
Un trio de couples
qui s’entend pour faire de ces journées de vacances de sincères moments joyeux,
ludiques, dans une improvisation fluctuante.
De Tréogat à
Plonéour Lanvern en vélo : la balade prévue est annulée suite à une pédale
défaillante du vélo d’Aurélia. Arrêt à un petit restaurant bordant la
départementale qui, pour dix euros par tête, vous propose deux entrées (dont
une macédoine maison à se régaler), une viande ou un poisson (dont le
nom m’échappe, mais qui nous éloigne du sempiternel cabillaud), un dessert et
un café avec eau en bouteille et vin en carafe. Incroyable rapport
qualité-prix. L’apparente gargote bretonne présente un intérieur décoré avec
goût, originalité, voire une ébauche d’avant-gardisme pour un tel lieu
(peintures d’art abstrait au mur).
Le soir, dans le jardin
privatif du logis, autour de l’incontournable apéritif, la discussion arrive
sur Heïm et ses dérives, ses excès, ses actes impardonnables. Je tente de
m’improviser avocat pondérateur face à maman déchaînée et à Jim remonté. Ce qui
peut se qualifier de pédophilie d’abord : rapports sexuels entretenus avec
Béatrice, fille de Maddy qu’il avait adoptée, et avec sa fille biologique
Alice. Pour le reste, plus de flou. Je n’ai pas évoqué mon propre cas, que je
garde pour un témoignage ultérieur.
Maman rappelle l’événement qui
lui a fait prendre conscience du grand tricheur-manipulateur qu’est Heïm :
aux jeux organisés pour Pâques, avec gros lot pour le vainqueur. À la dernière
épreuve (tondre le plus rapidement possible une parcelle de pelouse de la
pommeraie) j’arrive en tête, mais Heïm, dans sa souveraine et inique décision,
pénalise ma performance pour un vaseux motif de bouchon d’essence non remis
(oubli créé de toute pièce, sans doute) ce qui permet de déclarer vainqueur sa
fille Hermione. Une démarche bien méprisable pour un adulte qui se prétendait
exemplaire patriarche d’une mesnie toute à sa dévotion.
À force d’avoir cumulé ces
malhonnêtetés, ces tromperies, ces manipulations à l’égard de ses propres
enfants (ou de ceux qu’il prétendait considérer comme tels) il ne restera de sa
vie familiale qu’un vertigineux échec.
Mercredi 18 juillet
De retour d’une
plage vaste, presque déserte et agrémentée de vagues défoulatoires comme
je n’en avais pas vu depuis la Pointe espagnole, vers Royan. Du festif
sportif qui nous a sainement épuisé.
Une cure
d’actualité qui favorise la lecture (enfin achevée hier soir La Morue de
Brixton et en passe de finir l’essai d’Umberto Eco) et la saisie de mon Journal
(année 2005 entamée).
Jeudi 19 juillet
Vers 13h30. De
retour d’une splendide pérégrination de vingt-deux kilomètres à vélo :
plage immense et déserte sous nos pneus, quelques sombres vestiges de
l’installation nazie qui s’enfoncent au fil du temps, comme avalés par le sable
glouton. Retour par les terres sauvages du littoral en suivant dans
l’improvisation quelques ébauches de sentiers cahoteux. Un régal pour les
mollets, une plénitude pour l’âme.
Hier soir, juste
avant l’apéritif, grande et belle émotion en écoutant la bouleversante chanson
écrite et composée par Jim en souvenir de grand-mère. Avec des tournures
simples et densément suggestives, puisées dans ses multiples moments partagés
avec notre chère disparue, il évoque par petites touches sensibles le monde
fontésol et l’affection profonde cultivée. Maman se laisse submerger par
l’instant pur, Jim ne pourra empêcher quelques larmes de se mêler aux douces
notes de cet hommage mélodieux.
Du joyeux, pour la
suite de soirée avec la découverte, pour moi, d’une conviviale Fest’noz à
Penmarc’h. L’univers breton aux pieds aériens pour des danses en groupe, les
participants reliés, le plus souvent, par les auriculaires. De l’authentique
bon enfant où les novices se mêlent aux experts en rythmiques locales.
De plus en plus
coupé de l’actualité, pour une dizaine de jours encore…
Vendredi 20 juillet
Fourbu, flapi,
vanné ! Trente-cinq kilomètres d’un tracé chargé en montées interminables.
Hier, en voulant
acheter une carte postale pour l’équipe de Cqfd, je tombe sur le portrait en
gros plan du désormais ancien président de la République surmonté d’un titre
que l’on attendait « M. Chirac entendu par un juge ». Je n’ai pu
résister à l’achat du Monde. Ligne de défense classique : des
pratiques dans un contexte législatif inexistant puis incomplet jusqu’en 1995,
une nécessité de trouver des moyens de financement pour faire fonctionner la
démocratie, aucun enrichissement personnel.
Alain Juppé ayant
été condamné pour une des affaires visant aussi Chirac, il serait inique que
son supérieur d’alors ne prenne pas au moins l’équivalent. Voyons ce que la
Justice a dans le falzar !
Lundi 23 juillet
Hier, clôture du
festival de Cornouaille sous un ciel contrasté. Défilé coloré et sonore :
les costumes de quarante coins de Bretagne et les entraînants, mais pas
débridés, airs au biniou et à la bombarde.
Déambulation à
travers les rues de la spacieuse Quimper en quête d’une crêperie, puis, au vu,
des établissements complets ou fermés se succédant, simplement d’un lieu où
manger : finalement une crêperie (de bonne facture) nous ouvrira sa
terrasse déjà bien achalandée.
Passage au musée
breton : les collections permanentes pour nous deux, l’exposition La
Bretagne de Buffet (sous haute surveillance, paraît-il) pour les deux
autres duos.
Depuis deux jours,
je traîne rhume envahissant et toux raclante ; les efforts soutenus et
prolongés des muscles des cuisses et mollets se font sentir à chaque mouvement anodin
des jambes.
Du vélo pratiqué
sans dopage, si rare dans les milieux du Tour. Appris que le média télévisé
allemand, se chargeant de la retransmission de l’événement sportif hexagonal de
l’été, avait décidé l’interruption à la suite d’un nouveau résultat de
tricherie à la testostérone pour l’un des membres de l’équipe T-Mobile. Les
écuries d’Augias du Tour sont encore loin du reluisant intérieur.
Repris Plateforme
de Houellebecq (quatrième ouvrage à achever pendant ces vacances) : des
passages troublants sur les rapports humains dans lesquels je me reconnais
profondément. L’expérience résonne en écho à la crudité des déclarations de
certains personnages ou à l’analyse du narrateur. Bien plus qu’un anodin roman
que j’aurais bien vite laissé choir. Il me faudra y revenir pour exposer et
approfondir les identifications perçues.
Jeudi 26 juillet
Dernier vrai jour
de vacances avant le retour via Le Cellier et un dimanche de remise en
condition pour la rentrée professionnelle.
Le gris du jour
s’apparente à celui d’hier, crachin breton en moins, pour l’instant. Ces
conditions anti-estivales ne nous ont pas empêchés une promenade en vélo vers
la pointe de la Torche, eldorado pour les surfeurs locaux.
Soirée sous le
signe de la succulence culinaire : Les Ondines à Saint-Guénolé ont
exalté nos sens. Pour moi : alliance de ris de veau et de queues
d’écrevisses pour commencer, panaché de poissons au beurre blanc pour continuer
et soupe de truffes pour achever.
Pour ces dernières
heures, virée avec ma BB à Concarneau, notamment.
Dimanche 29 juillet, 22h20
Extinction précoce
des feux pour retrouver la route professionnelle dès demain matin, malgré un
emploi du temps léger. Août sera centré sur les deux groupes de socialisation,
pas le plus excitant pour le contenu et le type d’auditeurs… de l’alimentaire,
en somme, que je dois assurer à défaut d’autres ressources.
Ma BB souffre de
points très douloureux dans le dos depuis nos promenades frénétiques à vélo
dans le Finistère. Une douleur telle, la nuit dernière, que la nuit s’est
entachée de vagues de larmes qui m’ont touché et désemparé.
Le vélo révoltant,
pour le Tour 2007, dont je n’avais pas suivi la succession de triches dopées
découvertes. Bilalian, le chef du service des sports de France Télévision, n’a
pas manqué de rappeler les exigences, utopiques, de ce sport. A voir ces
coureurs batailler sur les Champs Elysées, on ne pouvait douter de
l’irrésistible attrait, pour une part d’entre eux, de se dispenser de l’éthique
pour tenter l’aventure interlope et nocive. Le Tour a d’ailleurs consacré un maillot
jaune non exempt de soupçons. Réalité et rumeurs alourdiront encore pour des
années les férus de la pédale.
Pour de Villepin,
la brasse coulée prend des allures de noyade programmée, à la façon d’un Juppé
chevelu, chevaleresque, mais lui aussi victime de l’insubmersible Chirac.
Vendredi 3 août
Ambiance des grands départs et des nostalgiques
retours gare de La Part Dieu : quai bondé et un train pour Bordeaux pris
d’assaut et ne suffisant pas à la foultitude, changement de quai pour celui qui
devait lui succéder et que je vais investir sans ma BB qui entame ses trois
jours de labeur.
Destination Vesoul via Besançon pour un samedi
dédié au kayak chez Sarah : Karl sera absent (séparés, ils sont restés
bons amis) pour cause de farniente corse. Je partagerai ce sport estival avec
quelques amis de la jeune femme.
Comme lecture de voyage (huit heures de train
cumulées pour cet aller-retour), j’ai repris dans ma bibliothèque le …vous avez dit Serrault ? qui s’y serrait depuis quelques années et que les
ouvrages en cours m’inclinaient à ne pas ajouter.
La mort de l’attachant comédien et, très
secondairement, mon achèvement de quatre titres au cours des vacances, m’a
affectivement conduit à plonger dans son autobiographie. De sa turbulence
enfantine, il fit une générosité joyeuse de l’interprétation.
14h25. Appel de Sarah m’indiquant qu’un de ses amis
était bloqué du dos et ne pouvait donc pas venir avec sa
compagne. En filigrane je décèle une annulation totale du séjour ! Me
voilà en route vers Besançon, avec des billets en tarif séjour non
remboursables, et menacé de devoir rejoindre mes pénates de façon prématurée.
Curieuse arithmétique : nous devions être sept. Deux absents, reste cinq,
égal zéro ! J’attends son appel pour décision finale.
18h05 Et voilà, départ de Besançon pour retour au
bercail ! Grisant week-end amorcé. Je n’en veux point à Sarah victime de
ses amis lâcheurs (deux vagues d’annulation dont la dernière ce jour à 13h). Je
n’allais pas lui demander de rejoindre Villers, depuis Strasbourg, avec son
petit ami (un certain J-F) pour une villégiature expresse à trois vide de sens.
Je risque, tout de même, de développer une méfiance
accrue envers ce genre de projet festif.
Retour chez le bon Serrault et sa pétillante
existence au gré des représentations, sketches et tournages. Occasion de
retrouver la si attachante galerie des acteurs et comédiens comiques, ceux qui
ont distrait mes sombres années tiraillées. Leurs films me dispensaient d’une
quelconque prise de psychotropes : les 90 ou 120 minutes de baume dopant
suffisaient pour se colleter aux tracas quotidiens et aux trognes persistantes.
L’implacable bonhomie de Blier, l’indomptable furie de Louis de Funès, les envolées
foudroyantes de Francis Blanche, la frénésie inventive de Darry Cowl, la
victimisation rigolarde de Carmet, les bougonnements ravageurs de Jean Yann,
les sursauts pétaradants de Prévost et, bien sûr, la maximalisation géniale du
pince-sans-rire de Poiret : univers revigorant du plus attachant et
déconneur de tous, l’ami Serrault, ange rieur de l’humanité.
Dimanche 12 août, 22h50
Malgré le temps incertain,
décision de goûter à la marche bucolique avec ma BB dans les environs de
Tarare. Une montée costaude pour amorcer le parcours : le cœur s’emballe
vite et je laisse ma douce prendre quelque avance que je grignote dès
l’horizontalité retrouvée. Une nature verte et des sols gorgés d’eau témoignent
de l’été non conventionnel qui s’impose.
Eu quelques nouvelles d’Elo
par Msn ce soir : nouvelle coupe qui lui sied à merveille, une histoire
qui s’affirme avec son Julio et une reprise du pinceau avec quelques toiles
colorées en sortie. Vu aussi, en photo, sa ‘tite nièce, cinq ans, avec tous les
attributs et le caractère de l’adorable chipie. Elo ressent mal ses longs
séjours à Saint-Cyr, synonymes de nounou improvisée pour elle.
Oublié de noter d’autres
disparitions estivales, notamment celle d’Henri Amouroux, historien et penseur
à la voix posée. J’ai encore la musique de ses participations au débat sur
l’actualité qui se tenait le vendredi soir sur France Inter. Avec ses bretteurs
de circonstance, les Leroy, d’Ormesson et autres réactifs, il rendait
attractif tous les thèmes porteurs du moment. Je crois me souvenir qu’il
n’hésitait jamais à stigmatiser les méfaits de l’idéologie communiste.
Big Média, dans sa rapide
nécrologie, a souligné, comme une prétendue tache dans son exemplaire parcours,
qu’Amouroux avait été entendu comme témoin à décharge dans le procès Papon.
Encore le simplisme médiatique au service du bien-penser ambiant :
pour avoir suivi de longs passages du procès, on ne peut que constater la
complexité de la posture passée de l’accusé. Remettre dans le contexte
historique l’analyse critique assénée par les ronfleurs de certitudes, comme
l’a tenté cet esprit fin, garantit une plus sure équité intellectuelle que
celle des censeurs haineux avides d’un pugilat judiciaire. Amouroux a eu la si
rare élégance d’une fidélité sans faille à ses convictions, y compris
lorsqu’elles fusaient à l’inverse du consensus social, surtout lorsqu’elles
contrecarraient les antiennes officielles. Amouroux, Revel : voilà les
esprits lumineux de la France du Vingtième siècle, et non l’insane Sartre à
l’idéologie criminelle…
Encore une semaine légère avec
un férié au milieu.
Après ma mise sur Blog (à
accès strictement réservé) des pages les plus dures contre Heïm extraites de ce
Journal à taire, maman m’a adressé un
long mail qui confirme sa haine viscérale de Heïm le maudit comme j’ai baptisé ce blog dont l’adresse reprend le
patronyme réel du sieur. Si je cautionne une grande partie de son ressenti
aujourd’hui, je n’approuve pas le paquet de circonstances atténuantes dont elle
pare Bruce : toutes ses dérives, passées et actuelles, trouveraient leur
source dans cette immersion au château d’O. Que cela ait pu amplifier un peu sa
perdition, pourquoi pas, mais rien de déterminant : le bougre avait toute
cette salauderie en lui, quelle que soit l’endroit qu’il eut fréquenté. Faire
du château et de Heïm le déterminisme absolu de sa propre nature manipulatrice
me semble nier sa propre responsabilité.
Mardi 14 août
Encore une
après-midi de détente à choper quelque couleur mate au parc Tête d’Or. Si la
rentrée professionnelle se profile chargée selon le rythme crescendo à partir
de la mi-septembre, les semaines d’août se limitent au strict nécessaire pour
que la boutique tourne encore.
Passage exprès
hier soir de Louise et de sa petite famille pour rejoindre dès ce jour Le
Cellier pour quinze jours de détente chez les grands-parents d’Ilya.
Parmi les décès
d’été, infiniment moins regrettable que ceux évoqués récemment : celui de
l’officier SS ayant ordonné le massacre d’Oradour-sur-Glane. A son procès, il
ne déclara qu’un seul regret : qu’il y ait eu des survivants à cette
tuerie organisée. Quatorze années de taule effectuées par ce criminel majeur,
libéré en 1997 selon les critères humanitaires du pays incarcérateur. A
noter, sur le plan juridique, que le sanguinaire a été condamné pour crime
« de guerre » et non « contre l’humanité » et qu’il
s’inscrit en cela dans la sordide tradition guerrière des impitoyables
massacreurs dépourvus d’un semblant d’humanisme auquel se raccrocher. De la
pure brute congénitale dont il faudrait alléger à l’extrême le parcours
judiciaire : juste les laisser crever en souffrances entretenues. Tout en
l’écrivant, je reconnais l’absurdité simpliste du souhait talionien.
Achever ce Manus XV avec un petit tour visuel de la
luxuriante nature de ce petit coin calme du parc ouvrant sur la roseraie :
un vert cocon d’harmonie qui atténue les fracas du monde à ramasser sur l’air
émouvant des Feuilles mortes du feu Gainsbourg.
Mercredi 15 août, 23h20
Quelques degrés de trop pour apprécier le charme
d’une ville au calme. Matinée et début d’après-midi en compagnie d’Elo à
déambuler dans le parc Tête d’Or, les nouveaux bords du Rhône avec halte
déjeuner, et quelques artères lyonnaises avec intermède cinéma (le distrayant Ivan tout puissant). Occasion de suivre son actualité familiale,
sentimentale et professionnelle : naissance, hier soir, du second enfant
de sa sœur, une mère toujours aussi possessive et invivable, une relation de
cœur qui se pérennise et de bons contacts dans son travail. Elle songe, déjà, à
une installation dans la région de son compagnon (vers Tignes) et à la
conception d’un enfant dans trois ou quatre ans. Coup de vieux pour moi, merci
Elo !
Nos cieux paisibles nous permettent le luxe de ces
insouciants et si agréables moments de complicité. D’autres contrées, en
parallèle, n’en finissent pas de saigner à gros flots : l’Irak occupe,
bien sûr, l’écœurante place d’honneur. L’attentat du jour établit un nouveau record
dans la tuerie de masse depuis 2003 : en quatre explosions à l’adresse
d’une minorité religieuse sise en région kurde, c’est plus de deux cents morts
et quatre cents blessés obtenus par les terreurs intégristes à étiquette al
qaïdienne.
A qui la faute de cet interminable chaos ? Aux
Etats-Unis pour la plupart et selon le simplisme ambiant. Que serait-il advenu
si l’on avait laissé en place le sanguinaire Saddam et pérennisé les
rodomontades diplomatiques ? Quel naïf peut croire que la nébuleuse
terroriste n’aurait pas visé d’autres points d’ancrage ? Le terrorisme a
horreur de négliger les terrains faciles.
Samedi 18 août
Parc désert, lac paisible, si loin des agitations
boursières. Le libéralisme à tout prix, étendu à l’économie virtuelle, connaît
sporadiquement ces hoquets, décrochages qui paniquent les détenteurs de titres.
On peut être pour le capitalisme, sans réserve, et considérer comme caverneuses
les hystéries de la finance mondiale.
Internet a eu sa bulle boursière inconsidérément
gonflée pour, un beau jour, ruiner les plus aveugles. Depuis, pourtant,
Internet grandit toujours, tel un univers en expansion, et fait la fortune des
plus avertis. La marque Google n’est-elle pas reconnue comme la plus chère du
monde, avant Microsoft et Coca Cola ? Les pionniers de cette dimension du
réseau mondial n’avaient donc pas tort de croire aux potentialités économiques
du système virtuel, mais le grégarisme amateur a fait imploser les valeurs
attribuées à des milliers de jeunes
pousses du Net.
Si on doit pointer l’inconséquence d’organismes
financiers atteints de prêtite aiguë, si l’on doit soupçonner les agences de notation
des émetteurs d’emprunts, au mieux, de s’être vautrées dans la complaisance, au
pire d’avoir masqué les difficultés de ces organismes qui les financent, on ne
peut se limiter à la stigmatisation des boucs émissaires qui évitent de
s’interroger sur la tare consubstantielle.
Aujourd’hui, toute la complexité des causes des
baisses boursières ne doit pas occulter la simplicité dérisoire du suivisme, de
l’amplification des rumeurs, de la méfiance soudaine, du chaos cultivé. De
vraies grossières ficelles psychologiques qui déterminent, et c’est là le point
inquiétant, une bonne partie de la santé économique mondiale. Poupées gigognes
non décoratives, plutôt du genre affligeant, où la tête d’épingle incommode le
tout.
Comme souvent, ce n’est pas le système qui présente
des vices, mais les vices humains qui dénaturent le système. Primaires de Cro-Magnon
pour encore longtemps, nous sommes.
Mercredi 22 août
Ça renifle la rentrée, alors que ma semaine s’est
allégée au maximum pour rattraper les heures qui me sont dues.
La présidence a repris (si elle l’avait jamais
délaissé…) son rythme médiatique frénétique. Une flopée de réunions par-ci,
pour afficher la réactivité dans l’action, un enterrement par là pour la teinte
d’humanité et d’émotion transpirante, quelques déclarations fracassantes,
enfin, pour ne perdre ni la main, ni la parole.
Rendre compte de chaque battement de cil de
l’« hyperprésident », pour reprendre le néologisme du Sert-à-rien
général du PS, est devenu la spécialité de Big Média. Le Big Brother d’Orwell a donc tourné tous les feux de la rampe
vers lui, au risque d’une saturation.
Y verrait-on, sous l’apparente complaisance, un
plan ourdi contre Sarkozy pour griller peu à peu l’adhésion sondagière qui
ressort pour son action ? Boutade délirante, sans aucun doute.
Jeudi 23 août
L’abondance humaine à nouveau dans les artères,
veines et capillaires lyonnais.
Oublié de noter trois découvertes Internet
concernant la famille. Jim, d’abord, signalé comme singing-guitarist sur un site annonçant la sortie de Rush Hour 3. Il nous avait évoqué sa participation à une scène
face à la vedette de la superproduction américaine. Il semble que le plan ait
été conservé. Peut-être que son interprétation complète du morceau sera reprise
dans le DVD.
Bruce, ensuite, qui a référencé ses toiles sur un
site ouvert aux artistes peintres. Une biographie truffée de fautes, mais des
toiles, pour certaines, subjuguantes d’expression torturée. Une mise en fresque
de ses tourments à laquelle il faut reconnaître un certain talent, ce qui ne
m’anime, cependant, d’aucune bienveillance envers lui face aux salauderies
commises. Simple constat technique d’œuvres réussies, mais engendrées par un
antipathique personnage.
Raph, enfin, longiligne bout d’chou inscrit dans
une équipe de volley et qu’Internet régurgite aussi de sa mémoire tentaculaire.
Big Sarkozy satisfait encore plus de 60 % de
Français et cette base ne s’étiolera pas facilement pour l’analyste Pierre Giacometti :
pas du soutien de dernière heure qui s’évapore au premier coup dur politique, à
la première grogne sociale.
Son talon compensé d’Achille ne doit pourtant pas
être minoré : la surmédiatisation en fait la première cible pour une
opposition qui se cherche encore.
Même l’agité fringuant Chirac, en 1995, savait se
ménager des retraits et laisser son Juppé de Premier ministre assumer le
charbon de la politique gouvernementale. Ici, dans cette neuvième mandature
présidentielle, l’Elysée préserve de fait Matignon qui accomplit dans la
discrétion les projets claironnés avant le six mai.
Comment juger, alors, le traitement médiatique des
actions et prises de position du nouveau président ? Sans aller jusqu’à la
complaisance, peut-on évoquer une prédisposition favorable du corps majeur de Big
Média qui ne laisse émerger que de rares appendices hérissés contre ce
réflexe pavlovien ?
L’esprit féru de liens, de parallèles à établir,
pourrait tenter de lancer une passerelle vers les années Balladur, 1993-1995,
alors puissant Premier ministre cohabitationniste, soutenu par l’ambitieux
Nicolas Sarkozy, qui s’accordait une lune de miel prolongée avec les
journalistes, au point de croire (grâce aussi au fortifiant sondagier,
convenons-en) à son destin présidentiel. Le diapason peuple-média ne résistera
pas à l’échéance électorale, l’Edouard majestueux, gélifié dans sans
convenances désuètes, ne collant plus à l’aspiration populaire d’un renouveau
dynamique au revigorant goût de pomme verte.
Big Sarkozy a donc surpassé son maître d’alors, Sage
de Matignon, en offrant son activisme à cette caisse de résonance jusqu’à
présent bienveillante et en phase avec l’attente majoritaire.
L’onde néfaste, marquant le retournement de
l’opinion, devrait se renforcer si le dynamisme déployé est en décalage avec
les résultats ou le sentiment de résultats obtenus. Un agacement se propagera
chez le peuple amnésique, friand de têtes de Turc déresponsabilisantes, et Big
Média emboîtera le pas face à l’incontournable vague désapprobatrice. A
moins qu’un scandale, une affaire impliquant l’Elysée ne ragaillardisse le
microcosme médiatique enclin à brûler ses idoles.
La France anti Big Sarko tiendra alors sa revanche,
se cherchant pourtant toujours un leader
naturel crédible.
Scénette ordinaire de la vie politique française
qui masque les pôles réels d’influence sur la conjoncture nationale, sujet ô
combien moins sexy que le bourrelet du chef d’Etat effacé en exclusivité pour Paris Match.
23h45. Achevé le blog de vacances A nous le Finistère et invitations envoyées à la famille et à quelques
amis. Occasion de rappeler l’existence de deux autres blog-photos à accès
restreints : pour les noces d’émeraude des parents B et pour les vacances
en Corrèze de l’été 2006.
Cet univers bloguien, s’il est bien abordé, peut
constituer un loisir constructif de grande qualité.
Météorologie de notre été pourri et des extrêmes
climatiques forment une part notable de l’actualité quotidienne. De l’ouragan
Dean (?) ayant sévi en Martinique, à la Guadeloupe et dans le Golfe du Mexique,
aux pluies diluviennes en Europe du Nord contrastant avec les fournaises
persistantes de l’Europe du Sud, une France négligée par l’été et un pôle Nord
en situation de fonte accrue : du plus anodin focalisé, au plus
fondamental pour les conséquences planétaires, le rythme et les à-coups
climatiques s’imposent à nous, qui oublions si facilement l’exigence d’humilité
face à ces facteurs incontournables.
Mercredi 29 août, 23h30
Six jours d’enfer pour la Grèce, un Etat stigmatisé
pour son incurie, quelques promoteurs immobiliers soupçonnés d’avoir commandité
des pyromanes pour ces infectes besognes, mais aucune critique contre la
réactivité de l’UE. C’est même l’autosatisfaction pour la porte-parole du
Commissariat européen à l’Environnement qui se félicite de la vivacité de
réaction de pays membres. Ainsi, la soixantaine de pompiers français (le double
de ceux envoyés par… Chypre !) a-t-elle dû être déterminante dans cette
bataille parmi les trois mille Grecs (pompiers et soldats) mobilisés contre
cette tragédie. Non, satisfaits nous sommes, tout comme les instances
européennes, même si l’idée d’établir une « troupe européenne de
protection contre les incendies » est évoquée.
Curieuse réaction des médias qui varie selon le
supra pouvoir en cause. Aux Etats-Unis, après le passage de Katrina,
l’incapacité des autorités fédérales à réagir dans les temps et avec les moyens
requis avait été surabondamment soulignée.
Aujourd’hui, pas un soupçon de reproche à cette
quasi léthargie de l’UE qui n’a rien proposé de conséquent à la Grèce et s’en
est remise aux Etats membres volontaires. Certes les quatre Canadairs français
ont dû constituer un apport non négligeable, mais pour le reste, c’est du
symbolique bonne conscience pour se dire : j’y étais, on ne peut donc rien
me reprocher comme Etat.
Vendredi 31 août
Merci à toute la troupe satisfaite du rejet du
traité constitutionnel : ce n’est qu’une Europe économique qui a été
conservée. Pas d’autre élan, surtout face à un tel drame. Chaque Etat conserve
l’essentiel de ses moyens sans qu’on puisse noter de réelles différences entre
la solidarité affichée par des Etats tiers à l’UE et celle de membres par
statut plus proches des contrées grecques.
La compassion gesticulatoire ne peut se prévaloir
d’une once d’efficacité.
Dimanche 2 septembre
Ma BB à la clinique, moi sous les rayons solaires
au parc Tête d’Or, le rythme de la rentrée professionnelle ne s’est pas encore
imposé pour mon planning : mardi, seule journée de labeur pour la semaine
qui va accueillir la frénésie scolaire.
Sur le chemin boisé bordant le parc, arrivant à
hauteur du siège d’Interpol, petite pensée pour l’atypique Raymond Barre qui
vient de s’éclipser. Sans être du cru, il a insufflé à la ville une amorce de
rayonnement international.
Mercredi5 septembre
Ma dernière poussée pamphlétaire a suscité quelques
dizaines de réactions de tendances opposées selon le site de reprise :
négative sur PCC avec un penchant pour le réactif simpliste.
Petite digression : trois branleurs de rien,
avec tout l’attirail risible à portée de piétinement, à la démarche de crabe
arriéré, viennent empuantir mon bord du Rhône, mais, bien sûr, il ne faut
surtout pas afficher sa haine de ces enflures incommodantes. Par leur attitude,
leurs gueulantes, leurs provocations plus ou moins explicites, ils font bien
pire en actes. Leur racisme à eux, on n’en parle jamais. Qu’un dégoût profond
pour ces nuisibles sociaux, et je me contrefous de l’extrémisme dont on me
taxera. Je ne vise pas une catégorie raciale ou ethnique, mais un type de
comportement qui ne dépend ni de ses origines, ni même de sa classe sociale,
mais d’une prédisposition caractérielle exaltée par un néant éducatif.
Revenons à ma stigmatisation des Vélo’vandales en Véliberté : sur AgoraVox, au contraire, une
dominante élogieuse et qui s’efforce de compléter mes constats de façon
constructive.
Quel visage pour cette France sarkozyenne ? Une
rentrée d’engagements affichés qui vont se confronter aux prévisions
économiques de l’OCDE bien faiblardes pour notre nation. Les rentrées fiscales
faisant défaut pour le budget 2008, les coûteuses annonces s’émousseront ou
devront être compensées par de drastiques économies sur la bête administrative.
A l’échelle de la SNCF, on pressent déjà les
contradictions dirigeantes et des syndicats sur la braise. Un service fret qui
fonctionne en demi-teinte mais emploie tout de même vingt mille personnes.
Annonce par le responsable de ce service d’une impérative restructuration (ô le
vilain mot !) pouvant se traduire par cinq mille suppressions de postes.
Emois bruyants des officines syndicales qui provoquent rien de moins qu’un
démenti de la direction générale. Le syndrome 1995 n’a pas quitté les esprits
et certains savent très bien s’en servir.
Malgré tout le volontarisme présidentiel mis en
scène, on ne ressent pas une solidité gouvernementale telle qu’elle résiste aux
multiples fiefs rétifs à la réforme en maintenant sa révolution structurelle
seule capable de relancer les indicateurs économiques dans le bon sens. Madame
Lagarde se fait reprendre sur un terme aux effets psychologiques
dévastateurs : la rigueur se profilerait, mais il ne faut surtout pas le
dire. Madame Dati doit entériner la démission successive de plusieurs de ses
conseillers sans doute peu inspirés par la tournure insufflée à la tête du
ministère de la Justice. Nous pourrions multiplier la litanie des couacs !
en s’approvisionnant aux sources journalistiques informées de certaines
coulisses.
Tout cela confirmerait l’impossible monobloc
exécutif qui rendrait beaucoup plus périlleux une confrontation directe.
Nous voilà donc lancé pour un rythme effréné du
verbe qui risque de se laisser distancer par l’action cafouilleuse, imprécise
ou intrinsèquement contradictoire. L’attente des succès dans la vie de chacun
reste à espérer, mais le pouvoir se reposera sur l’incurie d’une opposition en
quête de résurrection, pour reculer la perdition programmée.
Jeudi 6 septembre
Matinée face au lac lisse de la Tête d’Or. Ciel
bleu, température presque fraîche accentuée par des poussées venteuses :
profonde sérénité dans ce parc déserté pour cause de reprise professionnelle.
La Décennie – Le grand cauchemar des années
1980 décape quelques perceptions encore euphoriques ou
bienveillantes sur la première période d’alternance politique de la Vème
République. Il verse parfois dans le style quasi abscons ou ésotérique :
« On a vu que les théories systémiques et cybernétiques, en vogue au
tournant de la décennie, préparaient le terrain en formalisant une définition
de la crise comme perturbation de l’équilibre antérieur et ajustement adaptatif
du système, par rétroaction, pour atteindre le nouvel équilibre. » Débrouillez-vous
avec ça !
Beaucoup plus clair dans d’autres phrases
incisives, tellement plus simples qu’elles versent dans le simplisme
imbécile : « (…) l’insolence d’une droite qui a le vent en poupe (…)
jusqu’aux plaisanteries franchement racistes du comique Thierry Le
Luron ».
Hormis ces deux extrêmes, il offre une densité de
références et de raisonnements qui nous plongent au cœur des contradictions et
des dérives de cette décennie qui se voulait la Renaissance du XXème
siècle.
Ainsi la vague SOS-Racisme et son brillant
animateur Harlem Désir, ensemble que je désignais comme le Potes Système : parade illusionniste qui séduisit la scène
médiatico-politique, mais n’eut qu’une portée marginale (sauf par
conditionnement suiviste) dans les secteurs touchés par la résurgence de la
haine du différent. Grisante autarcie des concerts organisés, des médias en
caisse de résonance, qui permettait au mouvement de « faire passer pour déjà populaire – produisant ainsi, par le jeu des médias, l’effet qu’ils
simulaient – une campagne et un organisme beaucoup plus soutenus par les
rédactions parisiennes et les piliers du gouvernement que dans les banlieues et
les quartiers. » De là à déceler dans cette fraternité à paillettes des
effets contre productifs, le pas est mince.
Vendredi 7 septembre, 23h17
Toute la faconde généreuse du Sud-Ouest des
commentaires n’a pas permis d’inverser la brouillonne entrée en terrain de
l’équipe française au Mondial de rugby. Sans même connaître la subtilité des
règles, on pouvait se navrer des passes ratées, des coups de pied hasardeux,
des pénalités non transformées. Le consultant de TF1 voulait malgré tout croire
à une Argentine poussive et sur le point de s’écrouler : elle tînt bon.
Une élimination de la France avant les quarts de
finale sonnerait le glas d’un Etat de grâce qui se voyait déjà sur les rails de
1998. La petite musique triomphaliste colportée par les médias nous accordait
déjà la coupe, réglés les quelque sept matches-formalité programmés.
Terrible désillusion qui attend les soutiens de
l’équipe et détournement des téléspectateurs des écrans, voire des spectateurs
des stades : scénario économique catastrophe. A moins que ce premier échec
serve de goupillon salutaire.
Nouveau message laissé à Bonny : pas de
rappel. Il semble que ce lien se soit dégonflé comme baudruche inutile. De mon
côté, hormis Elo et, sporadiquement, Aline, aucun lien amical n’a survécu. Sans
doute ne dois-je pas inspirer l’attrait nécessaire. Je ressens cela de
tellement loin que je ne m’acharne en rien à les faire renaître. Profond
désintérêt pour ces amitiés avortées.
Lundi 10 septembre
Les années 2002, 2003 et bientôt 2004 de mon Journal à taire, mis en ligne sur les sites blogspot.com, laissent explicitement transparaître ma rupture profonde avec
l’univers de Heïm, et ce malgré l’amputation, dans cette partie accessible à
tous, des passages les plus virulents réservés au Blog Heïm le maudit à l’accès restreint.
Sans doute pour cela que, pour la première fois
depuis longtemps, aucune manifestation n’est venue du château d’Au, pour mon
plus sain plaisir.
Se recentrer sur les contacts bénéfiques et évacuer
tout le reste : des rogatons de cet univers moribond aux accointances
s’érigeant amitié.
Sans doute la dernière semaine allégée avant les
rentrées successives à Cqfd, je goûte les francs rayons d’un septembre estival.
Cette écriture se poursuit, certes, et cette année
de généreuse façon ce qui révèle d’autres sources d’inspiration, mais quel
intérêt fondamental de savoir si je serai lu ou pas outre-tombe (et déjà de mon
vivant !) ? Aucun, en fait, si ce n’est la dérisoire satisfaction de
se croire utile pour le ressenti et la réflexion de tiers… Parfaite déviance de
l’infatuation. Se limiter au contentement de l’acte d’écrire comme tel, sans
s’attacher à la réception.
Jean-François Bizot décédé : le fureteur de la
contre-culture dont je lisais (en cachette) certains sulfureux numéros de sa
revue Actuel achetés par mon père, reste comme une saillance de
l’anti-conformisme de gauche, comme Le Crapouillot de Galtier Boissière
pouvait l’être à droite.
Quel tournis donnera les décès en séries de
personnalités plus longuement fréquentées par médias interposés. Le sens plus
aigu de sa finitude de laquelle subsistera de bien fugaces traces.
Jeudi 13 septembre
Mickaël Moore touche encore du doigt l’une des
tares de la société américaine : l’incurie du système de santé. Quitte à
pousser la mauvaise foi jusqu’à faire dépeindre l’organisation française par
quelques-uns de ses compatriotes installés chez nous et qui y voient l’idéal en
tous points.
Dimanche 16 septembre, 23h
Week-end radieux, comme les mois estivaux auraient
dû nous en offrir : l’idéal pour vagabonder à pied ou à vélo’v dans les
rues de la Presqu’île à la découverte du patrimoine lyonnais. Sur deux jours,
j’ai pu enchaîner la visite du palais de justice, du théâtre des Célestins, de
l’Hôtel de Ville, de divers établissements religieux, de l’Hôtel Dieu… Du
bonheur pour les yeux et de la saine fatigue pour les gambettes.
Vendredi 21 septembre, 23h10
Je l’avoue, l’épopée rugbystique française ne me
laisse pas de marbre. Sans doute devrais-je me plonger dans la littérature
d’Antoine Blondin pour mieux cerner ce ressenti instinctif, mais je préfère me
dispenser de toute influence.
A côté des basiques règles du football, ce sport
collectif mêle d’innombrables principes à respecter qui en font une discipline
de la tête, tout autant que des muscles.
Le XV français monte en puissance talentueuse, se
débarrassant ce soir des Irlandais, pour tenter une nouvelle euphorie
collective avant les dix ans de celle liée au Mondial de football.
Il fallait une figure charismatique et
communicante, comme pouvait l’être le maestro Zidane : c’est le guerrier
chevelu, le Samson déterminé Chabal qui détermine l’attraction. Le colosse au
physique mythologique pourrait incarner la « nouvelle Renaissance »
que l’Elysée appelle de ses vœux : indomptable, engagé sur tous les
fronts, la mine hirsute.
Lundi 24 septembre
Quelques rayons d’or pour chauffer l’épiderme. Le
portrait de Mariani en lecture, le trublion de la majorité, et d’un coup deux
jeunes femmes élégantes prennent place à mes côtés, mon banc étant le seul
alentour à s’exposer sans ombre. La brune sculpturale feuillette le dernier
album de Yann Arthus-Bertrand pour un voyage planétaire en 365 jours. Couleurs
et formes enchanteresses se succèdent entre beautés naturelles et civilisations
humaines. Les commentaires se concentrent sur le désir de voyages. Instant de
quiétude à savourer. La couverture refermée, le ciel s’assombrit : fin
d’une divine parenthèse.
L’onde me retient d’intégrer le dialogue pour en
découvrir davantage. Congrès des notaires de France : voilà d’où elles
viennent. Beaucoup moins féerique qu’imaginé…
La politique prend son rythme des réformes et la
tension syndicale s’accroît. Légitimité démocratique – je fais ce sur quoi je
me suis engagé – contre légalité sociale : le pouvoir en place
tiendra-t-il enfin le cap ?
Lundi 1er octobre
Mon an trente-huit se profile dans une sérénité
assumée.
Pas le cas de mon père, eu la semaine dernière au
téléphone, pour qui le calvaire professionnel continue, avec les problèmes
financiers concomitants. A bientôt cinquante-neuf ans, il a même reçu une
lettre d’avertissement par son supérieur hiérarchique. Sa carrière, mouvementée,
par le nombre d’entreprises et de postes occupés, a souvent subi des tensions
relationnelles avec tel ou tel pour des divergences de vue dans la conduite du
travail, des incompatibilités d’humeur ou le refus d’adopter tel comportement
jugé indigne (comme chez Charles Jourdan où, jeune directeur de magasin, il
refusera de pousser à bout les vendeuses, jugées trop vieilles par la direction
générale, pour les remplacer par de la chair fraîche). Sa course au chiffre
d’affaires à faire progresser associée à un pesant climat interne pourrait être
dangereux pour sa santé… Je l’ai invité à m’appeler lorsque le moral flanche.
Heureusement qu’Anna et les deux garçons (Alex atteint les 1m77) sont là pour
l’entourer.
Mon ambiance professionnelle est, elle, au beau
fixe, et la modestie de mes ambitions me laisse le temps d’une vie paisible,
créative et régénérante.
Passés par notre directrice, les trois numéros de Libération
(du 13 au 15 septembre) qui se sont fait l’écho des forums Vive la politique ! Des duels cérébraux mettant aux prises les acteurs
de la vie politique, sociale, économique et culturelle sur des sujets
variés : du lien entre le travail et l’université à la question polémique
sur la suppression des partis en passant par le philosophique « a-t-on le
droit de tout dire ? » De courts textes de synthèse qui vont faire la
joie de nos aspirants lieutenant sapeurs-pompiers qui débutent aujourd’hui.
Pour moi, une après-midi de lecture au parc Tête
d’Or pour goûter quelques rayons de ce décidément radieux début d’automne.
Lundi 15 octobre, 23h40
Une
presse française qui se fait l’écho du décès, samedi dernier, du dernier
mercenaire Bob Denard rongé par l’Alzheimer. L’occasion de plonger dans les peu
reluisants arcanes de la politique étrangère française version déstabilisation
clandestine, coups de force non revendiqués… une raison d’Etat virginale pour
l’Hexagone, ma foi !
Mardi 16 octobre
De
plus en plus de voix qui défendent la légitimité des tests ADN dans la
politique d’immigration face à ce déchaînement irrationnel qui s’hypnotise,
bien volontairement, sur l’horreur biologique à senteur nazifiante de cet
amendement. Je retrouve mes arguments chez les quelques députés UMP se risquant
à défendre médiatiquement le projet, mais rien n’y fait. Impression de revivre
la même couche de sourde mauvaise foi. Il faut être forcément et farouchement
contre, faute de quoi la pancarte infâme est clouée sur votre front.
Alors
que ce dispositif trouve sa raison d’être dans la lutte contre la fraude
documentaire et l’aide des familles d’immigrés de bonne foi, mais victimes du
néant administratif de leur pays d’origine, les braillards post-Pote Système (la main sacrée régnait sur la scène des
anti-ADN) transmutent l’intention en crime de discrimination à effluves
racistes. L’étroitesse intégriste des Lévy, Vals et autre Adjani confine à la censure
de toute argumentation qui contrevient à leur idéologie. Pas mieux que les
islamistes, finalement.
Le
trépas de Bob Denard a dû faire remonter quelque chagrin chez Heïm qui s’était
lié d’amitié avec lui à son retour en France métropolitaine.
Nous
voilà nous insurgeant contre cette pratique clandestine de notre politique
étrangère, en Afrique pour le cas d’espèce, tout comme on redécouvre, l’air
effarouché, la présence de caisses noires dans les fédérations
professionnelles ! Quelle naïveté… jouée, simulée ?
L’univers
à la Bisounours persiste chez des commentateurs choqués par ces pratiques aussi
anciennes que l’activité humaine à visée influente.
Le
folklore des grèves publiques va reprendre sa place médiatique dès demain pour
réclamer, sans aucune honte ni conscience de l’obscénité de leur motif de grève
– le maintien d’un statut de retraite privilégié. Espérons que, enfin ! le
cap gouvernemental soit maintenu et ne cède pas aux desideratas du pavé.
Chacun
veut des réformes, de la rupture, du changement, sauf si cela contrarie sa
petite existence, son minable confort… Que les politiques gouvernent,
enfin ! sans se laisser empuantir l’esprit par les chauffeurs d’asphalte à
l’idéologie ringarde.
Jeudi 18 octobre, 23h15
Fin de
journée estampillée Braillards à régime spécial. L’exécutif ne s’écarte
pas de sa volonté réformatrice au nom du respect d’un programme martelé avant
les élections. La légitimité des grévistes ne pèsera donc pas lourd face aux
objectifs retenus par les urnes.
Les
semaines pro vont notablement se charger jusqu’à la mi-décembre avec six
nouvelles formations financées par la région qui vont s’amorcer. Demain midi,
déjeuner avec l’équipe permanente des formateurs et le premier des responsables
de la formation pour de joyeux instants partagés. L’entente cordiale se
confirme.
Mercredi 24 octobre
Etape symbolique que j’ai omis de signaler à ma date
anniversaire, le 6 octobre dernier : la dernière échéance du prêt consenti à la
SCI du château d’Au pour lequel je restais caution solidaire, et
ce malgré mon retrait total de cette société civile immobilière. Les
73 175,53 euros prêtés en 1992 ont été remboursés. Cette extinction de
dette m’éloigne un peu plus de cet univers dont je n’ai, d’ailleurs, plus de
nouvelles depuis quelques mois. Pour enfoncer le coin entre les gens du Nord et mon ancrage lyonnais, je
vais interrompre mon contrat avec orange pour mon portable (numéro que je
possède depuis le début de ma mise à ce moyen de communication – en 1997 ou 98)
et bientôt de même avec la ligne fixe. Evidemment, aucune information de mes
nouveaux numéros à Heïm et à sa réduite clique rapprochée. Bon vent à tout
cela !
Curieux
comme, en quelques années, mon indifférence allergique à cet univers s’est
substitué à l’enclin le plus passionné. La sape renouvelée de Heïm a finalement
permis ce rejet glacial. Je jauge cette période comme formatrice mais sans
regretter une once de ce vécu mis à distance.
Sans
doute que les années écoulées me feront revenir, réfléchir plus panoramiquement
sur cette tranche d’existence. En attendant cette supposée sagesse réflexive,
je poursuis ma purge existentielle.
L’actualité
fait se bousculer de multiples thèmes nationaux et mondiaux. Le Sarkozy martèle
ses antiennes en forme de méthode Coué ; la Californie se consume sous les
brandons incandescents ; l’environnement fait son Grenelle loin de la rue
ainsi baptisée (on devrait parler du Saint-Germain de l’environnement pour
PPDA) pour tenter une révolution écologique ; les faits divers truffent et
comblent les carences de l’information, etc.
Dimanche 28 octobre
Belle
journée automnale au parc Tête d’Or surchargé de familles goûtant aux jeux
dominicaux sous l’astre déclinant. Avec mon b’twin Seven, le mp3 Sony et
ses quatre mille six cents mélodies, mon univers se trouve peu dérangé par le
flux humain. Je laisse à peine quelques scènes joyeuses, quelques regards
curieux parasiter ce centrage sans but.
Jeudi 1er novembre
Les aurores pour ma BB et moi afin de ne pas rater
le TGV de 7h30 direction Big Lutèce. Une paye qu’on avait rejoint la capitale.
Occasion de ce viaduc professionnel (en pause depuis dimanche soir pour ma BB,
mardi soir pour moi) pour visiter les familles. Première halte à Rambouillet
pour découvrir le nouveau nid de Jim et Aurélia, bien plus spacieux que leur placard du XVIe parisien. Déjeuner partagé avant de rejoindre, tous
les quatre, Saint-Crépin chez Maman et Jean.
Des suites d’aménagement, après réfection, du
premier étage avec, sans doute, au moins une chambre prête à usage. Dès le
samedi midi, nous retrouverons Rueil Malmaison, pôpa et sa petite famille bien
peu vus cette année. De rares plaisirs affectifs à densifier sans retenue.
La nature automnale défile en ce matin bleu,
quelques gelées blanches émergeant au gré du frimas en volutes prégnantes.
Qu’elle est belle cette France effleurée à grande
vitesse : les pastels d’une nature en voie d’hibernation s’écoulent au fil
des courbes agrestes ; les logis truffent, sans jurer, les vallons et
mamelons mis en branle par notre fuite vers le Nord. Trompeuse immuabilité de
ce fragile enchantement du hasard et de la vitalité dardé par les rayons de
l’astre ascendant. La vie ennoblit terres et roches ; l’esprit vagabonde,
aspirant à une harmonie utopique.
L’humanité déçoit par son contingent de
malfaisants. Aucune catégorie, section, parcelle de l’espèce désignée dans
cette cohorte hétéroclite : de la petite frappe profiteuse, centrée sur la
satisfaction immédiate de ses ineptes besoins, surtout au détriment du bien
commun, jusqu’au notable se torchant avec le contrat social pour combler ses
intérêts. Chacun, dans sa sphère méprisante de l’autre, désespère un peu plus
du système collectif salopé. Se contenter d’observer illusionne sur sa propre
capacité à échapper à la bourbe ambiante.
Revenir aux beautés sans conscience d’une nature
offerte. La tension vocale d’Alanis Morissette, l’émotion croissante de That Particular Time bouleverse mes ronchonnements, plongé dans cette
nappe brumeuse qui occulte les merveilles d’un espace débarrassé des fatuités
sonores, des salauderies braillées, des inepties débitées pour se rassurer de
sa présence à l’autre.
Poussée misanthropique, comme un gênant urticaire à
dissimuler… je ne veux pourtant pas l’ignorer. Elle rythme, depuis petiot, mon
rapport à ce monde. Des plongées dans son histoire à l’imprégnation quotidienne
de l’actualité, je ne parviens pas à rester enthousiaste.
Si l’extrême majorité, à laquelle je m’agrège, ne
fait que vivoter en s’accordant quelques excroissances jouissives, la part
malfaisante dévoie les règles collectives du bien vivre pour enfler leur ego et
satisfaire leurs folies ordinaires.
Revenir aux étendues esthétiques pour reposer un
peu ses tourments et espérer que l’aventure humaine ne s’achève pas dans un
chaos nihiliste…
Dimanche 18 novembre, 0h10
Routine d’une certaine densité professionnelle ne
me laissant plus trop le loisir du vagabondage scriptural. Facile justification
qui occulte certainement un évident tarissement intérieur. Témoignage sans
constance, soumis aux poussées urticantes, mais sans profondeur mesurée.
Cette fois, l’éloignement d’avec Heïm, Sally et
autres semble accompli et irréversible. Je ne serais pas étonné de ne recevoir
de nouvelles qu’à l’occasion du décès de Heïm, que Karl m’annoncera d’une voix
grave, presque recueillie. Je n’éprouverai alors ni peine, ni satisfaction,
juste la sensation d’un terme à un chapitre majeur de mon existence. Peut-être
la tentative de renouer les liens avec Alice, que je n’aurais jamais dû rejeter
de la sorte. Seule figure, avec Karl, que je regrette d’avoir perdue.
Au sortir de ces quelques lignes : sensation
d’une si extrême froideur, d’un tel détachement, que j’en viens à soupçonner
chez moi, malgré moi, une posture sans grande assise jusqu’au boutiste. Et
pourtant… cette indifférence à Heïm et son univers se confirme plus ancrée en
moi les années passant même si, pour nourrir les introspections du diariste, je
reviens sporadiquement dans ces pages sur ce thème et son actant principal. Se
comprendre et jauger sa trajectoire ne se conçoit qu’en se colletant à toute
son existence, et notamment aux pans dont on se distingue au jour de la
démarche.
Alors pas de faux-semblant : l’extrême
modestie d’existence s’est substituée aux avantageuses projections qu’inspirait
le château. Et pourtant… aucune nostalgie de cette frénésie.
22h20. Vu ce
jour Elo, avec ma BB, pour raclette partagée chez nous suivie d’une toile aux 8
Nefs sur un écran de poche. Va bien l’Elo, avec ses vingt-six ans, son mordant,
son Julio qu’elle pense retrouver définitivement l’été prochain à Tignes.
Attachant de la voir évoluer au fil des années. Un des très rares contacts
lyonnais qui perdurent. Les Bonny et Eddy, pourtant relancés, n’ont rien
concrétisés, les Jean-Luc et Barbara n’ont pas renouvelé (à notre tort, nous
aurions dû les inviter chez nous), l’Aude (plus sûr du prénom) a simplement
disparu, les Aline et Pedro se font rares…
Le tissu relationnel commun se réduit donc à peu de choses. Mieux comme
ça, n’ayant qu’un week-end sur deux à partager.
Demain les grévistes minoritaires poursuivent leur
combat d’arrière-garde. SNCF, RATP et EDF s’alourdissent de ces employés à vie
mécontents qu’on aligne leur régime de retraite sur le droit commun. Cirque de
ces pseudo mobilisations qui se font le plus souvent sur l’intimidation perlée
et l’art du grégaire. Le vote à bulletin secret dans les assemblées générales
modifierait notablement le poids humain, et donc politique, de ce mouvement
social.
Le parallèle avec les agitations au sein des
universités s’impose : là encore une minorité idéologisée impose ses
blocages, ses gueulantes contre une réforme dont la plupart n’ont qu’une
caricature au mieux, une traduction mensongère au pire comme catalyseur de
grognes.
Un projet ministériel pour l’université de plus à
la vindicte estudiantine. A désespérer de faire se redresser ce secteur
sinistré et ô combien en concurrence, à son insondable désavantage, avec les
grandes écoles qui, elles, ne tournent pas du nez devant l’argent privé.
Les gauchistes nostalgiques du Tout-Etat à la
soviétique sont bien là, bruyamment là pour veiller à ce que nos universités
n’entament pas l’ombre d’un pas vers une autonomie. Pour ces gesticulateurs, ce
processus conduit rien moins qu’à la privatisation ! Le sale argent privé
deviendrait donc seul maître à bord rendant inexorable une sélection infâme,
laquelle, évidemment, n’existe en aucun cas aujourd’hui entre les facs
délabrées et les grandes écoles magnifiées. Laissons les croire aux merveilles
de cet argent public comme seule source de financement. Quel résultat splendide
obtenu. Ces étudiants du tout-va-bien empêchent la majorité d’obtenir les
réformes nécessaires.
Lundi 19 novembre, 22h30
Au menu social de demain : grève, encore et
toujours ! Le Besancenot, de passage dans l’émission radio-télévisée Le franc-parler, a débité ses antiennes révolutionnaires pour
défendre les terreurs minoritaires qui poursuivent la grève. L’extrême
gauchiste voudrait délaisser ses poussiéreux oripeaux trotskistes matinées de
Krivine soixante-huitard pour un nouveau mouvemant anti-capitaliste, et sans
réaliste mise en application.
Demain matin, les deux groupes de financement
région que j’abhorre pour quelques éléments malfaisants.
Jeudi 22 novembre
Répartition de l’info dans le groupe TF1 : à
Poivre d’Arvor le franco-français radoté. Entre les derniers soubresauts de la
grève des cheminots et les gueulantes des frileux lycéens qu’horrifie la
présence d’argent privé dans l’université, le prisme de ces sujets dérisoires
rend plus prégnante la nécessité de s’ouvrir à l’actualité internationale.
A Vincent Hervouët, pour notre plus grand bonheur,
le journal du monde qui nous rappelle que lorsque l’hexagone subit le folklore
de quelques intégristes syndicalistes, des coins du globe connaissent un vrai
chaos. Tout cela rend pour le moins risibles, ou obscènes, les revendications
des fonctionnaires et des pré-vieux étudiants chevillés sur le sacro-saint Etat
qu’ils sont si prompts à vilipender par ailleurs : un défouloir commode,
en somme.
Petit actu française nouvelle : le président
en retraite Jacques Chirac vient d’être mis en examen pour détournement de
fonds publics. Quinze ans après l’ouverture de dossiers l’impliquant, l’ex
grand manitou de la mairie de Paris et du RPR connaît un premier avant-goût
judiciaire qui a conduit à la condamnation du « meilleur d’entre
eux », pour reprendre l’expression de Chirac, le désormais exclusivement
Bordelais Juppé… Alors, en toute logique judiciaire, son supérieur hiérarchique
devrait écoper d’au moins la même peine.
Dimanche 25 novembre, 0h05
Une nuit de plus sans ma BB en labeur nocturne.
Soirée sans intérêt pour moi, sauf la découverte
d’un documentaire consacré à l’acteur Pierre Richard, panégyrique affectueux.
Depardieu, Lanoux, Birkin, Darc, Guibet, Barrault, quelques réalisateurs
(Lautner, Véber…) et l’immense compositeur Vladimir Cosma ne tarissent pas
d’éloges à son endroit.
Le dégingandé filiforme du Grand Blond tient aujourd’hui du bedonnant rêveur. Tellement
porté sur les comiques dans l’art cinématographique, il fait partie des plus
distrayants dont je ne me lasse pas de revoir les films. A total rebours d’un
de Funès, réserve faite de leur énergie commune, le grand bouclé m’a permis quelques
régénératrices parenthèses lorsque le sombre entourait toutes mes actions.
Merci à ces artistes du comique que les culs pincés de la toile snobent
si grossièrement.
Mercredi 12 décembre
La présidence Sarkozy endure son premier vrai
échec : c’est dans la mécanique, aux accents si convenus, de la diplomatie
que le fiasco s’affirme. Avoir opté pour la réception fastueuse et sur cinq
jours, de l’autocrate illuminé Kadhafi autoproclamé défenseur des tyrannisés
d’Afrique par les méchants Européens, constitue l’erreur majeure. Le bougre à
la trogne bouffie, détestable dans chacun de ses traits, jubile d’ainsi
malmener la politique étrangère française : Sarkozy s’acharne à la
realpolitik version VRP qui gonfle son carnet de commandes, Rama Yade fustige
sans précaution l’infâme colonel libyen, Kouchner mâchonne son chapeau avant de
l’avaler sous les lazzis du parti socialiste, députés, ministres et secrétaires
d’Etat d’obédience UMP se désolidarisent du choix présidentiel.
Vendredi 14 décembre, 0h01
Alors que ma contracture musculaire au mollet
droit, survenue dimanche soir, se résorbe correctement, je sens poindre toux et
éternuements de mauvais augure.
Encore une semaine de labeur alimentaire avant
quinze jours de festoiements qui, je l’espère, favoriseront quelques
approfondissements diaristes.
Tournis de ces semaines jugées surchargées, car
sans grand intérêt personnel. Les groupes croisés, notamment ceux issus des
financements par la région, attirant quelques caricatures de cité, ne m’inspirent
aucun penchant philanthrope.
Samedi 22 décembre
L’après besogne m’ouvre une France à la nature
prise par la glace. Les doigts encore engourdis d’une attente prolongée sur le
quai, je parviens avec la peine d’un vieillard tremblant à tracer mes lettres
liées.
Les habituelles festivités, repas et pots d’avant
Noël se sont étoffés d’une invitation de trois collègues appréciés, l’apaisant
LD, la lumineuse CM et le complice HG, à boire un verre dans notre nid décoré.
Moment sans temps mort où je leur ai fait découvrir quelques facettes de mon
aventure éditoriale et littéraire alors que HG jouait au piano et chantait
quelques compositions personnelles.
Jeudi 27 décembre
Tout de même, les intentions de remuer un peu
l’hexagone demeurent louables, mais la traduction comportementale ne
s’affranchit pas, elle, d’un égocentrisme exacerbé qui énerve.
Pas inspiré pour prolonger ce qui constituera mon
prochain article-blog, vraie première indignation contre la pratique du pouvoir
présidentiel par Sarkozy.
Il fallait attendre : après six mois
d’exercice, les contours n’ont rien de prometteurs pour les quatre ans et demi
minimum à tirer, sauf imprévu majeur (assassinat, démission…). Je ne renie pas
pour autant mon vote, me réjouissant d’avoir évité au pays l’amateurisme
caractériel d’une Royal revancharde.
Nous voilà, ma BB et moi, au Cellier pour une
troisième mouture d’un Noël prolongé pour cause d’étapes familiales.
Toujours aux anges chez maman et Jean, moins
confortables chez mon père, mais une escapade parisienne agréable en sa compagnie
pour enchaîner l’exposition sur un peintre du XVIe siècle, les
illuminations des Printemps et Galeries Lafayette et, en point d’orgue final,
la remontée des féeriques Champs Elysées avec l’alignement des arbres
luminescents. En sus des loupiotes habituelles (mais à basse consommation,
cette année), ils sont dotés de tubes parcourus par une lumière liquide. Très réussi. Extrême privilège de pouvoir s’émerveiller de ces lieux
préservés des chambards barbares du monde.
Avec les parents de ma BB, sa sœur Louise bien
affinée et sa ‘tite nièce Ilya, et en attendant l’arrivée demain d’Emma et
François, la convivialité devrait se poursuivre de la meilleure des façons.
Seul Richard, le compagnon de Louise, manquera à l’appel pour cause
d’obligations professionnelles.
Comme toujours, les semaines de repos filent trop
vite. Cela en confirme la texture agréable, à la dimension existentielle
recherchée.
Mon père m’a demandé si j’avais des nouvelles de
Sally, de Heïm : rien, nib, et cela ne m’affecte en rien. Le temps passant
m’éloigne de ces univers eux-mêmes en divergence. Curieuse constitution que la
mienne qui ne recherche aucun suivi de contact, qui n’a que très peu d’amis qui
se manifestent régulièrement (dans la situation présente, seule Elo s’acharne à
maintenir le lien, et je lui en suis gré). Cela relève, sinon, d’accointances sur
la toile.
Pour en revenir à ce détachement assumé d’une part
majeure de mon existence, l’explication est à chercher dans une période
d’incubation qui se poursuit : une telle indifférence (même si l’intérêt
introspectif subsiste à travers ces pages) acquise sans poussée dépressive,
comme un regret de ce magistral gâchis, semble devoir s’ancrer dans la durée
d’une sédimentation homéopathique. Qu’une telle personnalité comme Heïm, dont
je sais pertinemment que les années de fréquentation sont comptées, n’attise
plus aucun enclin de retrouvailles, cela suppose une sécheresse d’âme qui
s’amplifie chez moi et/ou un complet épuisement de la relation humaine qui
existait entre nous. Un cumul des deux facteurs expliquerait mon peu de
propension à entretenir les liens lyonnais.
Vendredi 28 décembre
11h. En cette période d’abstinence télévisuelle et
radiophonique, c’est par la presse régionale, en trempant un muffin miellé dans
mon thé au lait, que j’apprends l’assassinat de Bénazir Bhutto. Digne fille de
son père, elle est fauchée en pleine reconquête du pouvoir. Quelques mois après
une tentative épargnant l’autoproclamée nettoyeuse d’islamistes, mais déchiquetant près de cent
quarante personnes, la seconde attaque kamikaze a eu raison de la charismatique
dirigeante du PPP. En guise de signature morbide, la tête de l’human bomb s’est offert un vol plané de soixante-dix mètres.
Le Pakistan ne va, sans doute, encore pas connaître
d’élections en janvier prochain : Moubaraf tentera, par la poigne
étatique, d’éviter la guerre civile et les coups de boutoir intégristes. Dans
cette infâme mixture d’arrivistes sanguinaires, rien de net : entre les
détenteurs du pouvoir exaspérés par l’appétit politique de la feue Bhutto et
les opposants islamistes (pourtant en obscure coalition avec la majorité
parlementaire) en haine meurtrière contre l’insoumise, le prisme des
prétendants à l’occire laisse possible nombre d’hypothèses.
Jim a eu l’inspiration originale de m’offrir
l’essai d’un auteur dont je ne partage pas le bord politique : Ce grand cadavre à la renverse de Bernard-Henri Lévy. Depuis lors, aucune envie
de poursuivre deux des bouquins en cours emportés pour les fêtes : L’abolition de Badinter et La
décennie de Cusset. Irrésistible
penchant à colleter mes arguments à ceux du philosophe politique.
Un gros tiers lu plus tard, un bilan plutôt
positif : bien plus de points de convergence que je ne l’escomptais.
Une capacité sans conteste à jongler avec les
concepts attachés à des événements historiques phares qui déterminent notre
obédience idéologique selon notre façon de les considérer. Cependant, cette
adresse lui fait, parfois, frôler l’ostracisme, négligeant de reconnaître des réflexes similaires au camp de droite. Ainsi, son incapacité à « faire la
différence entre un despote brun (nazi), rouge (stalinien) ou vert
(islamiste) » a été une obsession, pour les deux premières couleurs en tout
cas, d’un Gabriel Matzneff, d’un Raymond Aron et d’un Jean-François Revel. Pas
de monopole, donc, dans ce réflexe salutaire.
A noter, toutefois, que le despotisme rouge ne se
limite pas au stalinisme comme l’a minutieusement démontré Le livre noir du communisme de Stéphane Courtois et de ses compétentes plumes
associées.
Sans doute pour mieux explorer la profondeur de nos
fautes historiques, B.-H. Lévy va jusqu’à défendre l’absolutisme de la
repentance : « avoir une part de soi qui se sente obscurément, mais
fondamentalement, coupable aussi de ce que l’on n’a pas fait ». A
ce titre, personne ne peut se relever de sa croix.
La philosophie de Levinas, décryptée par Lévy, et
notamment sa distinction de l’homme moral et immoral, trouve de terribles échos
dans le comportement des saprophytes d’un système généreux. Tout comme la
plupart ne s’estime pas responsable de ce qu’il n’a pas directement commis, une
bonne part abuse de droits sociaux (exemple de la Sécurité sociale) par le seul
fait qu’elle y contribue et peut, de ce fait, les dévoyer de leur vocation
initiale.
Lors de son panorama des indignations spécialisées,
et donc malhonnêtes, il s’en prend avec justesse à ce que j’avais qualifié
« d’idéologie de l’autruche » : « cette caricature
d’internationalisme qu’est, désormais, l’altermondialisme ; et, derrière
la caricature, dans son sillage en quelque sorte, la haine du libéralisme, le
refus plus ou moins déguisé de l’Europe, et toutes les crispations
identitaires, nationalistes, qui vont avec. » Dans ce domaine, plus de
clivage droite-gauche qui tienne.
D’autres sujets maintiennent d’aplomb les
divergences de ressenti et de traitement. Ainsi des émeutes urbaines auxquelles
il s’acharne à déceler du sens et des circonstances atténuantes pour les agités
« encapuchonnés comme des membres du ku klux klan ». Sans l’ombre
d’un doute, la dérive barbare est « consubstantielle à tous ces
soulèvements que le regard éloigné de l’historien a fini par blanchir mais qui
ont été, au départ, pleins de férocité et de fureur ». Cependant, le
suivisme saccageur et potentiellement meurtrier des délinquants agités ne s’est
accompagné d’aucun message pour substituer autre chose à la situation
focalisatrice de leur jusqu’au boutisme.
Autre cible de gauche qu’il fait bon piquer à deux,
le protosocialiste qui n’accepte toujours pas le capitalisme : « le
cerveau dinosaurique du sénateur Mélenchon auquel l’information tarderait à
parvenir ». Et n’oublions pas l’impardonnable rôle de fossoyeur de l’UE
tenu par cet arrière-gardiste de la gauche française.
Il en subsiste encore pour croire à une famille
politique s’épanouissant (s’écartelant, plutôt) de Strauss-Kahn à
Besancenot : on a d’ailleurs pu apprécier la splendide unité à l’occasion
du débat autour du feu traité constitutionnel.
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